(Pékin) Entre sept mois et trois ans de prison : la justice chinoise a condamné mercredi de façon relativement clémente 10 Hongkongais qui avaient tenté de fuir leur ville en bateau, après des appels occidentaux à les libérer.

Ces personnes militant pour la démocratie avaient quitté ce territoire autonome chinois après que Pékin eut imposé en juin une loi draconienne sur la sécurité nationale à Hong Kong. Elles voulaient se réfugier à Taïwan.  

Ces militants avaient été arrêtés en mer le 23 août par la police maritime chinoise à 70 km des côtes hongkongaises, avant d’être placés en détention à Shenzhen (sud) en Chine continentale. Leur procès s’est déroulé lundi.

Voyant en ces Hongkongais les victimes d’une « tyrannie » mise en place par Pékin à Hong Kong depuis juin, les États-Unis avaient demandé leur libération immédiate. L’Union européenne exigeait « leur retour rapide » sur le sol hongkongais.

Le ministre britannique des Affaires étrangères Dominic Raab avait de son côté déclaré que le Royaume-Uni, l’ex-puissance coloniale à Hong Kong, était « profondément préoccupé » par le fait que les militants avaient « été jugés au secret ».

Deux des Hongkongais se sont vus infliger respectivement trois et deux ans de prison en raison de leur rôle d’« organisateur dans ce passage illégal de frontière », a annoncé mercredi le tribunal du district de Yantian à Shenzhen, où ils étaient jugés.

Ils encouraient jusqu’à sept ans de détention.  

Justice opaque

Huit autres hommes, de simples passagers, ont été condamnés à sept mois de prison pour « passage illégal de frontière ». La peine maximale prévue était d’un an.

Ils devraient pouvoir sortir de prison dans trois mois si la justice prend en compte le temps qu’ils ont passé en détention préventive.

Ces 10 adultes ont « reconnu leur culpabilité » au cours du procès, a assuré le tribunal, ce qui explique en partie la relative légèreté des peines.

Concrètement, la justice leur reprochait le passage sans autorisation de Hong Kong à la Chine continentale. Un trajet qui requiert la détention d’un permis spécial et une entrée par un poste-frontière réglementaire.

Par ailleurs, deux mineurs de 17 et 18 ans qui étaient également à bord de l’embarcation ont été remis mercredi aux autorités de Hong Kong.  

Aucune charge n’a été retenue contre eux pour la fuite en bateau, notamment car ils avaient eux aussi reconnu leur culpabilité. Ils restent poursuivis à Hong Kong en lien avec une tentative d’incendie volontaire.

Conformément aux habitudes d’une justice chinoise opaque et politisée, le procès des 10 hongkongais n’était pas ouvert à la presse étrangère. Et les familles n’ont été informées de la date de l’audience que trois jours à l’avance.

Par ailleurs, les avocats choisis par les proches des détenus n’ont pas pu rencontrer les accusés, la Chine leur ayant désigné des avocats commis d’office.

« Contrevenants »

« Les autorités chinoises ont une fois de plus montré au monde que les militants politiques ne peuvent bénéficier d’un procès équitable », a réagi l’organisation britannique de défense des droits de l’Homme Amnistie internationale.

« Les lois doivent être appliquées et les contrevenants doivent répondre de leurs actes », a répliqué mercredi devant la presse Wang Wenbin, le porte-parole de la diplomatie chinoise.

Certains des Hongkongais condamnés mercredi étaient déjà menacés de poursuites à Hong Kong pour leur implication dans les immenses manifestations ayant secoué cette ville l’an dernier.

La contestation a été étouffée début 2020 par les confinements liés à la COVID-19, puis par l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur la « sécurité nationale » taillée sur mesure pour le territoire.

Du point de vue de Pékin, il s’agit d’assurer la stabilité, de mettre fin au vandalisme et aux violences ayant émaillé les manifestations, ainsi que d’y réprimer le courant militant pour l’indépendance, une ligne rouge absolue pour le pouvoir.

Les détracteurs de la loi estiment qu’elle a réduit à néant les libertés du territoire, garanties au moment de sa rétrocession à la Chine par le Royaume-Uni en 1997.

Depuis plus de 20 ans, Hong Kong jouit d’une large autonomie. En vertu du principe « Un pays, deux systèmes », ses habitants bénéficient en théorie de la liberté d’expression, de la liberté de la presse et d’une justice indépendante.