La peur du nucléaire après Fukushima et la guerre civile en Syrie étaient en filigrane jeudi à Buenos Aires, à deux jours du vote du CIO sur la ville hôte des Jeux olympiques de 2020, semblant doper la candidature de Madrid face à Tokyo et Istanbul.

Selon Wolfgang Maennig, champion olympique d'aviron pour l'Allemagne en 1988 à Séoul et désormais spécialiste de l'économie du sport à l'université de Hambourg, cité par le site du Huffington Post mercredi soir, le conflit syrien pourrait détourner certains membres du Comité international olympique (CIO) de la candidature stambouliote, longtemps considérée comme favorite.

«À mon grand étonnement, il semblerait que ce soit Madrid qui sorte gagnant», a-t-il déclaré: «J'ai parlé avec le président d'un Comité olympique national et les gens sont effrayés face à ce qui se passe en Turquie, et même en Irak (...) Et il y a aussi beaucoup d'inquiétudes autour du niveau de radiation au Japon», après la catastrophe de Fukushima en 2011.

Selon Wolfgang Maennig, la candidature d'Istanbul aurait également «perdu de sa crédibilité avec les manifestations» de juin, parties d'un projet immobilier, au coeur de la ville, et la façon dont elles ont été réprimées par les autorités.

Fukushima plutôt que Kirobo

Dès mercredi, dans la capitale argentine, Istanbul a clairement tenté de tourner cette page. «Je suis un joueur de basket, je jouerai jusque dans les trois ultimes secondes», a fait valoir le chef de file d'Istanbul-2020, Hasan Arat.

La candidature de Tokyo tentait, elle, de faire oublier Fukushima.

Mais le comité de candidature japonais, qui avait organisé une conférence de presse avec l'idée de vanter les capacités innovantes de l'archipel, incarnées par son petit robot astronaute Kirobo, a rapidement dû revenir sur cette question du nucléaire, préoccupation première des Japonais à l'heure actuelle.

Le président de la candidature de Tokyo, Tsunekazu Takeda, s'est ainsi employé à répéter que la capitale japonaise n'était en rien affectée par les dernières fuites d'eau radioactives provenant de la centrale, après avoir pris la peine d'écrire longuement à ses pairs: «J'ai envoyé une lettre aux membres du CIO à propos de Fukushima la semaine dernière pour leur dire que Tokyo est très sûre», a-t-il expliqué.

Au petit jeu du lobbying dans le grand hall du Hilton, le cinq étoiles qui accueille la session du CIO jusqu'à mardi, Madrid semblait en tout cas avoir pris un peu d'avance mercredi soir sur ses deux concurrents, comme elle l'a fait dans les pronostics.

Son meilleur ambassadeur, le prince Felipe, est déjà en mode «opération séduction» depuis lundi et Pau Gasol, sa star du basketball, à peine débarqué de l'avion mercredi, s'est attaché à faire passer le message que le dossier madrilène était «très fort».

Messi avec Madrid

Les Espagnols peuvent même se targuer d'avoir obtenu le soutien de la vedette du soccer argentin Lionel Messi, même si le quadruple Ballon d'or apparaît à Buenos Aires en grand format, placardé sur des affiches pour vanter... la compagnie aérienne Turkish airlines, un de ses sponsors.

Mais le ciel n'est pas intégralement bleu dans le ciel de la candidature madrilène, avec la publication par le quotidien espagnol El Mundo de noms, voire de photos, de quelque 50 membres du CIO susceptibles de voter pour Madrid samedi. Un chiffre de 50, assez improbable, mais qui donnerait la victoire à la capitale espagnole dès le premier tour.

En 2005, avant le vote du CIO sur la ville hôte des JO 2012, le quotidien français Le Parisien-Aujourd'hui en France avait de même publié des chiffres semblant donner la victoire à la candidature de Paris. Mais quelques heures plus tard c'est pourtant Londres qui était sortie du chapeau.

Jacques Rogge, président du CIO jusqu'à mardi soir et l'élection de son successeur, a écarté ces rumeurs d'un revers de la main. «Il ne faut pas prêter attention ou accorder le moindre crédit à ce type d'informations», a déclaré le patron du CIO, lors de sa conférence de presse mercredi soir à Buenos Aires.

«Seules les personnes qui appuieront sur le bouton samedi (les membres du CIO lors du vote électronique pour la ville, ndlr) savent comment elles vont voter», a-t-il insisté.