Raphaëlle Lacasse a été témoin d’un moment historique. Le genre de soirée qui pourrait durer une éternité : 92 003 spectateurs ont assisté au match de volleyball des joueuses de l’Université du Nebraska, mercredi soir. Un record d’assistance pour un évènement féminin. La Montréalaise n’en revient toujours pas.

Lacasse évolue au sein de l’équipe de tennis de l’Université du Nebraska. Après une première année à l’Université du Kansas, elle a déménagé à trois heures de route vers le nord, au Nebraska. Principalement parce que les installations sportives y sont remarquables et que le programme d’économie et finance est « vraiment bon ».

Elle et ses coéquipières sont arrivées cinq minutes avant le début de la rencontre entre son université et celle d’Omaha, une équipe rivale du même État, au Memorial Stadium de Lincoln, au Nebraska.

Sur le plancher, là où tous les athlètes de l’université s’étaient donné rendez-vous, la scène était à couper le souffle.

Près de 100 000 personnes entassées dans un stade de football, pour un match de volleyball. Des jets volant dans le ciel, des feux d’artifice jaillissant des extrémités du stade et l’entrée des joueuses sur la chanson Sirius de l’Alan Parsons Project.

« C’était quelque chose », raconte l’athlète, une heure avant de retourner en classe.

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Ouvert depuis bientôt 100 ans, le Memorial Stadium à Lincoln est d’abord un stade de football.

Mercredi, tous les cours et tous les entraînements avaient été annulés à l’Université du Nebraska. Autrement dit, l’école était fermée. Simplement pour s’assurer de la présence de tout le monde au match le plus important de l’année.

« Ça fait plusieurs jours qu’on n’arrête pas d’en parler. On n’attendait que ça », explique la Montréalaise.

Selon les dires de l’athlète de deuxième année, ce match est annoncé depuis mai. Et quelques heures seulement après la mise en vente des billets, tout était vendu. Comme pour un spectacle de Taylor Swift.

Cette semaine, c’était le volleyball day. Ça fait une semaine qu’on en parle, les profs se sont assurés qu’on soit au match. La ville s’était arrêtée pour le match.

Raphaëlle Lacasse

Sur place, la réponse de la communauté a été exceptionnelle. Elle a excédé toutes les attentes. « On avait des frissons quand on est rentrés. C’était plein. C’était plein, plein, plein. On ne s’attendait pas à ce qu’il y ait autant de monde. C’était fou. C’était extraordinaire. On était bouche bée », souligne Lacasse.

Les Huskers ont remporté cette joute historique trois manches à zéro.

Une équipe, une ville

Lincoln est la capitale du Nebraska. C’est surtout une ville universitaire. Où résidants et étudiants se côtoient. « Le seul attrait de la ville, c’est l’université, révèle la Québécoise en riant. Tout ce qui est du sport, c’est vraiment intense. Quand on marche avec nos vêtements de l’équipe, les gens s’arrêtent pour nous parler et nous poser des questions. »

Cet intérêt pour les porte-couleurs des Huskers s’explique notamment par le fait qu’il n’y a pas d’équipe professionnelle au Nebraska, croit Lacasse. « Tout le monde pense que le Nebraska, c’est un coin perdu, mais pas à Lincoln ! »

Là-bas, l’université est un temple. Et les athlètes y sont vénérés.

Les reines du campus

Les Huskers détiennent cinq titres nationaux et sont encore cette année parmi les meilleures équipes au pays.

Comme dans les films, les athlètes de l’université jouissent d’un certain statut. Par exemple, une cafétéria leur est réservée. « Donc tout le monde se connaît », précise l’étudiante en finance.

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La libero des Cornhuskers Lexi Rodriguez exécute le ver devant ses coéquipières après le match historique.

Malgré tout, il existe une certaine hiérarchie à l’intérieur même du centre sportif. Dans plusieurs universités américaines, les joueurs de football sont au sommet de cette échelle de la popularité. Mais pas nécessairement au Nebraska, où les joueuses de volleyball sont adulées.

Sur Instagram, beaucoup de joueuses ont des dizaines de milliers d’abonnés. Elles font beaucoup d’argent ici avec les commanditaires, et à leurs matchs, les gradins sont toujours pleins. Elles reçoivent beaucoup d’attention ici.

Raphaëlle Lacasse, à propos des joueuses de volleyball

Au point que le volleyball est aussi important que le football ?

« En tout cas, [mercredi], oui, répond-elle. On dirait que c’était encore plus gros. Ça reste que c’est une école de football, mais le volleyball est proche, si ce n’est égal. »

Au centre de cette mer de monde, Lacasse a été happée par la vague d’amour déferlant sur ce stade rempli pour voir à l’œuvre des athlètes féminines. En tant que jeune femme tentant de faire sa place dans ce monde cruellement masculin, elle a été galvanisée par un tel engouement.

« Ça nous a fait chaud au cœur. C’est fou comme les temps changent. Voir autant de monde pour une équipe féminine… Je ne sais même pas comment l’expliquer. C’était touchant de voir ça. Pour nous, c’était encourageant. Je ne sais pas comment m’exprimer, parce qu’on n’a jamais vu ça avant. Et que ce soit ici, à mon université, j’en suis vraiment fière. »