L'utilisation du VX, un agent neurotoxique interdit, pour assassiner en Malaisie le demi-frère du dirigeant nord-coréen constitue une « violation patente » des traités internationaux, a estimé vendredi la Corée du Sud.

« Nous sommes choqués par les dernières révélations des autorités malaisiennes selon lesquelles le VX [...] a été utilisé pour tuer Kim Jong-Nam », a déclaré dans un communiqué le ministère sud-coréen des Affaires étrangères.

Il a pointé « une violation patente de la Convention sur les armes chimiques et d'autres normes internationales ».

Séoul, qui voit la main de Pyongyang derrière l'assassinat de Kim Jong-Nam à l'aéroport de Kuala Lumpur, est contrairement à la Corée du Nord signataire de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques, entrée en vigueur en 1997.

« L'utilisation des armes chimiques est strictement interdite, partout, quelle qu'en soit la raison », poursuit le ministère.

Le ministère sud-coréen de la Défense avait affirmé en 2014 dans un rapport que le Nord avait commencé dans les années 80 à produire des armes chimiques et estimé qu'il disposait de stocks de 2500 à 5000 tonnes.

En 2015, le groupe de réflexion américain Nuclear Threat Initiative estimait lui que la Corée du Nord était le pays au monde possédant le troisième plus gros stock d'armes chimiques au monde, après les États-Unis et la Russie.

Une goutte pourrait tuer 500 personnes

L'agent neurotoxique VX qui a vraisemblablement été utilisé pour assassiner Kim Jong-nam est considéré par plusieurs comme le pire produit du genre jamais inventé.

Ayant la viscosité de l'huile à moteur, il peut persister dans l'environnement et même une quantité infime inonde l'organisme de la victime de fluides, ce qui lui donne l'impression de se noyer avant de mourir.

Un expert américain, le toxicologue John Trestrail, a dit qu'une quantité de VX équivalente au poids de seulement deux pièces d'un sou suffirait pour tuer 500 personnes en étant appliquée sur leur peau. Le produit est si difficile à obtenir qu'il provenait probablement d'un laboratoire d'armes chimiques, ce qui augmente la probabilité que le meurtre ait été orchestré par un gouvernement.

M. Trestrail et d'autres soulignent toutefois que les tests malaisiens qui ont détecté la présence du VX devraient être validés par un laboratoire indépendant, compte tenu de la rareté du produit.

Le VX est une arme chimique de couleur ambrée, sans goût et sans odeur, qui a été développée dans les années 1950. Quand il est respiré ou absorbé par la peau, le produit interfère avec le système nerveux, en plus de provoquer un resserrement de la gorge et une accumulation de sécrétions, ce qui cause des difficultés respiratoires. La victime se met à suer abondamment, elle urine et défèque de manière incontrôlée, puis elle souffre de convulsions et de paralysie avant de mourir.

Un antidote, l'atropine, peut être injecté après l'exposition, et le personnel médical actif en zone de guerre en est équipé.

Un autre toxicologue, Bruce Goldberg, s'est demandé pourquoi l'attaque contre Kim Jong-nam n'a pas fait d'autres victimes. Des caméras de surveillance montrent deux femmes enduisant le visage de la victime avec leurs mains nues, sans pour autant sembler souffrir de problèmes de santé graves. La police malaisienne a toutefois dévoilé récemment que l'une d'elles a été prise de vomissements après l'attaque.

Les deux femmes et un autre individu ont été arrêtés, et la police malaisienne recherche plusieurs autres suspects.

«Si elles ont utilisé leurs mains nues, il est tout simplement impossible qu'elles aient pu l'exposer au VX sans avoir pris des précautions, a dit M. Goldberg. Et la seule précaution que je connais serait d'avoir pris l'antidote avant de passer aux actes.»

Personne d'autre - ni les employés de l'aéroport, ni le personnel médical qui a porté secours à Kim Jong-nam, ni les dizaines de milliers de passagers qui sont passés dans l'aérogare depuis l'attaque - n'a présenté de symptômes.

M. Trestrail a prévenu que la menace du VX persistera longtemps si les lieux ne sont pas décontaminés soigneusement par des spécialistes.

- Avec l'Associated Press