La Corée du Nord vient de faire un nouveau pied de nez nucléaire au reste du monde, condamné sans réserve d'un bout à l'autre de la planète. Pourquoi la Corée du Nord cherche-t-elle à ce point à faire peur? Probablement pour prouver que le pays n'est pas affaibli même si son président vient d'être gravement malade. Et pour attirer l'attention du président américain Barack Obama, nous expliquent nos journalistes.

La Corée du Nord a procédé dimanche soir à un nouvel essai nucléaire, son deuxième depuis 2006. Le Conseil de sécurité de l'ONU s'est réuni d'urgence hier soir pour envisager de nouvelles sanctions contre l'«État ermite».

 

À Ottawa, le premier ministre Stephen Harper a qualifié le test d'«action dangereuse et inutilement provocatrice». Le président américain Barack Obama a réclamé une «réponse de la communauté internationale» devant cette «action téméraire». La Chine et la Russie ont aussi dénoncé l'essai, la Russie affirmant qu'il pourrait «sérieusement déstabiliser l'Asie du Nord-Est».

Les tests ont été annoncés par les Nord-Coréens et confirmés par des bureaux de mesure des tremblements de terre de différents pays. Le premier test, en 2006, avait été un pétard mouillé de seulement 0,8 kilotonne. Les estimations du test de dimanche varient entre 1 et 20 kilotonnes. La bombe atomique d'Hiroshima atteignait 15 kilotonnes.

L'Organisation du traité d'interdiction complète des essais nucléaires a indiqué avoir enregistré des vibrations de 4,52 à l'échelle de Richter, contre 4,1 en 2006. Les États-Unis ont initialement rapporté une explosion d'environ 1 kilotonne, ce qui signifierait un deuxième échec.

Le test survient un mois après un lancement raté de satellite qui avait aussi provoqué la controverse. La fusée du satellite peut en effet être utilisée comme missile intercontinental. Le lancement avait échoué, le troisième étage de la fusée n'ayant pas fonctionné. C'était le troisième échec de cette fusée capable d'atteindre l'Alaska en version militaire.

À la fin avril, le Conseil de sécurité de l'ONU a décidé, après trois semaines de négociations ardues avec la Chine qui veut protéger son allié et voisin, d'ajouter trois nouveaux noms à la liste déjà longue de firmes nord-coréennes interdites de commerce international parce qu'elles participent aux programmes nucléaires et balistiques. Quelques heures plus tard, le gouvernement nord-coréen menaçait de procéder à un test nucléaire si les sanctions n'étaient pas levées.

La communauté internationale est à court de mots face à la Corée du Nord. Depuis 1994, quand le programme nucléaire nord-coréen a été découvert par l'Agence internationale de l'énergie atomique, les négociations ont progressé, puis ont été rompues à plusieurs reprises. En désespoir de cause, certains experts suggèrent de nouvelles approches. Sur le forum Nautilus, consacré à la sécurité dans le Pacifique Nord, un économiste de l'Université de Vienne, Rudiger Frank, vient d'avancer que qualifier les tests nucléaires et balistiques d'«échecs» pousse la Corée du Nord à la surenchère. Mieux vaudrait saluer ces tests avec «respect», selon M. Rudiger.

Les motivations de la Corée du Nord sont nébuleuses. Le test nucléaire pourrait faire partie d'une stratégie de passation de pouvoirs du président nord-coréen Kim Jong-il, qui a été gravement malade l'an dernier. Il s'agirait d'une manière de rappeler que la Corée-du-Nord n'est pas affaiblie par sa maladie.

La secrétaire d'État américaine, Hillary Clinton, n'a pas hésité à mettre en doute la capacité de M. Kim à diriger son pays après sa maladie, lors d'une visite en Asie en février. Mais il est extrêmement difficile d'identifier une ligne de succession. Beaucoup d'encre a coulé depuis avril chez les spécialistes quand un beau-frère du président nord-coréen, Jang Seong-taek, a été nommé à la toute-puissante Commission nationale de la défense. M. Jang a longtemps été écarté du pouvoir parce que le père de Kim Jong-il s'opposait à son mariage avec sa fille, rapportait le Wall Street Journal cette fin de semaine. Mais il a récemment été vu dans des photos officielles en compagnie de Kim Jong-il. Des médias sud-coréens ont aussi mentionné que le troisième fils de Kim Jong-il, Kim Jong-un, 26 ans, a été nommé en secret à la Commission de la défense. Selon le Wall Street Journal, sa mère, morte en 2004 dans un accident de voiture, était particulièrement proche du président nord-coréen.

 

LA CORÉE DU NORD

Première «dynastie communiste» de la planète, la Corée communiste est l'un des pays les plus pauvres et les plus fermés au monde.

SITUATION GÉOGRAPHIQUE

La Corée du Nord (122 762 km2) est entourée par la Chine, la Russie et la Corée du Sud.

POPULATION

24 millions.

CAPITALE

Pyongyang.

LANGUE

Coréen.

RELIGIONS

Bouddhisme, christianisme, et chundo kyo (religion propre à la Corée) sont pratiqués sous haute surveillance.

PRODUIT NATIONAL BRUT PAR HABITANT

1100 dollars américains en 2006, selon les estimations du département d'État américain.

DETTE EXTÉRIEURE

Estimée à 12 milliards de dollars.

FORCES ARMÉES

Environ 1,2 million d'hommes.