(Ghazni) Les autorités talibanes ont procédé jeudi dans un stade de football dans l’est de l’Afghanistan, à l’exécution en public de deux hommes condamnés pour meurtre, a constaté un journaliste de l’AFP.

Les deux hommes ont été abattus de plusieurs tirs dans le dos chacun par un soldat taliban, dans un stade de la ville de Ghazni, où étaient rassemblés des milliers d’hommes venus assister aux exécutions.

« Ces deux personnes ont été condamnées pour meurtre […] après deux ans de procès par les tribunaux de ce pays, et l’ordre (d’exécution) a été signé » par le chef suprême du pays, Hibatullah Akhundzada, a déclaré à la foule un haut responsable de la Cour suprême, Atiqullah Darwish.

Présentes dans le stade, les familles des victimes ont refusé de gracier les deux meurtriers comme elles en avaient le droit dans le cadre de la charia, la loi islamique. Ces proches ont aussi renoncé à la possibilité d’exécuter eux-mêmes la sentence.

Les exécutions ont été ordonnées en vertu du principe islamique de « qisas » ou loi du talion, a confirmé la Cour suprême dans un communiqué.

Les deux condamnés s’appelaient Saïd Jamal et Gul Khan, et avaient été reconnus coupables d’avoir poignardé à mort deux hommes en 2017 et 2022, selon la Cour.

Avant d’approuver leur condamnation à mort, le chef suprême a mené une « enquête extraordinaire » sur leurs dossiers, a certifié l’instance.

Les exécutions publiques étaient courantes sous le premier régime des talibans, entre 1996 et 2001. Les condamnés étaient le plus souvent tués par balle ou lapidation, selon les crimes reprochés.

Deux exécutions ont déjà eu lieu depuis 2021, chaque fois pour meurtre. Lors de la dernière en date, en juin dans la province de Laghman (est), un homme condamné pour le meurtre de cinq personnes avait été exécuté par balle dans l’enceinte d’une mosquée, devant environ 2000 personnes.

Une première exécution publique avait eu lieu en décembre 2022 dans la province de Farah (ouest). Dans ce cas-là, le père de la victime avait lui-même abattu le meurtrier de son fils.

Conception de l’islam

Des centaines de millions de dollars avaient été dépensés sous les gouvernements pro-occidentaux entre 2001 et 2021 pour mettre en place un nouveau système judiciaire combinant droits islamique et laïque, avec des procureurs, des avocats de la défense et des juges qualifiés.

La justice était toutefois alors critiquée pour sa lenteur et la corruption qui l’entourait. Si la corruption a largement disparu sous les autorités talibanes, le système est maintenant considéré par des experts comme pouvant mener à des décisions trop hâtives.

À chaque fois exécution, les dirigeants talibans ont assuré que les affaires avaient été examinées de manière approfondie par différents tribunaux (première instance, cour d’appel et Cour suprême), avant que le chef suprême n’entérine la sentence.

Les autorités ont aussi procédé à plusieurs flagellations publiques pour d’autres crimes, comme le vol, l’adultère ou la consommation d’alcool.

En novembre 2022, Hibatullah Akhundzada, avait ordonné aux juges d’appliquer tous les aspects de la charia (loi islamique), notamment les exécutions publiques pour meurtre au nom du « qisas », mais aussi les châtiments corporels (lapidation, flagellation, amputation de membres).

Pour les musulmans du monde entier, la charia fait office de code de vie, mais les interprétations varient en fonction des coutumes, de la culture et des écoles religieuses locales.

À leur retour au pouvoir, les talibans avaient promis de se montrer plus souples dans l’application de la charia, mais ils sont largement revenus à l’interprétation ultra-rigoriste de l’islam qui avait marqué leur premier passage au pouvoir.

Leur gouvernement a été dénoncé par l’ONU pour avoir mis en place un « apartheid de genre » en multipliant les mesures liberticides à l’encontre des femmes, au nom de sa conception de l’islam.  

L’Afghanistan est ainsi le seul pays au monde où l’éducation des filles est interdite après l’école primaire. Elles ont été bannies des écoles secondaires et des universités par les autorités talibanes.

Les femmes sont aussi nombreuses à avoir perdu leur emploi dans le secteur public et elles n’ont plus le droit de se rendre dans les parcs, les gymnases ou les bains publics.