La Maison-Blanche estime n’avoir aucune doléance à exprimer face aux 89 soldats russes tués par ce qui semble être un missile HIMARS de fabrication américaine tiré par les forces ukrainiennes.

Il n’y a « aucune lamentation de la part de l’administration [américaine], a indiqué John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale rattaché au président Joe Biden. C’est la guerre. [Les Ukrainiens] ont été envahis et ils ripostent et se défendent, a-t-il dit lors d’un entretien avec la presse. Les soldats russes qui se trouvent sur leur territoire sont une cible légitime d’action militaire pour l’Ukraine, point final. »

M. Kirby a rappelé que les États-Unis fournissaient à l’Ukraine des armes « pour qu’elle se défende » et qu’ils pourraient en fournir d’autres dans l’avenir.

L’attaque a eu lieu sur un bâtiment occupé par l’armée russe dans la ville de Makïïvka à 0 h 01 la nuit du Nouvel An. D’abord établi à 63, le nombre de morts est passé à 89, selon le général russe Sergueï Sevrioukov.

« C’est assez clair que le nombre de victimes est dans les centaines, estime cependant Dominique Arel, titulaire de la Chaire d’études ukrainiennes à l’Université d’Ottawa. Plusieurs sources officieuses, et même russes, affirment qu’il y avait jusqu’à 600 personnes massées dans le bâtiment au moment des frappes. »

Dominique Arel relève aussi que cette frappe est survenue dans « un territoire contrôlé par la Russie depuis [plus de] huit ans ». « Ce n’est pas la première fois que l’Ukraine arrive à frapper des positions au-delà de la ligne du front du 24 février 2022, mais c’est symbolique, dit l’expert. Comme le fait que l’Ukraine a frappé des positions russes en Crimée perdue [en 2014]. »

Par téléphone ? Vraiment ?

Le général Sevrioukov a imputé l’attaque à la géolocalisation, par les Ukrainiens, de téléphones cellulaires utlisés (même si c’est interdit) par les soldats russes. « C’est discutable, poursuit Dominique Arel. Les Ukrainiens ont d’autres moyens pour localiser l’ennemi, soit par des informateurs sur le terrain ou des images satellites. » Selon lui, mettre en cause les téléphones cellulaires interdits revient à rejeter la faute sur les soldats, et non sur le commandement militaire russe.

Récemment mobilisés

Les victimes sont en bonne partie des militaires mobilisés (appelés mobiks) à l’automne 2022, une décision de Moscou qui n’a pas fait l’unanimité chez les jeunes Russes. Leur formation a été très sommaire. Où sont les militaires russes d’expérience ? « Ils ont été décimés par la guerre, avance M. Arel. La Russie ne reconnaît toujours pas combien de soldats sont morts [au total]. Le dernier bilan date, je crois, de huit mois, et parle de 5000 morts. Mais le nombre de morts et de blessés pourrait friser les 100 000 personnes. C’est considérable. Et les pertes sont aussi considérables du côté ukrainien. »

La France fournira des chars légers

À Paris, le président Emmanuel Macron a annoncé que la France allait fournir à l’Ukraine des chars de combat légers de modèle AMX-10 RC. L’annonce a été faite à la suite d’une conversation téléphonique entre M. Macron et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky. Le nombre de chars et le délai de livraison restent à négocier. « C’est la première fois que des chars de conception occidentale sont fournis aux forces armées ukrainiennes », a-t-on affirmé à l’Élysée. Les premiers AMX-10 RC ont été conçus dans les années 1970. Ces engins de reconnaissance dotés d’un canon se déplacent sur roues (et non sur chenilles), ce qui favorise leur mobilité.

PHOTO TIRÉE DE WIKIMEDIA COMMONS

Char de combat léger AMX-10 RC

La Pologne achète des chars américains

Le début de 2023 est aussi marqué par des initiatives militaires de pays d’Europe de l’Est qui gonflent leurs muscles face au géant russe. C’est le cas de la Pologne, dont le ministre de la Défense, Mariusz Błaszczak, a annoncé l’achat d’un deuxième lot de 116 chars de combat américains de modèle M1A1 Abrams au coût de 1,4 milliard US. « Nous renforçons la poigne de fer de l’armée polonaise afin d’augmenter son pouvoir de dissuasion face à l’agresseur », a déclaré le ministre polonais. À l’exception de l’enclave de Kaliningrad, la Pologne n’a pas de frontière commune avec la Russie. Mais l’impact de tirs russes sur l’ouest de l’Ukraine a résonné jusqu’à sa frontière. L’achat de ces 116 chars s’ajoute à celui de 250 Abrams M1A2 acquis l’an dernier au coût de 4,7 milliards US.

La République tchèque hausse ses dépenses militaires

Toujours mercredi, le gouvernement de la République tchèque a annoncé son intention de faire adopter un projet de loi haussant le budget des dépenses militaires de 1,5 à 2 % du produit intérieur brut (PIB) du pays. La ministre de la Défense, Jana Černochová, a justifié cette hausse en affirmant que la guerre en Ukraine montrait « que nous devons être prêts pour les conflits actuels et futurs et qu’une modernisation rapide de l’armée est absolument nécessaire ». Cette augmentation à 2 % du PIB répond aussi au désir répété de Washington que les pays membres de l’OTAN, dont le Canada, atteignent cet objectif.

Avec l’Agence France-Presse et l’Associated Press