(New York) Après la démission choc samedi de la présidente de l’université de Pennsylvanie (UPenn) pour des accusations d’antisémitisme sur les campus américains, les pressions politiques se sont intensifiées dimanche aux États-Unis et en Israël contre les patronnes de Harvard et du MIT clouées au pilori la semaine dernière par le Congrès.

Dans un contexte de poussée d’actes antisémites aux États-Unis depuis la guerre à Gaza entre Israël et le Hamas, le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou s’est félicité du soutien des « amis et dirigeants de la communauté juive » américaine de six millions d’âmes, la plus importante après l’État hébreu.

« Tout président d’université dans ce pays qui est incapable de condamner l’antisémitisme et le génocide juif doit démissionner ou être viré », a renchéri sur la télé conservatrice Fox News Nancy Mace, parlementaire républicaine de Caroline du Sud à la Chambre des représentants du Congrès.

Allié des États-Unis, « Israël est le seul pays du monde qui risque un véritable génocide », a estimé l’élue américaine.

« Une à terre, il en reste deux », s’était réjouie samedi soir sur X sa collègue Elise Stefanik, représentante de l’État de New York, en allusion à Elizabeth Magill, démissionnaire de la présidence de UPenn, et à ses paires Claudine Gay et Sally Kornbluth, respectivement présidentes de Harvard et du Massachusetts Institute of Technology (MIT).

« Pourriture invasive »

« Ce n’est que le début de la lutte contre la pourriture invasive de l’antisémitisme qui a détruit les plus “ prestigieuses ” institutions d’enseignement supérieur aux États-Unis », a menacé Mme Stefanik en sommant les cheffes de Harvard et du MIT de « faire le bon choix » en partant car « le monde observe ».

Les trois présidentes d’universités sont poussées dehors par des dizaines d’élus du Congrès après leur audition le 5 décembre — jugée « absolument honteuse » par le gouverneur démocrate de Pennsylvanie — devant une commission de la Chambre des représentants au sujet de la hausse d’actes antisémites à l’université.

Dans une ambiance tendue, Mmes Magill, Gay et Kornbluth avaient répondu mardi cinq heures durant à Mme Stefanik qui assimilait les appels à l’« intifada » d’étudiants propalestiniens à une exhortation au « génocide contre les juifs en Israël et dans le monde ».

PHOTO MARK SCHIEFELBEIN, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Sally Kornbluth, présidente du MIT

Lorsque l’élue républicaine avait demandé si « appeler au génocide des juifs violait le règlement sur le harcèlement à Harvard, oui ou non ? », Mme Gay avait répondu : « Cela peut, en fonction du contexte », avant d’ajouter : « Si c’est dirigé contre une personne. »

Prêt de 100 millions de dollars

Vendredi, la présidente de Harvard, qui avait défendu avec ses collègues le sacro-saint principe de la liberté d’expression aux États-Unis, s’est dite « désolée » que ses « mots [aient] amplifié la détresse et la douleur » et Mme Magill a diffusé une vidéo d’excuses après qu’un donateur eut menacé de retirer 100 millions de dollars de prêt à UPenn.

En poste depuis l’été 2022, elle a finalement démissionné samedi soir sous la pression du président du conseil d’administration de l’université, Scott Bok, qui est lui aussi parti avec « effet immédiat ».

Après les réponses des trois présidentes jugées « inacceptables », la commission Éducation de la Chambre des représentants a ouvert jeudi une enquête sur l’« antisémitisme endémique » sur les campus.

Et en Israël, que Washington soutient diplomatiquement et militairement, le premier ministre Nétanyahou a dénoncé dimanche « une vague majeure d’antisémitisme aux États-Unis, venue de la gauche et de la droite, avec une flambée sur les campus et dans les universités ».

« L’important, c’est que les amis et les dirigeants de la communauté juive se dressent enfin contre cet antisémitisme. Il n’y a qu’une façon de le combattre : avec fierté et honneur, sans baisser la tête, mais en contrattaquant », a-t-il martelé dans un communiqué.

Depuis les attaques sanglantes du Hamas contre Israël le 7 octobre, suivies de représailles meurtrières de l’État hébreu, le conflit secoue des universités de la côte Est – réunies dans la très renommée « Ivy League » — comme Harvard et MIT près de Boston, UPenn à Philadelphie et Columbia à New York.

Pour Dani Dayan, président du mémorial de la Shoah en Israël Yad Vashem, « l’épicentre de l’antisémitisme aux États-Unis se trouve dorénavant sur les campus, notamment de l’Ivy League » et il l’a comparé à un « cancer ».