Des combats à l'arme lourde ont opposé dimanche, pour le troisième jour consécutif, des soldats cambodgiens et thaïlandais à la frontière disputée entre les deux pays, quelques heures après l'appel de l'ONU à un cessez-le-feu.

Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a appelé dans la nuit les deux voisins à «mettre en place un cessez-le-feu effectif et vérifiable».

Mais vers 10H00 (03H00 GMT), les affrontements ont repris autour d'un groupe de temples disputés.

Les deux premiers jours, les violents combats ont tué six soldats cambodgiens et quatre thaïlandais. Des milliers de villageois ont fui les violences.

Dans la province thaïlandaise de Surin, 16 camps de fortune accueillent plus de 18 000 personnes, a indiqué un responsable du district de Phanom Dong Rak où ont lieu des combats.

«Quand un obus est tombé près de ma maison, j'ai su que je devais m'enfuir», a raconté Somjai Lengtamdee, 37 ans, qui a trouvé refuge dans le district voisin de Prasat.

«Je ne me sens toujours pas en sécurité dans le camp. J'espère seulement que la guerre va s'arrêter rapidement. J'ai tellement peur», a ajouté ce père de trois enfants.

Côté cambodgien, les tirs d'artillerie étaient clairement audible dimanche matin à 20 km des combats, où la population évacuée a trouvé refuge dans des écoles et des temples, selon un photographe de l'AFP.

«De nombreuses bombes sont tombées près de mon village et nous avons eu peur. Je ne sais pas du tout quand nous pourrons rentrer», a expliqué Neb Oeuth, qui a trouvé refuge avec ses six enfants dans une pagode à Samrong, à 40 km des combats.

Les deux voisins se sont affrontés plusieurs fois ces dernières années dans la jungle près d'anciens temples situés sur une frontière qui n'a jamais été totalement démarquée, notamment en raison des mines laissées par des décennies de guerre civile au Cambodge.

Les derniers combats du 4 au 7 février, qui avaient fait dix morts, dont des civils, avaient eu lieu à quelque 100 km plus à l'est, près du temple khmer de Preah Vihear.

Ces ruines du XIe siècle, dont le classement par l'UNESCO en 2008 avait ravivé les tensions, relèvent de la souveraineté du Cambodge. Mais les Thaïlandais contrôlent ses principaux accès et les deux pays revendiquent une zone de 4,6 km2 en contrebas de l'édifice.

Comme d'habitude, les deux voisins se rejettent depuis vendredi la responsabilité d'avoir ouvert le feu.

Le ministère cambodgien de la Défense a également accusé l'armée thaïlandaise d'avoir visé des zones civiles, d'avoir utilisé des «gaz toxiques» et d'avoir envoyé son aviation au-dessus de son territoire.

Des accusations niées en bloc par Bangkok. «Nous avons répondu avec des mitrailleuses et de l'artillerie, mais pas de gaz ni d'invasion de l'espace aérien cambodgien», a assuré dimanche le porte-parole de l'armée Sunsern Kaewkumnerd.

La Thaïlande avait reconnu avoir utilisé en février des armes controversées, les «munitions classiques améliorées à double effet», assurant malgré les accusations d'ONG qu'il ne s'agissait pas d'armes à sous-munitions.

Le premier ministre Abhisit Vejjajiva a, lui, accusé dimanche le Cambodge de vouloir «internationaliser» le conflit.

Phnom Penh réclame depuis des mois une médiation pour régler les différends frontaliers, mais Bangkok insiste pour des discussions bilatérales.

Après les affrontements de février, les deux pays avaient donné leur accord pour l'envoi d'observateurs à la frontière, après une médiation de l'Association des nations d'Asie du sud-est (Asean).

Mais depuis, ils n'ont jamais été déployés, l'armée thaïlandaise ayant ensuite indiqué qu'ils n'étaient pas les bienvenus.