Du haut de ses 73 ans et de ses 5 pieds, Louise Atkinson Clark est un peu comme une légende à l’Ironman de Mont-Tremblant.

Mondiaux de triathlon, marathons, demi-Ironman… Mme Atkinson Clark ne compte plus les compétitions auxquelles elle a pris part. De Toronto à New York, de Tokyo à Londres, en passant par Porto Rico et Chicago : la native de Québec se promène un peu partout dans le monde depuis 13 ans pour assouvir sa passion, sans jamais manquer le rendez-vous annuel de Tremblant, qui se déroule ce week-end.

« Je ne fais pas ça pour ça, mais ç’a l’air que j’en inspire une maudite gang ! » s’exclame la charmante dame dans un éclat de rire communicatif, vendredi, attablée avec La Presse sur une terrasse.

Mme Atkinson Clark a accepté d’emblée de nous rencontrer, à l’avant-veille de son énième demi-Ironman. « J’espère que je serai à la hauteur de ce que vous recherchez… » nous écrivait-elle par courriel. Il suffisait de la voir arriver avec son large sourire après une heure d’attente à l’enregistrement pour comprendre que la conversation serait intéressante.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Louise Atkinson Clark

À 73 ans, donc, Louise Atkinson Clark consacre sa vie et son argent à sa passion : l’entraînement. « Les compétitions, c’est comme un entraînement, mais ils te nourrissent et te disent où aller », résume-t-elle.

Cette affirmation ne serait assurément pas sortie de sa bouche en 1980, année où elle a accouché de son troisième fils… et où elle a décidé de se lancer dans la course.

« J’ai haï courir pendant deux ans, laisse-t-elle tomber en toute franchise. Je courais 20 minutes et j’arrêtais. […] Il fallait que je bouge, c’était mon troisième enfant ! »

De fil en aiguille, elle a couru 3 km, puis 5 et, enfin, 10. Ce n’est qu’en 2003, 23 ans après avoir commencé, alors que ses fils s’entraînaient pour le marathon de Montréal, qu’elle a eu une « bulle ». « Je pourrais faire le demi-marathon », a-t-elle pensé.

Elle l’a fait. Et ce fut là le début de quelque chose de bien plus grand…

Quand la passion devient vitale

Au printemps 2006, Louise Atkinson Clark nageait dans une piscine intérieure de Saint-Eustache quand elle fait la rencontre d’une dame. « Elle me dit : “Fais-tu des triathlons ?” J’ai dit : “Es-tu folle ? C’est une gang de capotés !” Je faisais les trois sports, mais je me disais : c’est impossible que je mette les trois sports un en arrière de l’autre. »

C’est le mari de ladite dame qui lui a parlé de la distance sprint. Convaincue, Mme Atkinson Clark s’est inscrite à son premier triathlon. Ainsi est né son amour pour le sport. Amour qui a grandi, puis grandi, jusqu’à ce qu’elle participe à ses premiers mondiaux, à Budapest en 2010. Elle avait 60 ans.

Depuis sa retraite comme infirmière, en 2011, Mme Atkinson Clark s’entraîne à temps plein.

C’est ma passion et je vis seule ! Je m’entraîne six jours par semaine. […] Je nage trois fois, je cours quatre fois et je roule trois fois.

Louise Atkinson Clark

En 2011, elle s’est adjoint les services d’un entraîneur professionnel : Philippe Bertrand, de LifeSport. Qualifiée pour les mondiaux de triathlon en Chine, elle a préféré prendre part aux Championnats canadiens, à Kelowna, où elle a gagné. Puis elle a terminé première des 69 femmes de sa catégorie d’âge au demi-marathon de Toronto. « Je l’ai fait en 1 h 50 min ! », s’exclame-t-elle avec fierté.

