Loin d’avoir fait leur temps face aux téléphones intelligents, les montres restent chevillées à nos poignets, et certains créateurs, qu’ils soient artisans ou entrepreneurs, aiment en ajuster les codes. Voici les rouages de trois initiatives québécoises en la matière.

À partir de cuir récupéré

Au fil du temps, il s’est fabriqué de bien jolies choses au sein de l’atelier montréalais de Chikiboom. Notamment, des montres minimalistes pour femmes et hommes dont les bracelets exhibent une touche toute particulière ; une touche de cuir, plus exactement, mais pas n’importe lequel, puisqu’il s’agit de matériau récupéré et recyclé.

  • Les bracelets ne sont ni teints ni traités, mais simplement retravaillés pour s’adapter aux cadrans.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    Les bracelets ne sont ni teints ni traités, mais simplement retravaillés pour s’adapter aux cadrans.

  • Les couleurs et textures offertes dépendent donc des trouvailles de Felix Marcuzzo chez les fournisseurs locaux.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    Les couleurs et textures offertes dépendent donc des trouvailles de Felix Marcuzzo chez les fournisseurs locaux.

  • L’atelier de l’artisane, contrainte au télétravail

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    L’atelier de l’artisane, contrainte au télétravail

  • Les bracelets sont produits depuis près de 10 ans.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    Les bracelets sont produits depuis près de 10 ans.

  • Il y en a pour tous les goûts, avec de nombreux coloris proposés.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    Il y en a pour tous les goûts, avec de nombreux coloris proposés.

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Du bout de leurs doigts, Felix Marcuzzo et son employée les retravaillent, les redessinent et remettent ainsi les pendules à l’heure – celle de la récupération – en proposant une large palette de bracelets et de cadrans assortis. « On achète des retailles auprès de fournisseurs de cuir locaux. Il peut s’agir par exemple de peaux qui présentent des défauts comme des taches ou le tatouage de la vache. Ces morceaux ne sont pas utilisés, mais comme les pièces dont nous avons besoin sont de petites lanières de cuir, je peux les contourner et les récupérer, sans perte », explique Mme Marcuzzo, qui a fondé Chikiboom il y a 12 ans.

Hormis le redécoupage et la mise en forme pour obtenir les bracelets, aucun traitement supplémentaire n’y est opéré, les couleurs étant laissées telles quelles.

Le but, c’est de laisser le cuir vivre sa vie.

Felix Marcuzzo

« Je n’interviens pas et j’essaie de trouver les bonnes couleurs de peau, ce qui rend les choses parfois un peu difficiles quand on me commande de grandes quantités d’une teinte particulière. Parfois, je peux faire seulement deux ou trois montres avec une retaille », explique-t-elle.

Face à la vague végane, songe-t-elle à adapter sa matière première ? L’artisane se penche sur le sujet, avec prudence, les similicuirs végétaux n’étant pas forcément une option plus écologique. En attendant d’avoir l’heure juste à ce sujet, ses montres et bracelets sont vendus au gré des festivals et points de vente au pays. Les cadrans, au fond inoxydable et dessinés à Montréal, sont quant à eux importés pour conserver un prix de vente abordable (de 75 $ à 85 $) ; les fabricants locaux pour ce segment de marché sont de toute façon inexistants au Québec.

Consultez le site de Chikiboom

Recomposer un temps précieux

PHOTO FOURNIE PAR MARIE ROBITAILLE

La bijoutière et créatrice Marie Robitaille dans son atelier. Elle a commencé ses activités en 1994, après avoir démonté une montre de gousset.

« Les montres, je ne les répare pas, je les brise ! » Voici la réponse de Marie Robitaille quand on lui demande si elle a une formation d’horlogère. En fait, cette bijoutière démantèle les mécanismes pour mieux les remonter sous forme de pendentifs, boucles d’oreilles, broches, colliers, boucles de ceinture et cadres originaux. « Défait au Québec », s’amuse-t-elle même à indiquer sur son site web.

En puisant dans ses réserves de ressorts, couronnes, aiguilles, bracelets et engrenages, elle façonne toutes sortes de bijoux rappelant notre rapport au temps, voire à un être cher ; car il lui arrive de se lancer dans des créations à partir de la vieille montre aux rouages fatigués d’un aïeul regretté. Un art qu’elle pratique depuis 28 ans, au cœur de la ville de Québec.

  • Pendentif et boucles d’oreilles assorties

    PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE MARIE ROBITAILLE

    Pendentif et boucles d’oreilles assorties

  • Les réserves de l’artisane, qui classe tous les mécanismes démontés à sa disposition.

    PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE MARIE ROBITAILLE

    Les réserves de l’artisane, qui classe tous les mécanismes démontés à sa disposition.

  • Boucles d’oreilles uniques conçues à partir de montres

    PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE MARIE ROBITAILLE

    Boucles d’oreilles uniques conçues à partir de montres

  • Broches, colliers, boucles de ceinture : les montres reprennent de nombreuses formes.

    PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE MARIE ROBITAILLE

    Broches, colliers, boucles de ceinture : les montres reprennent de nombreuses formes.

  • Boucles d’oreilles dans un autre style, avec ressorts et engrenages

    PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE MARIE ROBITAILLE

    Boucles d’oreilles dans un autre style, avec ressorts et engrenages

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« Tout a commencé quand j’ai ouvert une montre à gousset et constaté le travail de l’artisan qu’elle cachait. Il fallait faire quelque chose avec ça », se souvient cette autodidacte. Depuis, elle collecte ses matières premières au gré de ses trouvailles, mais surtout par l’entremise de legs, ce qui lui permet d’avoir sous la main toutes sortes de pièces pour les réassembler et changer leur vocation, associées à d’autres matériaux pour arriver à ses fins.

J’en récupère le plus possible pour leur donner une seconde vie

Marie Robitaille

Ainsi, cadres, cadrans et molettes se trouvent associés à une chaînette pour donner naissance à un pendentif, ou des bracelets métalliques sont assemblés pour créer un cadre représentant la ligne d’horizon de New York.

« Je reste fascinée par le travail de l’artiste qui a créé la montre ou l’horloge, son mécanisme, mais surtout par le mouvement qui y est associé », explique-t-elle. Ses créations uniques, dont les prix s’échelonnent de 40 $ à 200 $ environ, sont offertes sur son site internet et, depuis l’automne dernier, à la boutique du Musée d’art contemporain de Baie-Saint-Paul. Et en attendant de les découvrir, l’artisane vous transmet ses vœux de « Bonnes Heures pour 2022 » !

Consultez le site de Marie Robitaille

Une idée lumineuse

PHOTO MYRIAM BARIL TESSIER, FOURNIE PAR SOLIOS

Alexandre Desabrais et Samuel Leroux, cofondateurs de Solios, ont démarré leur projet avec une collecte par Kickstarter. En 2019, ils mettaient leur première montre solaire sur le marché.

C’est un peu le tour de l’horloge : alors que les tout premiers instruments pour mesurer le temps étaient des cadrans solaires, un duo d’entrepreneurs québécois mise de nouveau sur cette source d’énergie pour mettre au point des montres élégantes et écoresponsables.

L’idée ? Alimenter une montre à quartz par la lumière naturelle ou artificielle, par l’entremise d’une pile très longue durée. De fait, le pays du Soleil levant fut pionnier dans cette technologie, et c’est donc sur ses rives qu’Alexandre Desabrais et Samuel Leroux, deux entrepreneurs diplômés de HEC et cofondateurs de Solios, ont été séduits par l’idée d’une montre traditionnelle évacuant le souci de l’entretien régulier de la pile.

  • Ces montres solaires sont capables de fonctionner durant six mois avec une seule charge de lumière.


    PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE SOLIOS

    Ces montres solaires sont capables de fonctionner durant six mois avec une seule charge de lumière.

  • De nombreux coloris et types de bracelets sont proposés.

    PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE SOLIOS

    De nombreux coloris et types de bracelets sont proposés.

  • Les montres se veulent élégantes et plutôt haut de gamme.

    PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE SOLIOS

    Les montres se veulent élégantes et plutôt haut de gamme.

  • Des modèles pour femme sont également offerts.

    PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE SOLIOS

    Des modèles pour femme sont également offerts.

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On est partis visiter ces entreprises japonaises, pour ensuite adapter le concept à une clientèle plus actuelle, avec des designs beaucoup plus minimalistes et une approche écoresponsable.

Alexandre Desabrais

Les montres mises au point par l’entreprise québécoise sont ainsi dotées d’une pile capable de fonctionner pendant six mois avec une simple charge de deux heures. Elle devrait aussi passer l’épreuve du temps, puisque sa capacité de recharge est censée se maintenir au moins à 80 % durant ses 30 premières années de vie, assurent ses concepteurs.

Outre leur mode de fonctionnement, les montres se revendiquent issues d’une démarche écoresponsable, le duo d’entrepreneurs ayant inspecté les usines de ses fournisseurs asiatiques pour s’assurer que matériaux et conditions de travail respectent les normes éthiques et environnementales. Les bracelets sont ainsi fabriqués en métal recyclé et ionisé ou en cuir végane siliconé.

À l’heure des cellulaires et des montres connectées, ces boîtiers solaires lancés en 2019 ont-ils trouvé leur public ? « Quand la montre intelligente est arrivée, ça a vraiment perturbé le marché de la montre traditionnelle, qui a ensuite repris du galon et connaît une croissance aujourd’hui. La première est vue comme un outil pour être connecté, tandis que la deuxième est une façon d’exprimer une valeur, une personnalité. On voulait projeter cette même sorte d’image pour une consommation responsable », détaille le cofondateur de Solios.

Pour cette raison, ces montres solaires offrent un visage « luxueux abordable », misant sur la qualité et la durabilité, dans une fourchette de prix située entre 325 $ et 350 $.

Consultez le site de Solios