(Kahului) Le bilan des incendies de forêts à Hawaii, les plus meurtriers en plus d’un siècle aux États-Unis, pourrait dépasser les 100 décès lundi, alimentant les critiques sur la gestion du drame par les autorités.

CE QU’IL FAUT SAVOIR

  • Les incendies ont fait au moins 96 morts, selon un bilan provisoire dimanche soir, laissant des cadavres difficiles à identifier ;
  • Les États-Unis n’avaient pas connu d’incendies aussi meurtriers depuis « Camp Fire », un brasier qui a détruit la petite ville de Paradise en Californie et tué 86 personnes en 2018 ;
  • Une enquête a été ouverte sur la gestion de la crise par les autorités ;
  • Quelque 2207 bâtiments, majoritairement résidentiels, ont été détruits ou endommagés ;
  • Les pompiers continuaient à lutter contre un autre incendie dans une région montagneuse de l’île de Maui, samedi soir.

Ces brasiers d’une intensité et d’une vitesse exceptionnelles ont fait 96 morts à Maui, selon un bilan provisoire dimanche soir, laissant des cadavres difficiles à identifier.

« Aucun de nous ne connaît encore l’ampleur » du désastre, a reconnu John Pelletier, chef de la police de l’île.

L’incendie qui a réduit en cendres la ville balnéaire de Lahaina « a même fait fondre le métal », a précisé M. Pelletier, en appelant les proches de personnes disparues à se soumettre à un test ADN, pour aider à l’identification des victimes.  

Les chiens renifleurs en quête des disparus, qui pourraient se compter par centaines, ont encore une immense zone à parcourir : « Nous allons aussi vite que possible. Mais juste pour que vous sachiez : 3 %, c’est ce qu’ont fouillé les chiens », a souligné le chef de la police.

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Un résidant de Lahaina constate les dégâts causés par l’incendie à un immeuble d’appartements.

« Pas vu venir »

Les circonstances de ces incendies fulgurants, dont la cause n’est pas encore connue, restent floues.  

Ils ont pris la population par surprise, ce que beaucoup reprochent aux autorités. « Vous voulez savoir quand on a su qu’il y avait le feu ? Quand il est arrivé devant la maison ! », a affirmé à l’AFP, Vilma Reed.  

Comme de nombreux habitants, elle n’a reçu ni alerte, ni ordre d’évacuation, à cause d’une série d’anomalies.

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Un bénévole de Mercy Worldwide évalue les dégâts dans un complexe d’appartements rasé par l’incendie qui a dévasté Lahaina, sur l’île de Maui, le 12 août.

Les sirènes, utilisées notamment pour les tsunamis, sont restées muettes. Défaillance technique ou décision des opérateurs ? Nul ne sait.

Les alertes officielles à la télévision et la radio, elles, étaient inutiles pour les résidants privés d’électricité.

Enfin, les téléphones n’ont pas pu aider, faute de réseau. Selon des habitants, l’avertissement habituellement envoyé en cas de danger météorologique ou d’alerte enlèvement, n’a pas retenti sur leurs appareils.

Une enquête a été ouverte sur les évènements et notamment les décisions prises par les autorités.

La représentante de Hawaii Jill Tokuda a déjà reconnu que les autorités avaient « sous-estimé la dangerosité et la rapidité du feu ».

Mazie Hirono, sénatrice démocrate de l’archipel, a, elle, déclaré sur CNN ne pas vouloir « chercher à trouver des excuses pour cette tragédie ».

« Personne ne l’a vu venir. C’est tout », a résumé John Pelletier.

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Le chef de la police de Maui, John Pelletier

De nombreux facteurs ont contribué à la dangerosité de ces incendies, comme un ouragan au sud-ouest de l’île qui nourrissait des vents très violents et un hiver anormalement sec.

Ils surviennent au milieu d’un été marqué par des évènements météorologiques extrêmes sur la planète, liés au réchauffement climatique selon les experts, dont une vague de chaleur intense dans le sud des États-Unis et des mégafeux de forêt au Canada.

Face à l’étendue des dégâts, le président américain Joe Biden a indiqué envisager de se rendre à Hawaii, où plusieurs incendies de plus petite taille brûlent encore.

« Éprouver la perte »

Des habitants, soucieux de recouvrer des bribes de leurs vies épargnées par les flammes,  de rechercher des animaux domestiques ou des êtres chers disparus, ont attendu des heures dans l’espoir d’avoir accès aux sites de leurs habitations.  

Mais la police de Maui a érigé des barrages et averti que les membres du public, même certains de ceux prouvant qu’ils habitaient à Lahaina, ne seraient pas autorisés à entrer dans le périmètre sinistré tant que l’estimation des risques et les recherches étaient en cours.  

Et, après avoir exercé son ministère pendant près de 50 ans à l’église baptiste de Lahaina, c’est dans une cafétéria de la ville proche de Kahului que le pasteur Arza Brown a célébré l’office dimanche devant près de 200 habitants de Lahaina. Son église a été détruite, comme sa maison.  

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Vue sur des bâtiments et des maisons détruits par le feu à Lahaina

« Nous nous rassemblons aujourd’hui, juste pour être ensemble et nous donner du courage », a dit le pasteur à l’AFP en racontant « éprouver la perte pour la première fois », comme ses fidèles, malgré une vie à « aider beaucoup de monde à traverser de nombreux désastres ».  

Quelque 2207 bâtiments, majoritairement résidentiels, ont été détruits ou endommagés, selon l’agence fédérale chargée de la réponse aux catastrophes naturelles (FEMA).

Rien que pour l’incendie de Lahaina, le coût de la reconstruction est estimé à 5,52 milliards de dollars.