L’année suivante, en 2012, elle prenait part à son premier demi-Ironman, à Tremblant, qu’elle a réussi avec « un excellent temps ». C’était toutefois, ignorait-elle alors, sa dernière compétition avant quelque temps…

« Je suis censée être morte »

Trois semaines plus tard, Mme Atkinson Clark faisait des intervalles de vélo dans un petit rang de campagne, à Terrebonne, quand elle a été percutée de plein fouet par un automobiliste qui dormait au volant.

« Il m’est rentré dedans à environ 90 km/h. Je me suis réveillée à Sacré-Cœur trois jours plus tard avec 18 fractures. Un pneumothorax, dix mille affaires. J’ai été dans un corset pendant quatre mois, dans un lit d’hôpital. Ils venaient me laver. »

« Intérieurement, j’ai pensé aux trois filles qui s’étaient fait tuer l’année d’avant sur la 116, des Ironwomen, relate-t-elle. Elles s’en allaient à un camp à Sherbrooke. Après ça, j’ai pensé à une compagne de travail qui s’est fait accrocher à vélo aux États-Unis par une femme qui textait. Elle a été moins chanceuse que moi. Elle est restée légume pendant cinq ans et elle est morte. »

Selon les médecins, Mme Atkinson Clark a survécu à l’accident grâce à sa grande forme physique.

Le petit Jésus a été bon : je n’ai rien eu aux jambes ni au bassin.

Louise Atkinson Clark

Fidèle à elle-même, elle a traversé cette épreuve en restant positive. Onze mois plus tard, elle retournait à la compétition en réalisant un duathlon à Tremblant. Cet accident a changé sa vie, estime celle qui réside désormais à Tremblant.

« Je suis censée être morte ou en fauteuil roulant, donc la vie est très belle ! »

Tant qu’elle sera capable…

Dans les 10 dernières minutes de notre entretien, Louise Atkinson Clark nous énumère les compétitions auxquelles elle a pris part à travers le monde depuis 2013. Il y en a tant, qu’on s’y perd.

« C’est fou, hein ! Tout mon argent passe là-dessus ! » lance-t-elle.

Mme Atkinson Clark a eu différentes blessures au fil des années. L’année dernière, à Tremblant, elle s’est effondrée après 15 km de vélo. Elle a passé tous les tests possibles pour le cœur et le cerveau : « Tout est normal », dit-elle. Au besoin, elle consulte un ostéopathe ; elle l’a d’ailleurs rencontré quelques heures avant notre entretien en vue de son demi-Ironman de dimanche.

Combien de temps prévoit-elle continuer les compétitions ? « Tant que je serai capable ! s’exclame-t-elle. Là, je suis en train de faire les six grands marathons. J’avais toujours dit que je ne courrais jamais un marathon, mais il ne faut jamais dire jamais. »

Elle a coché New York, Berlin, Tokyo et Londres à sa liste. Chicago s’ajoutera à l’automne. Ne restera plus que Boston.

« Après Boston, je ne ferai plus de marathons », précise-t-elle, avant d’ajouter : « Je vais faire des demi-marathons. »

Bah oui, évidemment !

L’horaire du week-end

Il régnait déjà une certaine fébrilité dans l’air de Tremblant, vendredi après-midi, alors que les athlètes faisaient leur arrivée dans la ville. La fin de semaine sera lancée ce samedi matin, sur le coup de 7 h, avec le Triathlon 5150. Le parcours consiste en 1,5 km de nage, 40 km de vélo et 10 km de course à pied.

Dimanche, à compter de 6 h 50, aura lieu l’Ironman 70,3. Les athlètes parcourront 1,9 km de nage, 90 km de vélo et 21,1 km de course. Le peloton de tête masculin comprend les Canadiens Lionel Sanders et Jackson Laundry ainsi que les Américains Trevor Foley et Tim O’Donnell. Chez les femmes, seront présentes les Canadiennes Tamara Jewett et Rach McBride, ainsi que les Américaines Jodie Robertson et Mollie Hebda.