(Washington) Le chef de la Cour suprême des États-Unis, John Roberts, a indiqué mardi qu’il refuserait de témoigner devant le Congrès après une vaste controverse sur des questions éthiques concernant ses pairs, notamment le juge Clarence Thomas.  

Des croisières sur un méga-yacht, des vols en jet privé… le juge Thomas, le plus conservateur de la Cour, est au cœur d’une polémique depuis des révélations de ProPublica sur les largesses qu’il a acceptées de l’homme d’affaires Harlan Crow, sans les déclarer.  

John Roberts, qui avait été invité à témoigner le 2 mai devant le Sénat, a invoqué « des préoccupations liées la séparation des pouvoirs et à l’importance de préserver l’indépendance de la justice », dans une missive adressée à la commission judiciaire du Sénat.  

Le chef de la Cour, lui-même faisant partie de la majorité conservatrice de l’instance, a aussi joint une copie des directives éthiques de la Cour suprême et une déclaration signée par les neuf sages dans laquelle ils « réaffirment et réitèrent les principes et pratiques éthiques fondamentaux ».

« Les révélations concernant des juges qui ne respectent pas les règles éthiques attendues n’ont cessé de se multiplier », avait pourtant alerté la semaine dernière le chef de la commission judiciaire du Sénat, Dick Durbin, dans la lettre qui demandait au juge Roberts de témoigner.

Clarence Thomas s’est défendu de tout abus délibéré, assurant que les règles encadrant les déclarations autour de ce type de séjours avaient changé et que M. Crow n’avait aucune affaire en cours devant la Cour suprême.

Conflit d’intérêts

Ce n’est pas la première fois que le nom de M. Thomas est lié à une controverse : sa femme Ginni, lobbyiste et militante conservatrice, a été impliquée dans la croisade de Donald Trump pour prouver – à tort – que la présidentielle de 2020 lui avait été volée.

Une fois révélés les textos et courriels qu’elle a envoyés dans ce but, la gauche avait fustigé un apparent conflit d’intérêts et appelé son mari à se récuser de tout dossier électoral.

Nommé par le président républicain George H. W. Bush en 1991, Clarence Thomas avait été confirmé malgré des accusations de harcèlement sexuel portées par une ancienne assistante, Anita Hill. Il les a toujours niées, se disant victime d’un « lynchage high-tech ».

Depuis les récentes révélations de ces largesses, certains élus démocrates ont appelé à sa « démission immédiate ».

Le juge conservateur Neil Gorsuch est aussi au cœur d’une polémique, le site Politico ayant révélé qu’il avait vendu juste après sa confirmation à la Cour suprême en 2017 une large propriété dans le Colorado au directeur du cabinet d’avocats Greenberg Traurig qui plaide régulièrement des affaires devant la haute cour.  

Après le refus de témoigner de John Roberts, deux sénateurs, le démocrate Angus King et la républicaine Lisa Murkowski, ont rendu public mercredi un projet de loi visant à la création d’un code de conduite pour la Cour suprême et la nomination d’un responsable pour passer en revue les potentiels conflits d’intérêts et plaintes.  

Les juges de la haute cour sont les seuls juges fédéraux non soumis de façon explicite à un code de conduite, ont souligné les deux élus.

« Les Américains ont fait part clairement de leurs inquiétudes vis-à-vis de la transparence – ou du manque [de transparence] de la Cour suprême et de ses juges », a déclaré Mme Murkowski.