(Brownsville et Washington) Les républicains ont accusé lundi Joe Biden d’avoir provoqué un appel d’air à la frontière américano-mexicaine où affluent des milliers de migrants, dont de nombreux mineurs non accompagnés.

Toutes les administrations américaines connaissent des pics, souvent saisonniers, d’arrivées de migrants.  

Mais pour le chef de la minorité républicaine à la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, « cette crise a été créée par les politiques présidentielles de la nouvelle administration ».  

« Elle ne peut avoir d’autre nom que la crise Biden aux frontières », a-t-il lancé lors d’une visite au Texas, à la frontière avec le Mexique, en compagnie d’une dizaine d’autres élus républicains de la Chambre.

PHOTO JUSTIN HAMEL, AGENCE FRANCE-PRESSE

Le chef de la minorité républicaine à la Chambre des représentants, Kevin McCarthy s’en est pris au président Joe Biden lors d’une conférence de presse au Texas, à la frontière américano-mexicaine.

Dès son premier jour à la Maison-Blanche le 20 janvier, Joe Biden avait signé un moratoire sur l’expulsion des sans-papiers arrivés aux États-Unis avant novembre 2020. Et il a promis une vaste réforme migratoire, qui ouvrirait la voie de la naturalisation à quelque 11 millions d’immigrés en situation irrégulière.

Même si les expulsions de nouveaux arrivants se poursuivent, tout cela a encouragé les migrants à tenter leur chance, affirment les républicains.

La Maison-Blanche a reconnu lundi qu’elle faisait face à un « gros problème », mais en a attribué la responsabilité à Donald Trump, qui a quitté le pouvoir le 20 janvier après quatre ans de mandat.

« La dernière administration nous a laissé un système démantelé et impraticable », a déclaré la porte-parole de la Maison-Blanche Jen Psaki. « Nous allons tout faire pour trouver une solution. »

Les démocrates accusent les républicains de chercher à faire « diversion » pour ne pas parler de leur gigantesque plan de relance économique, très populaire auprès des Américains.

Et ils soulignent que le nombre de clandestins appréhendés à la frontière avec le Mexique était déjà reparti à la hausse à la fin du mandat Trump.  

Face aux parlementaires républicains qui disaient lundi avoir le « cœur brisé » par la situation des migrants à la frontière, certains rappellent aussi la politique très controversée de « tolérance zéro » mise en place par Donald Trump en 2018, qui avait mené à la séparation de milliers de familles de migrants.

Des centaines d’enfants n’ont toujours pas retrouvé leurs parents.

« Pas d’argent »

« À la maison, on n’a pas de travail, pas d’argent », confie Rubia Tabora, Guatémaltèque âgée de 25 ans, assise avec son fils d’un an à la gare routière de Brownsville, à la pointe sud du Texas.

Elle a franchi clandestinement la frontière depuis le Mexique et veut retrouver son époux, qui vit déjà aux États-Unis.

L’annonce de la signature du moratoire l’a encouragée à passer la frontière. « Mon mari m’a dit de venir à ce moment-là », expliquait dimanche soir la jeune femme à l’AFP.  

Au cœur de cet afflux, qui se répète tout au long de la frontière, l’arrivée massive de mineurs non accompagnés a débordé les structures d’accueil existantes, déjà limitées par la pandémie de COVID-19.  

PHOTO ELI HARTMAN, ASSOCIATED PRESS

Un agent du département de l’Intérieur attend l’arrivée d’enfants et d’adolescents non accompagnés à un refuge pour migrants à Midland, au Texas.

Au point que l’administration Biden a ordonné samedi à l’agence américaine de gestion des situations d’urgence (FEMA) d’intervenir. Pendant trois mois, elle aidera à héberger temporairement les mineurs avant qu’ils ne rejoignent des adultes, généralement des proches déjà installés aux États-Unis.

Jusqu’à 3000 mineurs relogés

Signe de l’urgence, la FEMA a loué un espace dans un palais des congrès de Dallas pour loger temporairement jusqu’à 3000 adolescents d’entre 15 et 17 ans, a indiqué un élu municipal de Dallas sur Facebook, J. J. Koch, en précisant que l’agence espérait l’ouvrir « dès cette semaine ».  

À Brownsville en revanche, le maire Trey Mendez a affirmé lundi que ses services n’étaient pas débordés par les quelque 150 migrants qui arrivent chaque jour, la plupart quittant les lieux sous 24 heures.  

« Je n’ai pas le sentiment que nous traversions une crise à Brownsville », a déclaré aux journalistes celui qui avait soutenu Joe Biden pour l’élection présidentielle.  

Le département de la Santé s’occupe actuellement de quelque 8800 jeunes migrants et les arrivées quotidiennes se poursuivent.

Sur le seul mois de février, la police aux frontières (CBP) a intercepté 100 000 clandestins à la frontière sud des États-Unis, dont 9457 mineurs non accompagnés ainsi que 19 246 personnes arrivées en famille.

Sous l’effet de la pandémie, le nombre de migrants mineurs arrivés seuls à la frontière avec le Mexique était tombé en avril 2020 à un plus bas, 741, et n’a cessé de remonter depuis.

En décembre, dernier mois entièrement passé sous la présidence de Donald Trump, les services douaniers avaient intercepté quelque 74 000 migrants, dont près de 5000 mineurs non accompagnés.  

Le 26 janvier, un tribunal fédéral américain avait bloqué la décision de l’administration de Joe Biden de geler pendant cent jours les expulsions d’immigrés en situation irrégulière.