La 43présentation de la Coupe Ryder, qui s’amorce ce vendredi au club Whistling Straits au Wisconsin, promet d’être vivement disputée entre une formation américaine qui réunit plusieurs des meilleurs joueurs du monde et une équipe européenne qui mise sur l’expérience et la cohésion.

La pression sur les Américains…

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Le capitaine de l’équipe américaine, Steve Stricker, regarde Harris English et ses joueurs prendre le départ lors de la ronde d’entraînement, jeudi.

Sur papier, les Américains n’ont peut-être jamais misé sur une équipe aussi talentueuse en Coupe Ryder. Avec pas moins de 8 des 10 meilleurs joueurs mondiaux, des vainqueurs de plusieurs tournois majeurs – Dustin Johnson, Brooks Koepka, Jordan Spieth ou Collin Morikawa, entre autres –, la formation du capitaine Steve Stricker surpasse nettement l’équipe européenne du capitaine Padraig Harrington.

Pas étonnant, donc, que les Américains soient largement favoris pour reprendre la prestigieuse Coupe, d’autant plus que la compétition est disputée chez eux, sur le superbe parcours du club Whistling Straits au Wisconsin, et qu’ils pourront miser sur l’appui d’une foule largement acquise à leur cause.

Mais cette équipe de rêve a un talon d’Achille : son inexpérience. Un seul joueur, Johnson, a plus de 32 ans. Seulement trois joueurs – Johnson (4), Spieth (3) et Koepka (2) – ont plus d’une participation en Coupe Ryder et pas moins de six font leurs débuts dans la compétition.

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Brooks Koepka, lors de la ronde d’entraînement jeudi

En face, les Européens misent à fond sur l’expérience avec quatre joueurs de plus de 40 ans et deux des joueurs les plus titrés de la compétition, Lee Westwood (11participation, 20 matchs remportés) et Sergio Garcia (10participation, 22 victoires et 25,5 points accumulés).

Les Européens ont remporté sept des neuf dernières présentations de la compétition, avec notamment une spectaculaire raclée (17 ½ à 10 ½) infligée aux Américains lors de l’édition de 2018 au Golf National près de Paris. Les hôtes se sont d’ailleurs facilement imposés lors des trois dernières compétitions et les Américains espèrent profiter à fond de l’avantage du terrain cette année pour reprendre la Coupe.

Une foule bruyante !

Malgré la pandémie, près de 40 000 spectateurs pourront assister à la compétition chaque jour.

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Malgré la pandémie, près de 40 000 spectateurs pourront assister à la compétition chaque jour.

« C’est un immense avantage de jouer devant ses partisans et c’est d’ailleurs ce qui rend cette compétition si spéciale », a rappelé l’Américain Justin Thomas.

Je crois que la présence de la foule est la meilleure justification du report de la compétition d’un an, car la Coupe Ryder n’aurait pas été la même sans les partisans.

Justin Thomas, de l’équipe américaine

Son compatriote Bryson DeChambeau, un joueur qui a parfois des rapports difficiles avec les spectateurs, a quand même estimé : « Ce sera amusant de voir comment nous pourrons mobiliser la foule de la bonne façon afin qu’elle nous soutienne et qu’elle nous aide à atteindre notre objectif : gagner la Coupe. »

Du côté des Européens, le vétéran Ian Poulter a l’habitude des foules hostiles. En 2012, à Medinah en Illinois, il a remporté ses quatre matchs pour mener son équipe à une victoire de 14 ½ à 13 ½, la dernière d’une des deux équipes chez sa rivale.

« Même s’il y a 1000, 2000, 3000 ou 4000 partisans européens, les Américains seront bien plus nombreux », a expliqué le joueur de 44 ans.

Nous pouvons quand même nous servir de l’énergie de la foule, de ses cris bruyants, de ses encouragements, afin de nous motiver et de nous fouetter aux moments opportuns. Nous pouvons ainsi influencer le rythme, semer le doute dans l’esprit de nos rivaux.

Ian Poulter, de l’équipe européenne

Le capitaine Padraig Harrington a ajouté : « On parle beaucoup de l’avantage numérique des Américains avec plus de 80 ou 90 % des spectateurs en leur faveur, mais j’ai toujours pensé que nos joueurs préféraient jouer devant 40 000 spectateurs américains que devant des gradins vides !

« Et on a pu réaliser depuis qu’on est ici que l’appui de la foule vient aussi avec des attentes très élevées, une pression très forte de gagner tous les matchs. Pour moi, il ne fait aucun doute que la pression est sur les Américains. Ils sont chez eux, ils sont les favoris et bien peu d’experts nous accordent de grandes chances de l’emporter. »

Et l’esprit d’équipe ?

