Des centaines de mini-chantiers donneront prochainement naissance à autant de petits abris destinés aux chats errants, disséminés dans les cours, sur les balcons et dans les ruelles cet hiver. Confectionnées par de bons samaritains, ces maisonnettes permettent de garder les matous au chaud, mais aussi de s’attaquer au fléau de la surpopulation féline.

De son propre aveu, Sophie Royer préférait initialement les chiens. Mais cette résidante de Saint-Hubert, peinée de voir des minous sans foyer durant la saison froide, a décidé en 2016 de bâtir un abri en bois devant son domicile. Rapidement, l’un de ses pensionnaires eut même l’honneur d’accéder au bâtiment adjacent : Hatchi, ancien chat itinérant, a depuis été adopté par la dame.

Celle-ci a continué à confectionner des toits pour les félins frileux ; chaque année, elle fabrique et distribue bénévolement plusieurs nouveaux modèles, réclamant le coût des matériaux utilisés (bac, styromousse, paille, plexiglas, etc.), soit une trentaine de dollars. « Mon but, c’est d’inciter les gens à en fabriquer à leur tour, en leur expliquant la méthode, qu’ils trouvent ça facile », indique Mme Royer.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Sophie Royer confectionne un modèle classique, avec un bac en plastique, de la styromousse et de la paille. Ses touches personnelles : un petit auvent devant l’entrée, et une porte de sortie avec un battant en plexiglas (utile pour les chats craintifs qui se sentent piégés avec une seule ouverture).

L’installation de ces abris n’est pas qu’un élan du cœur, le but de l’opération étant également de faire patte basse sur les minous pour les stériliser, en recourant aux programmes CSRM (Capture, Stérilisation, Relâche, Maintien) offerts par certains refuges et municipalités. Chantal Séguin, résidante de l’arrondissement de Saint-Laurent, est ainsi trappeuse bénévole de concert avec la SPCA de Montréal, pour contribuer à l’endiguement de la surpopulation féline en ville. « C’est une véritable plaie au Québec, ces chats font vraiment pitié », se désole celle qui a construit et distribué cette année quelque 70 abris pour chats, en plus de ceux installés dans son quartier.

Grandes portées

Une véritable communauté de constructeurs d’abris pour chats errants s’est d’ailleurs structurée, partageant ses conseils de fabrication, ses matériaux et ses réalisations. Elle s’est notamment fédérée autour d’une page Facebook, « Chats au chaud », fondée par Alexe Dupont en 2019.

Cette dernière, après avoir visionné des vidéos de projets d’abris réalisés aux États-Unis, avait cherché à monter le sien pour son quartier. Lançant un appel pour récupérer des bacs en plastique sur les réseaux sociaux, sa demande avait rapidement fait boule de neige, des centaines de personnes ayant offert leur aide.

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK CHATS AU CHAUD

Alexe Dupont anime une communauté pour inciter les Québécois à fabriquer des abris hivernaux pour chats errants.

« Au début, je voulais juste fabriquer un abri, mais quand j’ai vu que les gens embarquaient, j’ai décidé de créer une page », explique celle qui s’y remet chaque automne en construisant une cinquantaine d’abris et motive les autres à l’imiter, avec un mode d’emploi.

Depuis, plusieurs centaines de personnes mettent aujourd’hui la main à la pâte. Là aussi, le contrôle de la population féline fait partie des discussions. « Des organismes comme Proanima donnent souvent des conseils de trappage, parce que le but est aussi de faire stériliser ces chats et non d’encourager les colonies », précise Mme Dupont.

Visitez la page Facebook « Chats au chaud »

C’est dans la boîte

Chacun a sa recette pour la fabrication d’un abri pour chat errant, mais il existe un modèle de base, avec options. Carole Lacasse, directrice du service à la clientèle chez Proanima, nous en dévoile les grandes lignes.

« On peut prendre deux bacs en plastique de type Rubbermaid, en emboîtant l’un dans un autre plus grand, et placer du styrofoam entre les deux. On peut aussi le faire en bois. Dans le fond, on peut mettre des couvertures qui sèchent rapidement ou de la paille, mais surtout pas de foin », indique-t-elle. Certains utilisent des coussins ou des lampes chauffantes ; la prudence est cependant de mise avec ces options, pour éviter tout risque d’incendie.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

L’une des cabanes réalisées par la résidante de Saint-Hubert. Il a été placé à l’abri du vent, surélevé et stabilisé avec une plaque sur le toit.

Habituellement, la taille d’un abri est prévue pour un seul chat, afin de limiter les pertes de chaleur (dans le modèle proposé par l’organisme, les bacs emboîtés font respectivement 40 litres et 68 litres). Idem pour l’ouverture, idéalement excentrée : l’animal doit pouvoir tout juste y passer la tête, soit une quinzaine de centimètres de diamètre. L’abri doit être surélevé par rapport au sol, par exemple avec des morceaux de bois, et lesté avec du poids sur le toit pour le stabiliser.

« On ne peut pas seulement mettre un abri, il faut aussi mettre une source d’eau et de nourriture. C’est un tout, insiste Mme Lacasse. On les place à côté, à l’abri des intempéries. L’eau doit être changée régulièrement, surtout si elle gèle. Les croquettes font l’affaire, mais il faut les retirer la nuit pour ne pas attirer les animaux nocturnes. »

Pour ces raisons d’entretien, elle recommande de disposer l’installation dans un endroit facilement accessible l’hiver. Cela peut être sur un balcon, dans une cour ou une ruelle, à l’abri du vent. « Souvent, les chats vont nous dire si c’est placé au bon endroit et s’ils adoptent ou non la cabane », conclut Mme Lacasse, qui conseille de vérifier si un programme CSRM est proposé localement.

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