Un conseil de réforme nommé par la junte au pouvoir en Thaïlande a rejeté dimanche un projet de Constitution visant pour ses défenseurs à sortir de l'instabilité politique, un non qui risque de prolonger la mainmise de l'armée sur le pays et retarder les élections.

Le projet de nouvelle loi fondamentale, la 20e depuis l'abolition de la monarchie absolue en 1932, avait essuyé les foudres de l'opposition qui lui reprochait d'être facteur de divisions et de viser à prolonger le règne de la junte.

Mais le rejet du texte par le Conseil de réforme national (CRN) aura pour conséquence de relancer le processus tortueux de rédaction d'un nouveau texte, ce qui pourrait retarder d'autant des élections déjà repoussées à la mi, voire à la fin 2016.

Sur 240 participants, 135 ont dit non au texte et 105 se sont prononcés en sa faveur, a dit Tienchai Kiranan, le président du CRN.

En prenant le pouvoir par un coup d'État en mai 2014, la junte avait promis de donner un nouvel élan à la Thaïlande.

La junte dirigée par Prayut Chan-O-Cha assure qu'une nouvelle Constitution est essentielle pour rapprocher les Thaïlandais avant les élections.

Le royaume est partagé entre les démocrates favorables aux partis populistes créés par l'ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra, renversé par un coup d'État en 2006, et une élite royaliste, soutenue par l'armée et la justice.

Depuis 2001, les partis de Shinawatras ont remporté toutes les élections, mais ont subi deux coups d'État. Trois chefs du gouvernement ont été démis de leurs fonctions.

Depuis le dernier coup d'État, les droits de l'Homme se sont dégradés, dénoncent les opposants. Toute voix discordante est étouffée et les civils sont parfois jugés par des tribunaux militaires.

Pour l'opposition, le projet de Constitution n'était qu'un moyen de consacrer le pouvoir de la junte et d'empêcher l'instauration de la démocratie.

Ils mettaient en particulier en cause un article, qui dote un comité de 22 membres  (militaires, chef de la police...) de pouvoirs d'urgence leur permettant d'intervenir à tout moment dans les cinq ans après l'adoption du texte.

Les analystes soulignent que le rejet du texte fait aussi les affaires de la junte, car il reporte le retour de la démocratie.

La junte a désormais un mois pour nommer un nouveau comité de rédaction. «Ils auront 180 jours pour rédiger un nouveau texte qui sera ensuite soumis à référendum», a déclaré à l'AFP un membre du CRN, Paiboon Nititawan. «Les élections seront repoussées d'environ six ou sept mois».

Ce vote survient à un moment d'incertitudes sur l'avenir de la Thaïlande, l'état de santé du roi  Bhumibol Adulyadej, 87 ans, étant préoccupant.