Avec la pression, les Américains vont aussi devoir composer avec une difficulté supplémentaire : créer un esprit d’équipe. Leurs joueurs vedettes sont de féroces compétiteurs qui sont habitués à se battre entre eux. La rivalité entre Brooks Koepka et Bryson DeChambeau est même devenue un feuilleton un peu ridicule.

Les deux joueurs se sont brièvement adressé la parole cette semaine à l’entraînement, mais ils n’entendent pas jouer ensemble et ont même dit qu’ils ne féliciteraient pas leur rival si ce dernier brillait ce week-end.

D’autres joueurs, Spieth et Thomas notamment, sont davantage inspirés par la possibilité de représenter leur pays et ils devront être les meneurs de leur équipe, mais de toute façon, Stricker et ses adjoints auront beaucoup à faire pour motiver leurs troupes.

En face, Harrington sait qu’il peut miser sur un groupe soudé.

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Tyrrell Hatton, Rory McIlroy et Jon Rahm, jeudi, à l’entraînement

Cette semaine, Lee Westwood a rappelé : « On a de bien meilleures chances d’aller dans l’espace ou de gravir le mont Everest que de représenter l’Europe en Coupe Ryder. C’est un immense privilège et tous ceux qui ont la chance de le faire considèrent ce privilège comme l’un des faits saillants de leur carrière. »

L’Autrichien Bernd Wiesberger, dernier joueur européen qualifié pour la compétition, est devenu le 164joueur européen de l’histoire de la Coupe Ryder et tous les joueurs de la formation connaissent leur « numéro », leur place dans ce qui est une véritable tradition. Harrington a souligné cette semaine qu’il n’y avait pas de place pour les ego dans le vestiaire de l’équipe européenne. Pas sûr que ce soit le cas en face…

Les Américains sont favoris, certes, mais ils devront gagner sur le terrain. Et le parcours de Whistling Straits, qui n’est pas sans rappeler certains parcours écossais, n’est pas nécessairement le plus approprié pour les laisser s’exprimer librement.

Les forces en présence

ÉTATS-UNIS

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Dustin Johnson 37 ans

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Dustin Johnson

  • 2e mondial
  • 5e participation (7 victoires, 9 défaites)
  • Collin Morikawa 24 ans
  • 3emondial
  • 1reparticipation

Patrick Cantlay 29 ans

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Collin Morikawa

  • 4e mondial
  • 1re participation
  • Xander Schauffele 27 ans
  • 5e mondial
  • 1re participation

Justin Thomas 28 ans

PHOTO KYLE TERADA, USA TODAY SPORTS

Patrick Cantlay

  • 6e mondial
  • 2e participation (4 victoires, 1 match nul)

Bryson DeChambeau 28 ans

PHOTO KYLE TERADA, USA TODAY SPORTS

Xander Schauffele

  • 7e mondial
  • 2e participation (0 victoire, 3 défaites)

Tony Finau 32 ans

9e mondial

2e participation (2 victoires, 1 défaite)

Brooks Koepka 32 ans

10e mondial

3e participation (4 victoires, 3 défaites, 1 match nul)

Harris English 32 ans

11e mondial

1re participation

Jordan Spieth 28 ans

13e mondial

4e participation (7 victoires, 5 défaites, 2 matchs nuls)

Daniel Berger 28 ans

16e mondial

1re participation

Scottie Scheffler 25 ans

21e mondial

1re participation

EUROPE

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Jon Rahm 26 ans

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Jon Rahm

  • 1er mondial / Espagnol
  • 2e participation (1 victoire, 2 défaites)

Viktor Hovland 24 ans

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Viktor Hovland

  • 14e mondial / Norvégien
  • 1re participation

Rory McIlroy 32 ans

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Rory McIlroy

  • 15e mondial / Irlandais du Nord
  • 6e participation (11 victoires, 9 défaites, 4 matchs nuls)

Tyrrell Hatton 29 ans

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Tyrrell Hatton

  • 19e mondial / Anglais
  • 2e participation (1 victoire, 2 défaites)

Paul Casey 44 ans

PHOTO MIKE SEGAR, REUTERS

Paul Casey

  • 24e mondial / Anglais
  • 5e participation (4 victoires, 3 défaites, 5 matchs nuls)

Matthew Fitzpatrick 27 ans

  • 27e mondial / Anglais
  • 2e participation (0 victoire, 2 défaites)

Tommy Fleetwood 30 ans

  • 37e mondial / Anglais
  • 2e participation (4 victoires, 1 défaite)

Lee Westwood 48 ans

  • 35e mondial / Anglais
  • 11e participation (20 victoires, 18 défaites, 6 matchs nuls)

Shane Lowry 34 ans

  • 41e mondial / Irlandais
  • 1re participation

Sergio Garcia 41 ans

  • 43e mondial / Espagnol
  • 10e participation (22 victoires, 12 défaites, 7 matchs nuls)

Ian Poulter 44 ans

  • 50e mondial / Anglais
  • 7e participation (14 victoires, 6 défaites, 2 matchs nuls)

Bernd Wiesberger 35 ans

  • 63e mondial / Autrichien
  • 1re participation

La Coupe Ryder en bref

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Depuis le tournant des années 2020, les Européens ont remporté sept des neuf dernières présentations de la Coupe Ryder.

