(New Delhi) Du 19 avril au 1er juin, près de 970 millions d’Indiens ― soit plus de 10 % de la population mondiale ― pourront voter lors des élections générales. Cet exercice gigantesque, le plus important au monde, durera 44 jours avant que les résultats ne soient annoncés le 4 juin.

Le premier ministre Narendra Modi brigue un troisième mandat consécutif. Il affrontera une vaste alliance de partis d’opposition qui peinent à contester son pouvoir d’attraction. La plupart des sondages prédisent que le parti nationaliste hindou de M. Modi, le Bharatiya Janata Party, remportera une victoire confortable, ce qui le consacrera comme l’un des dirigeants les plus populaires et les plus influents du pays.

Pourquoi cela prendra-t-il autant de temps ?

Il y a deux raisons principales : l’immensité de l’Inde, le pays le plus peuplé du monde, et l’incroyable niveau de logistique nécessaire pour que chaque électeur inscrit puisse voter.

Au fil des ans, la durée du scrutin a varié. Il a fallu près de quatre mois pour achever le vote lors des premières élections en Inde en 1951-1952, après que le pays ait obtenu son indépendance de la domination britannique, et seulement quatre jours en 1980. En 2019, le vote a duré 39 jours et les élections de cette année sont les deuxièmes plus longues.

Avec 969 millions d’électeurs inscrits, la taille de l’électorat indien est supérieure à la population combinée de l’Union européenne.

L’élection des 543 membres de la chambre basse du Parlement se déroule en sept phases. Les 28 États et les huit territoires fédéraux de l’Inde voteront à des moments différents. Chaque phase dure un jour, la première commençant le 19 avril et se terminant le 1er juin.

Si certains États voteront en une journée, d’autres pourront prendre plus de temps. L’Uttar Pradesh, le plus grand État de la taille du Brésil avec 200 millions d’habitants, votera par exemple pendant les sept jours.

Chaque vote compte

La Commission électorale indienne, qui supervise le scrutin, doit s’assurer qu’un isoloir est disponible à moins de deux kilomètres de chaque électeur.

« Les fonctionnaires électoraux doivent se déplacer très loin pour s’assurer qu’un seul électeur puisse exercer son droit de vote », a rappelé Chakshu Roy de PRS Legislative Research, un groupe de réflexion indépendant.

Quelque 15 millions d’agents électoraux et d’agents de sécurité traverseront les déserts et les montagnes du pays ― parfois en bateau, à pied et même à cheval ― pour tenter d’atteindre chaque électeur.

La tâche peut s’avérer particulièrement ardue. En 2019, lors des dernières élections en Inde, une équipe d’agents électoraux a parcouru plus de 480 kilomètres pendant quatre jours pour qu’un seul électeur d’un hameau de l’État reculé d’Arunachal Pradesh, frontalier de la Chine, puisse exercer son droit.

En 2019, des fonctionnaires se sont également rendus dans un village situé dans les hauteurs de l’Himalaya pour installer un isoloir à 4650 mètres d’altitude, soit le bureau de vote le plus haut du monde.

Cette fois encore, des bureaux de vote seront installés dans des endroits reculés, dont un à l’intérieur d’une réserve naturelle dans le sud de l’État du Kerala et un autre dans un conteneur d’expédition dans l’ouest de l’État du Gujarat.

Sécurité renforcée

Selon les experts, la sécurité est l’une des principales raisons de la tenue d’élections en plusieurs phases en Inde.

Des dizaines de milliers de membres des forces de sécurité fédérales, qui gardent habituellement les frontières, par exemple, sont libérés et déployés aux côtés de la police des États pour prévenir les violences et transporter les responsables électoraux et les machines à voter.

Des affrontements meurtriers impliquant des partisans de partis politiques rivaux, notamment dans l’État du Bengale-Occidental, dans l’est du pays, avaient entaché les élections précédentes. Mais ces violences ont diminué au fil des ans, grâce à un dispositif de sécurité renforcé, et le scrutin s’est déroulé dans un calme relatif.

« Regardez la géographie du pays… il y a des rivières, des montagnes, de la neige, des jungles… pensez aux mouvements des forces de sécurité. Elles devront parcourir tout le pays, a expliqué samedi Rajiv Kumar, le commissaire électoral en chef. Nous ferons le maximum pour que les électeurs n’aient pas à le faire. »