Karen Paquin roule sur les derniers milles de sa prodigieuse carrière. Elle tient donc à laisser une marque indélébile sur son sport dans ce qui pourrait être sa dernière compétition d’envergure sur la scène internationale.

À 35 ans, Paquin a vécu les plus beaux moments de l’histoire du rugby canadien. Et elle y a contribué grandement.

Enjouée et passionnée comme au premier jour, celle qui commande un immense respect dans l’équipe pour laquelle elle s’est battue corps et âme depuis près d’une décennie était impatiente à la veille d’un long voyage de deux mois. D’abord Vancouver pour s’entraîner, ensuite les îles Fidji pour jouer un match préparatoire, puis finalement la Nouvelle-Zélande pour disputer la Coupe du monde féminine du 8 octobre au 12 novembre.

« J’ai les mêmes papillons que la première fois et peut-être que j’en ai même un peu plus, parce que je sais dans quoi je m’embarque. Et avec l’expérience ne vient pas nécessairement moins de nervosité », a précisé la Québécoise juste avant son départ.

Victoires et revers

L’attaquante en sera à une troisième Coupe du monde. Les deux premières se sont soldées de manière très différente. En 2014, le Canada a remporté la médaille d’argent grâce à un parcours historique. Puis, en 2017, l’équipe a dû se contenter de la cinquième place. « Là, je me demande ce qui va arriver, à quoi ça va ressembler. »

À travers ces deux Coupes du monde, il y a aussi l’ivresse de la victoire lorsque l’équipe a gagné la médaille de bronze aux Jeux olympiques de Rio en 2016, et l’agonie de la défaite aux Jeux de Tokyo en 2021 avec une neuvième place décevante.

L’équipe compte maintenant sur plus de stabilité et de constance, et ça ne peut que faire des ravages : « Je pense qu’on peut faire quelque chose de grandiose et j’ai hâte de le vivre. »

L’équipe qui représentera le Canada dans la Mecque du rugby comptera notamment sur 11 Québécoises, mais surtout sur un heureux mélange de jeunes joueuses et de vétéranes. Il s’agit d’une des plus grandes qualités de cette brigade, selon Paquin.

On a vraiment des jeunes qui arrivent avec de la fougue, du talent et des physiques impressionnants. Les filles sont grandes, fortes, rapides et elles ont des connaissances que nous n’avions pas nécessairement à leur âge.

Karen Paquin, joueuse de rugby canadienne

Les joueuses expérimentées auront quand même leur mot à dire, puisqu’elles ont vécu tellement de choses ensemble. La native de Québec évoque « une résilience et une envie collective d’avancer ». « Je pense que c’est ça qui pourrait faire notre force lors de cette Coupe du monde. »

Laisser sa marque

Paquin, un modèle d’authenticité, s’est révélée une véritable battante tant sur le terrain qu’à l’extérieur depuis ses débuts, et c’est ainsi qu’elle a fait sa place.

PHOTO MIKE JONES

Karen Paquin

Son combat le plus important aura sans doute été de surmonter une blessure importante au ménisque d’un genou, à la Coupe du monde de 2017, qui l’a tenue à l’écart pendant un an et demi. Elle était même incertaine de pouvoir refouler le terrain un jour.

C’est pourquoi ce qui pourrait être son dernier tour de piste est si significatif.

Paquin a toujours foncé la tête baissée, mais depuis cette blessure, elle n’a plus rien à perdre. Elle aborde la Coupe du monde avec le même état d’esprit. « Toutes les fois que j’arrive sur le terrain, je me dis que c’est peut-être la dernière fois que je joue, donc je dois en profiter. Ç’a été un tournant dans ma carrière, dans mon approche, dans ma façon de voir les choses et chaque fois que je mets les pieds sur le terrain, j’ai de la gratitude et je me dis que si c’est la dernière fois, je vais avoir tout donné. »

C’est aussi cette image qu’elle a envie de laisser.

J’espère que les gens vont se souvenir de Karen comme d’une joueuse qui est intense, une joueuse qui donnait tout. […] C’est vraiment ça que je veux léguer sur la petite page d’histoire sur laquelle il y aura mon nom.

Karen Paquin

Il reste quand même du gros rugby à jouer et Paquin est déterminée à faire tout ce qui est en son pouvoir pour gagner, mais aussi pour montrer aux plus jeunes comment faire.

« J’ai envie de faire quelque chose de bien, de montrer le rugby sous son meilleur jour pour les prochaines générations. Donc il y a une espèce de pression externe que je n’avais pas avant ou à laquelle je ne pensais pas vraiment. »

Elle aura l’occasion de saisir sa chance. Celle de gagner le titre, celle de guider la relève, celle de laisser sa marque. Elle parviendra à cocher toutes ces cases seulement si elle suit ce qui la guide depuis le premier jour : être elle-même et garder le sourire.

En savoir plus
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    Le Canada occupe le troisième rang au classement mondial du rugby féminin.
    Source : World rugby