(Washington) Après avoir porté pendant deux ans la voix de Donald Trump sur la scène internationale, Nikki Haley était devenue l’ultime obstacle entre l’ex-président et l’investiture républicaine. Mais elle a finalement déposé les armes mercredi après un duel inégal.

Prenant acte de sa lourde défaite mardi soir lors du Super Tuesday, remporté par son rival dans 14 des 15 États en jeu, elle a annoncé de Charleston (sud-est), ville de Caroline du Sud, dont elle a été gouverneure, l’arrêt de sa campagne.

Nikki Haley a dit espérer que Donald Trump s’attacherait désormais à « mériter les voix de ceux, dans notre parti et au-delà, qui ne l’ont pas soutenu ».  

À 52 ans, la nouvelle coqueluche de la droite américaine lassée par les foucades de Donald Trump, aura joué à fond la carte du changement de style et de génération, renvoyant dos à dos le président démocrate sortant Joe Biden, 81 ans, et son ancien patron, 77 ans.

Malgré des défaites cuisantes dans la quasi-totalité des primaires depuis le début de l’année, elle se targuait d’être bien mieux placée que l’ex-président républicain, à la personnalité profondément clivante, pour l’emporter en novembre face au candidat démocrate.

« Manque de respect »

Nikki Haley promettait de rétablir une forme de « normalité » après le « chaos de Trump », dans une possible allusion à ses multiples inculpations pénales, ne manquant pas une occasion de marquer sa différence.

Comme en février, après une sortie d’estrade de son adversaire qui faisait mine de s’étonner de ne pas la voir faire campagne avec son mari, Michael Haley, officier de la Garde nationale en exercice à Djibouti : « Il est en déploiement au service de notre pays, quelque chose dont vous ne connaissez rien », lui a-t-elle répliqué, estimant que son « continuel manque de respect envers les sacrifices des familles de militaires » le rendait indigne du titre de commandant en chef.

Sur le fond, elle décline un argumentaire conservateur très classique, dénonçant un État fédéral jugé hypertrophié, une dette, des impôts trop lourds et un système d’immigration taxé de laxisme.

Elle prône un relèvement de l’âge de la retraite pour les nouveaux arrivants sur le marché du travail afin de sauver de la faillite les systèmes de sécurité sociale et d’assurance-maladie.

Donald Trump la traite à l’envi de « mondialiste », par opposition à son credo de « l’Amérique d’abord ». Il l’accuse de vouloir « augmenter les impôts et saigner la Sécurité sociale ».

Divergences en politique extérieure

En réalité, leurs programmes ne se différencient guère, sauf sur l’Ukraine, que Nikki Haley veut continuer à soutenir massivement face à l’invasion russe, alors qu’il se targue de pouvoir jouer les médiateurs entre Kyiv et Moscou.

Après avoir longtemps ménagé celui qui l’a nommée en 2017 au prestigieux poste d’ambassadrice aux Nations unies malgré son absence d’expérience internationale, Nikki Haley lâchait enfin ses coups.

Elle reproche à Donald Trump de s’acoquiner avec des « dictateurs » en faisant bon marché des alliés historiques des États-Unis.

« Notre monde est en feu à cause du désengagement américain », a-t-elle réaffirmé mercredi. « Si nous nous désengageons davantage, il y aura encore plus de guerres, pas moins », a-t-elle ajouté, en allusion au discours volontiers isolationniste de son adversaire.

Lui-même la traite depuis des mois de « cervelle de moineau ». Il ne lui pardonne apparemment pas ce crime de lèse-majesté d’être revenue sur sa promesse de ne pas se présenter contre lui s’il était candidat en 2024.

Née Nimarata Nikki Randhawa, elle est la fille d’un couple d’immigrés indiens de religion sikhe.

Elle entre sur la scène politique avec son élection en 2004 au Parlement de son État natal de Caroline du Sud, puis accède à la notoriété nationale en 2010 lors de sa campagne pour devenir gouverneure.

Une fois élue, Nikki Haley maintient le cap à droite, affichant son hostilité aux syndicats et aux impôts, ainsi qu’au mariage homosexuel, ou en se montrant réticente à l’accueil de réfugiés syriens dans son État.

Le 17 juin 2015, un suprémaciste blanc entre dans une église de Charleston et tue neuf fidèles afro-américains. Après s’y être longtemps refusée, elle ordonne alors de retirer du Parlement de Caroline du Sud le drapeau confédéré, symbole du passé esclavagiste de cet État.