Une histoire mouvementée

Créée en 1929, la Coupe Ryder est une compétition de golf disputée tous les deux ans entre des équipes américaine et européenne, alternativement aux États-Unis et en Europe. D’abord dominée par les Américains – 22 victoires lors des 25 premières présentations –, la Coupe Ryder est devenue une affaire européenne depuis les années 2000 et les Américains n’ont remporté que deux des neuf dernières compétitions, même s’ils ont régulièrement aligné la meilleure formation sur papier. Tous les joueurs ne sont toutefois pas à l’aise avec le format en duo utilisé pour la majorité des matchs et plusieurs ont de la difficulté à composer avec la pression très forte associée au fait de représenter son pays ou son continent. Certaines présentations de la Coupe Ryder ont d’ailleurs pris des tournures très « guerrières » et il faut à la fois un gros caractère et un bon esprit d’équipe pour y faire bonne figure. Pas étonnant que des joueurs comme Arnold Palmer, Jack Nicklaus, Seve Ballesteros et Sergio Garcia y aient compilé d’excellentes fiches, alors que Tiger Woods et Phil Mickelson n’y ont jamais vraiment brillé.

Un an plus tard, mais avec les spectateurs

Cette année, la 43présentation a lieu au club Whistling Straits, sur les rives du lac Michigan, au Wisconsin. À compter de vendredi et jusqu’à dimanche, 24 des meilleurs joueurs du monde vont disputer 28 matchs à haute tension pour le plus grand plaisir des amateurs. Prévue en septembre 2020, la compétition a été remise d’un an en raison de la pandémie et on a craint qu’elle doive se dérouler à huis clos, ce qui l’aurait privée d’un de ses traits les plus caractéristiques, la foule, qui joue habituellement un rôle déterminant en soutenant l’équipe hôte, pas toujours de façon très sportive… En définitive, les gradins seront pleins et ce sont près de 40 000 spectateurs qui seront admis sur le parcours chaque jour, la grande majorité d’entre eux appuyant les Américains.

Des critères différents

Chacune des deux équipes a été formée selon un système de points, mais aussi à la discrétion des capitaines, l’Américain Steve Stricker, l’Européen Padraig Harrington et leurs adjoints. Les six meilleurs Américains de ce classement – Collin Morikawa, Dustin Johnson, Bryson DeChambeau, Brooks Koepka, Justin Thomas, Patrick Cantlay – étaient donc assurés d’une place et Stricker a récemment sélectionné Tony Finau, Xander Schauffele, Jordan Spieth, Harris English, Daniel Berger et Scottie Scheffler. Du côté des Européens, des places ont été accordées aux neuf premiers du classement – Jon Rahm, Tommy Fleetwood, Tyrrell Hatton, Bernd Wiesberger, Rory McIlroy, Viktor Hovland, Paul Casey, Matthew Fitzpatrick et Lee Westwood, alors qu’Harrington a désigné Shane Lowry, Sergio Garcia et Ian Poulter pour compléter son équipe.

Un format compliqué, mais passionnant

Il y a un total de 28 matchs, chacun valant un point. Tous les matchs sont disputés en « match-play », c’est-à-dire que le pointage s’établit trou par trou. La partie prend fin quand un joueur ou un duo prend une avance insurmontable ou qu’il remporte le dernier trou. Il n’y a pas de prolongation, chaque joueur ou duo obtenant un demi-point en cas d’égalité après le 18trou. Les deux premières journées sont réservées aux matchs en duo avec quatre matchs le matin et quatre l’après-midi. Les capitaines désignent leurs duos et ne sont pas obligés de faire jouer tous leurs joueurs. Quatre matchs sont disputés selon la formule du jeu alternatif (foursomes), les joueurs frappant la même balle à tour de rôle et alternant pour le coup de départ. Quatre matchs sont aussi disputés avec la formule « quatre balles, meilleure balle » (fourball), où chaque joueur joue sa propre balle et le meilleur pointage remporte le point pour son équipe. La dernière journée (dimanche) est réservée aux simples, qui opposent un joueur de chaque équipe. Tous les joueurs sont alors en action, même s’ils n’ont joué aucun match jusque-là. Une équipe doit obtenir 14 1/2 points pour remporter la Coupe. En cas d’égalité 14-14, c’est le tenant du titre, l’Europe cette année, qui conserve le précieux trophée !