Paddock du circuit du Mont Fuji, 17h. La nuit tombe déjà sur le Japon, tandis que les nuages bas amplifient la morosité ambiante.

Paddock du circuit du Mont Fuji, 17h. La nuit tombe déjà sur le Japon, tandis que les nuages bas amplifient la morosité ambiante.

Car sous la tente de l'écurie McLaren, même si les deux monoplaces se sont qualifiées en première ligne, l'humeur n'est pas à la franche rigolade au moment de débuter la conférence de presse traditionnelle du samedi.

Au sein de l'équipe anglaise, la tension est palpable depuis le début du week-end. Fernando Alonso se retrouve totalement isolé dans une écurie qui ne lui pardonnera jamais d'avoir été à l'origine des sanctions décidées à son encontre par la Fédération internationale de l'automobile (la FIA) le 13 septembre dernier - la perte des points au classement des constructeurs ainsi qu'une amende de 100 millions de dollars.

L'Espagnol ne supporte plus son uniforme argenté, mais il lui est lié jusqu'à la fin de la saison 2008. Ce qui n'est pas son seul problème: depuis le Grand Prix de Belgique, la guerre est déclarée avec son coéquipier Lewis Hamilton, qui lui reproche de l'avoir "tassé" au premier virage de Spa, mais aussi d'avoir trahi son écurie.

Cerise sur le gâteau: Ron Dennis, son patron, n'adresse plus la parole au double champion du monde depuis plus d'un mois, ce qui n'empêche pas le Britannique d'essayer de calmer le jeu: "Nous avons deux pilotes qui visent le championnat. Il y a des tensions entre eux, et alors? Qu'est-ce que vous attendiez?"

Le Britannique ne veut plus entendre parler de la situation: "Désormais, on ne parle plus de cela, et on se concentre sur la fin de la saison, martèle-t-il. Nous avons encore des Grands Prix à gagner. S'il faut changer nos contrats 2008, on verra après le Brésil!"

Une petite phrase qui laisse entendre que Fernando Alonso pourrait être libéré de ses obligations et choisir une autre écurie pour l'an prochain. En attendant, il lui reste un titre à remporter, et il fait semblant d'y croire, répétant à l'envi sa certitude que son équipe lui fournira la meilleure voiture possible jusqu'au bout.

C'est là le noeud de ses problèmes. Car la simple logique dicte l'inverse: entre Lewis Hamilton, Britannique dévoué depuis 10 ans à McLaren qui serre chacun de ses mécanos dans ses bras, et Fernando Alonso, Espagnol traître qui ne cherche qu'à s'en aller, il est inutile de demander de quel côté balance le coeur de l'équipe.

Si elle veut favoriser son poulain au détriment du double champion du monde, elle va devoir agir discrètement, la FIA l'ayant dans le collimateur et veillant plus que jamais à l'équité sportive de cette fin de saison. "Pour une écurie, il est très facile de "ralentir" une voiture sans laisser de trace", reconnaît pourtant Denis Chevrier, directeur de l'exploitation chez Renault. "Un petit tour de vis dans les suspensions, ou un peu moins de chevaux, et le tour est joué sans que rien ne puisse être prouvé."

Hier déjà, après les qualifications, Fernando Alonso a confié à ses proches que sa MP4-22 s'est montrée sous-vireuse dans la deuxième séquence de qualification, avant de devenir aussi curieusement que brutalement survireuse dans la troisième. Résultat: la position de tête lui a échappé au profit de Lewis Hamilton...

Fernando Alonso aura bien du mal à remporter le championnat avec un ennemi de plus que ses rivaux. Et il est de taille: c'est sa propre équipe.