(Nairobi) Un homme a été tué par balle vendredi au Kenya, où se déroulaient des manifestations anti-gouvernementales contre le coût de la vie et de nouvelles taxes.

La police kényane a tiré auparavant des gaz lacrymogènes contre le convoi du chef de l’opposition Raila Odinga à Nairobi, une des villes où se déroulaient des manifestations.  

La police a pris des mesures semblables pour disperser des rassemblements dans la ville de Kisumu, alors que des groupes de défense des droits condamnaient des « arrestations arbitraires ».

« Une personne est décédée des suites de blessures par balle », a déclaré Alex Ochieng, un responsable au sein de l’hôpital Jaramogi Oginga Odinga à Kisumu, précisant que la personne tuée était un homme.

« Nous avons deux autres personnes blessées par balle et quatre qui ont été touchées par des objets contondants », a-t-il déclaré aux journalistes.

Un journaliste de l’AFP a également vu la police procéder à plusieurs arrestations à Nairobi, la sécurité étant renforcée pour la dernière série de manifestations appelées par M. Odinga cette année contre la politique du président William Ruto.

PHOTO BRIAN INGANGA, ASSOCIATED PRESS

Le leader de l’opposition kényane Raila Odinga s’adresse à ses partisans.

Raila Odinga, chef de l’opposition et candidat malheureux à la présidentielle de 2022 face à William Ruto, a annoncé lors du rassemblement à Nairobi son intention de recueillir 10 millions de signatures pour démettre de ses fonctions son rival.

« Les Kényans ont élu des dirigeants au parlement et ils les ont trahis », a-t-il lancé sous des applaudissements.  

« Ruto lui-même, qui a pris le pouvoir illégalement, a trahi les Kényans », a ajouté l’ancien candidat, selon lequel l’élection d’août 2022 lui a été « volée ».

La police a également fait usage de gaz lacrymogène pour disperser des manifestants dans la ville portuaire de Mombasa notamment, selon des images diffusées par la télévision, tandis que les protestataires scandaient « La lutte n’est pas finie ».

Dans un communiqué, plusieurs organisations de défense des droits humains, dont la Commission kényane des droits humains, ont dénoncé les « blessures et arrestations arbitraires contre des manifestants pacifiques », évoquant des manifestants « traînés au sol » à Nairobi.  

Amnistie internationale a évoqué « une force excessive sélective » déployée par la police.

L’alliance Azimio de Raila Odinga, qui avait appelé à ces manifestations contre l’impact des nouvelles taxes sur les Kenyans, a annoncé vendredi une nouvelle action de protestation mercredi à Nairobi, souhaitant « des manifestations dans tout le pays ».

Prix élevés

« Ruto nous impose des taxes sans notre consentement et fait des lois qui rendent la vie beaucoup plus compliquée », a dénoncé Azimio dans un communiqué publié cette semaine.  

« J’espère que cette manifestation va changer quelque chose », a dit à l’AFP Alex Dwisa, un ouvrier de 24 ans. « Le coût de la vie est trop élevé, je n’ai pas 10 k (10 000 shillings kényans, 94 dollars canadiens) pour envoyer mes deux enfants à l’école », a-t-il déploré.

Entre mars et mai, la coalition d’opposition avait organisé des manifestations antigouvernementales qui ont fait, selon les autorités, trois morts.

La semaine dernière, le président a promulgué une loi de finances qui instaure une série de nouvelles taxes, malgré les critiques de l’opposition et de la population de ce pays touché par une forte inflation.

Le texte prévoit notamment une hausse de la TVA sur les carburants de 8 à 16 %, ainsi qu’un impopulaire prélèvement sur les salaires afin de financer un programme de logement à bas prix. Initialement prévu à 3 %, il a été réduit à 1,5 %.

Dans un contexte économique marqué par une inflation persistante (+7,9 % sur un an en juin), William Ruto cherche à générer plus de 2,1 milliards de dollars afin de renflouer les caisses de l’État, lourdement endetté notamment par les grands projets d’infrastructure de son prédécesseur Uhuru Kenyatta, dont il fut le vice-président.  

Mais vendredi dernier, le tribunal de Nairobi a suspendu la mise en œuvre de la législation après qu’un sénateur eut déposé une plainte contestant sa légalité constitutionnelle.

En dépit de cette décision, le régulateur national de l’énergie a annoncé plus tard dans la journée une hausse des prix à la pompe pour tenir compte du doublement de la TVA à 16 %, comme stipulé dans la loi.