En 17 ans de carrière à titre d'observateur électoral, Jacques Paquette a fait plus d'une vingtaine de missions, dans des pays qui figurent parmi les plus mal en point de la planète. Mais pour lui, les élections afghanes, c'est du jamais vu.

L'insécurité complique énormément le travail des observateurs. «Nous circulons dans des voitures blindées et on ne voit pas grand-chose», a confié cet avocat québécois dans une entrevue téléphonique, hier.

 

Jacques Paquette fait partie de la mission d'observation de l'Union européenne. Accompagné d'un collègue suisse, il est posté à Jalalabad, dans le nord-est du pays.

Cette région voisine du Pakistan constitue l'un des fiefs des talibans. Depuis que des candidats aux élections ont été attaqués sur la route qui mène vers la province de Kounar, au nord de Jalalabad, les observateurs internationaux ne quittent plus la ville. Et même à Jalalabad, ils doivent se soumettre à des règles de sécurité ultra strictes. En fait, ils évitent de mettre le pied dans la rue.

«C'est sûr qu'on ne peut pas en faire autant que ce qu'on fait ailleurs», a résumé laconiquement Jacques Paquette.

Un rassemblement partisan a eu lieu, récemment, dans un stade voisin de son bureau. «Nous n'avons pas pu nous y rendre, on a dû envoyer des interprètes.»

Pourtant, Jacques Paquette se rappelle avoir facilement assisté à des rassemblements du Hamas, lors d'élections palestiniennes.

La situation sera encore plus volatile aujourd'hui, jour du vote, alors que les talibans menacent d'attaquer des bureaux de scrutin. Habituellement, les observateurs internationaux assistent jusqu'à la fin du dépouillement des bulletins de vote et suivent le responsable du scrutin jusqu'au bureau du directeur des élections.

Mais aujourd'hui, pour des raisons de sécurité, Jacques Paquette et ses collègues devront quitter les bureaux de scrutin à 18h30 - soit à peine deux heure et demie après la fin du vote.

Le décompte des voix pour la présidentielle se poursuivra sans eux. Et ils ne reviendront que demain matin pour suivre le dépouillement des votes pour les élections provinciales.

Jacques Paquette a observé le déroulement d'élections au Liban, au Pakistan, en Palestine et en République démocratique du Congo, pour ne citer que ces pays. «Cette mission est la plus dangereuse», a-t-il confié.

Cela ne signifie pas qu'il ne puisse rien documenter du tout. Ainsi, mardi, il a pris note de la plainte d'une candidate qui a eu de la difficulté à obtenir la surveillance policière gratuite à laquelle elle devait avoir droit.

Mais globalement, a-t-il déploré, «on ne voit pas grand-chose du pays, et on reste enfermés entre quatre murs». Comment les observateurs feront-ils pour bien documenter le déroulement du scrutin? «On fait avec ce qu'on a», a conclu M. Paquette avec philosophie.