Des manifestants de l'ethnie Han, majoritaire en Chine, sont descendus en masse jeudi dans les rues d'Urumqi pour exiger une meilleure sécurité, deux mois après des troubles interethniques meurtriers dans la capitale du Xinjiang musulman.

La police s'est déployée en nombre dans la ville ou l'atmosphère était tendue et a appelé la population d'Urumqi à rester chez elle en raison des manifestations qui auraient été déclenchées par des attaques perpétrées contre des passants par des agresseurs munis de seringues, ont indiqué des témoins à l'AFP. Urumqi avait été secouée début juillet par des violences interethniques entre Hans et Ouïghours qui ont fait au moins 197 morts selon les autorités chinoises, mais «beaucoup plus», selon l'opposition en exil de cette communauté musulmane et de langue turque.

Des témoins ont fait état jeudi d'une foule nombreuse et en colère descendue dans les rues pour protester contre ces attaques à la seringue. Certains témoins ont parlé de milliers de manifestants.

L'agence Chine Nouvelle, qui évoque de «grandes foules» dans plusieurs quartiers d'Urumqi, a rapporté qu'un millier de manifestants s'étaient rassemblés dans la matinée pour exiger des garanties sur leur sécurité après les attaques à la seringue.

L'agence officielle a précisé que «des membres de la communauté ouïgoure font partie des protestataires».

«Il y a environ 10000-20000 personnes et de nombreux policiers à chaque carrefour. Plus de cent policiers tous les 400-500 mètres», a estimé la directrice d'un centre médical, une Han qui a demandé à ne pas être nommée.

«J'ai entendu qu'il y avait eu une manifestation hier. Aujourd'hui, je l'ai vue; ils scandaient «Protégez notre patrie». La plupart sont des Hans», a ajouté cette responsable.

Selon elle, les autorités ont mis en garde les habitants contre les attaques à la seringue. Chine Nouvelle a annoncé que 15 personnes avaient été arrêtées pour avoir perpétré ces agressions contre les membres de neuf groupes ethniques, dont des Hans et des Ouïghours, la principale minorité ethnique au Xinjiang.

En fin d'après-midi, des manifestations se poursuivaient, selon une commerçante du centre-ville.

«J'ai fermé ma boutique. J'ai peur de sortir. Il y a beaucoup de gens dehors en train de manifester», a-t-elle dit avant de raccrocher brusquement.

«Les Hans ont fait une espèce de manifestation (...) qui semblait pacifique», a indiqué un médecin. «La police a imposé des contrôles routiers et nous a demandé de rester chez nous», a poursuivi Halisha, médecin de la communauté ouïgoure, en précisant ne pas avoir entendu de tirs.

Ni les autorités municipales ni le gouvernement régional n'étaient joignables dans l'immédiat.

Les violences interethniques avaient éclaté le 5 juillet lorsque que des Ouïghours s'en étaient violemment pris à des Hans. Mais les jours suivants, des Hans armés de bâtons et de pelles avaient déferlé dans les rues pour se venger, en dépit d'un dispositif policier imposant.

«Les Hans sont toujours en colère du fait qu'on n'arrive pas à les protéger», a expliqué jeudi un Han d'Urumqi, Chen Xiping, en précisant à propos des manifestations: «Il y a eu des choses comme cela ces dernières semaines».

Une femme Han a indiqué que les deux derniers jours avaient été particulièrement tendus à Urumqi et que les manifestants n'étaient pas concentrés en un seul endroit de la ville de près de deux millions d'habitants.

Pour sa part la dissidence ouïghoure en exil a fait état de blessés.

«Nous avons appris que plus de dix Ouïghours ont été blessés, a déclaré à l'AFP le porte-parole du Congrès ouïghour mondial (COM), Dilat Raxit, basé en Allemagne.

La Chine avait accusé la dissidente ouïghoure exilée Rebiya Kadeer, présidente du COM, d'avoir fomenté les troubles.