Le premier ministre vietnamien Nguyen Tan Dung a été reconduit mardi sans surprise par l'Assemblée nationale pour un nouveau mandat de cinq ans, confirmant son rôle d'homme fort dans un pays communiste qui se bat contre les difficultés économiques.

Seul candidat, il «a été réélu premier ministre avec 94% des votes» des 500 députés élus le 22 mai, a indiqué une source parlementaire.

Dung, 61 ans, premier ministre depuis 2006, avait été confirmé dans ses fonctions en janvier par le congrès du parti communiste vietnamien (PCV), grand-messe quinquennale qui redistribue les postes les plus importants du pouvoir dans la plus grande opacité.

Comme le veut la Constitution, un vote de l'Assemblée à parti unique devait formaliser cette nomination qui entérine une puissance politique jamais vue depuis des années et qui fait de lui, de facto, le numéro un du Vietnam d'aujourd'hui.

Selon certains analystes, lui et Truong Tan Sang, nommé président lundi, se sont longtemps disputé le poste de premier ministre, bien plus stratégique, à l'approche du congrès.

Mais malgré les attaques contre lui de dissidents et de l'intérieur du parti, notamment en raison de la quasi-faillite du conglomérat public de construction navale Vinashin, il avait réussi à consolider son pouvoir au sein de l'appareil communiste, et à sortir vainqueur du Congrès.

Dung est ainsi aujourd'hui plus fort que jamais grâce au soutien des militaires et de l'appareil policier du Comité central du parti. Une situation qui fait craindre aujourd'hui aux défenseurs des droits de l'homme que ce nouveau mandat ne soit annonciateur de temps plus difficiles encore pour la dissidence.

Il est déjà jugé responsable par les analystes du durcissement du régime depuis deux ans. En avril, Amnesty International avait notamment exprimé ses inquiétudes, condamnant le maintien en détention de dizaines de dissidents depuis fin 2009.

À la veille de la reconduction de Dung, le prêtre catholique Nguyen Van Ly, un des dissidents vietnamiens les plus célèbres dont les États-Unis avaient pris la défense, a été arrêté lundi à nouveau, après avoir été mis en liberté provisoire pour un an pour raisons médicales.

Le père Ly avait été condamné en 2007 à huit ans de prison pour propagande contre l'État, notamment accusé d'être à l'origine du «bloc 8406», un mouvement pro-démocratie né le 8 avril 2006 et appelant au multipartisme dans un pays où le Parti communiste exerce un pouvoir sans partage.

Le pouvoir de Dung pourrait toutefois être positif pour l'économie, en l'aidant à imposer les «bonnes solutions» pour l'économie, a noté un diplomate asiatique.

Le premier ministre va «faire face à un défi énorme sur l'économie, qui a été très déstabilisée pendant son premier mandat», a commenté l'économiste Le Dang Doanh.

Si le Vietnam connaît depuis de nombreuses années une forte croissance, il se bat aussi contre de graves déséquilibres: 12,4 milliards de dollars de déficit commercial en 2010, une monnaie en chute libre et une inflation qui a atteint en juillet 22% sur un an.

Cette situation a forcé le PCV à promettre en janvier dernier un nouveau modèle de développement, faisant ainsi passer au second plan la sacro-sainte croissance, érigée en priorité absolue pendant presque deux décennies.

Malgré les déclarations du gouvernement qui assure que l'économie se stabilise, la crise est toujours «importante», a estimé Vuong Quan Hoang, de DHVP Research and Consultancy.

«La population supporte de moins en moins l'inflation. La pression sur le nouveau gouvernement sur ce front est énorme», a-t-il ajouté.

Et la confiance des investisseurs étrangers continue de s'émousser, a souligné mardi Eurocham, la chambre européenne de commerce au Vietnam.