«Après six années de pur bonheur, plusieurs blessures, et deux Coupes Grey, il est temps pour moi de passer à autre chose. Ce n'est jamais facile de mettre de côté une passion qui nous a nourri pendant aussi longtemps de côté, mais comme on dit, chaque bonne chose a une fin», a ainsi résumé Matthieu Proulx, confirmant qu'il prenait sa retraite du football, mercredi.

Les Alouettes ont perdu un bon joueur doublé d'un excellent leader, et les journalistes affectés à la couverture du club ont perdu une très bonne citation - pour emprunter l'expression anglaise.

Ce qu'on ne savait pas, c'est que le monde du droit a quant à lui perdu un jeune avocat prometteur. Proulx a causé une certaine surprise en annonçant qu'il allait se concentrer pleinement sur sa carrière dans les médias plutôt que sur celle en droit, lui qui occupe déjà un poste de chroniqueur à l'émission Le Show du matin sur le réseau V.

«J'ai non seulement décidé de mettre un terme à ma carrière au football, mais j'ai également choisi de mettre ma carrière d'avocat sur la glace. J'ai décidé de poursuivre une carrière dans le monde des communications et des médias, un domaine dans lequel je pense pouvoir m'épanouir, et pour lequel je suis définitivement passionné», a déclaré le Québécois de 29 ans, qui a reçu plusieurs propositions intéressantes, autant du côté des médias que celui du droit.

«Je me voyais plus faire ça. Et si je voulais travailler dans les médias, c'était maintenant, pas dans cinq ans, car mon nom est encore chaud. Ma carrière en droit sera toujours là. Mais je dis bien que je la mets sur la glace, car je vais peut-être la continuer un jour.»

Pour avoir côtoyé Proulx au cours des quatre dernières années, sa décision est pleine de sens. Il a toujours été d'un grand naturel devant la caméra, et n'a jamais craint d'émettre ses opinions (voir sa sortie contre la LCF et son organisation déficiente lors du dernier match de la Coupe Grey pour s'en convaincre...). En bout de ligne, Proulx voulait surtout goûter à autre chose et acquérir une certaine liberté.

«Ça fait 10 ans que je fais du droit et du foot, et seulement ça. Ça demandait beaucoup de travail et de discipline, et c'était un cadre très strict. Alors là, je sens que je peux sortir des sentiers battus, apprendre de nouvelles choses, sans pression ni d'obligations.»

Ne pas imiter Brett Favre

La décision de mettre sa carrière d'avocat en veilleuse a été prise il y a environ un mois, mais Proulx savait depuis longtemps que ses jours en tant qu'athlète professionnel tiraient à leur fin. Essentiellement, son choix était fait depuis la finale de l'Est, en novembre.

«Je savais que si je subissais une autre blessure sérieuse, ce serait probablement la fin. Donc, lorsque j'ai quitté le terrain, je réalisais que c'était probablement pour la dernière fois», a-t-il raconté. «J'ai pris mon temps, car je ne voulais pas faire un Brett Favre de moi-même en annonçant ma retraite, puis en changeant d'idée. Je voulais laisser les émotions passer.»

«Le temps d'arrêter»

Proulx a envisagé quelques fois la possibilité d'effectuer un retour au jeu au cours des derniers mois, mais l'état de son genou l'en a dissuadé. «Il y a eu certains jours où j'ai hésité, mais lorsque je tombais en pleine face parce que mon genou cédait, je réalisais que c'était le temps d'arrêter. C'est triste, parce que ce sont les blessures qui ont eu raison de moi, il ne faut pas le cacher - même si j'aimerais vous donner une autre raison.»

Blessé à plusieurs reprises au cours de sa carrière de six saisons avec les Alouettes, Proulx a tout de même trouvé le moyen d'en rire, mercredi. «En toute logique, je voudrais remercier l'équipe médicale des Alouettes et celle de l'Hôpital Général de Montréal, qui m'ont prodigué des soins de premier plan tout au long de ma carrière. La chambre B-511 de la clinique d'orthopédie est devenue mon chalet!»

La famille, les coéquipiers et Laval

Sur un ton plus sérieux et chargé d'émotion, Proulx a remercié sa famille et son épouse Évelyne, refoulant des larmes à plusieurs reprises. «Pour ceux qui ne le savaient pas, je suis un grand émotif et je pleure beaucoup», avait-il d'ailleurs pris soin de préciser, un peu plus tôt.

Proulx a aussi remercié les partisans, les médias, ses amis, ainsi que ses coéquipiers, notamment l'ancien demi offensif Éric Lapointe, qui a facilité son passage dans les rangs professionnels, et Étienne Boulay, qui aura été à la fois son plus grand compétiteur et son meilleur ami chez les Alouettes.

«Alors que tout le monde semblait vouloir nous séparer et nous mettre en compétition, on a appris beaucoup et on s'est unis plus que jamais. Grâce à toi, je suis devenu un meilleur joueur, il n'y a pas de doute, mais surtout une meilleure personne», a exprimé Proulx au sujet de Boulay, qui lui a également rendu un bel hommage.

«Tu étais le rassembleur, le leader de notre défense et le coeur de notre équipe. Je suis très fier de toi et d'avoir pu jouer à tes côtés», a dit Boulay.

Avant de remporter deux championnats avec les Oiseaux, Proulx en avait gagné deux dans l'uniforme du Rouge et Or. Il a souligné l'impact que son passage à l'Université Laval avait eu sur lui. «Mon expérience à Laval a définitivement été la plus déterminante, non seulement de ma carrière, mais de ma vie.»

De l'autre côté

Les Alouettes avaient préparé un montage des meilleurs jeux de la carrière de Proulx et c'est en le visionnant qu'on a pris conscience de la qualité du joueur qu'ils venaient de perdre. Un dur coup pour l'équipe, mais selon Proulx, pas assez pour l'empêcher de poursuivre sur sa lancée.

«On entend souvent des athlètes qui expriment le souhait de prendre leur retraite au sommet, et j'ai la chance de pouvoir le faire. C'est juste plate parce qu'ils (les Alouettes) vont remporter un troisième championnat de suite et que je ne serai pas là pour le vivre.»

Il y sera, mais de l'autre côté, dorénavant. Bienvenue dans le club!