(Washington) La Cour suprême des États-Unis a rejeté jeudi un recours contre une carte électorale de l’État de Caroline du Sud, accusée par des organisations de défense des droits civiques d’avoir été tracée en fonction de considérations raciales.

Le président démocrate Joe Biden a dénoncé une décision qui «  sape le principe élémentaire selon lequel les pratiques électorales ne doivent pas discriminer en fonction de la race ».

Cette affaire épineuse pourrait aider à déterminer qui, des démocrates ou des républicains, contrôlera la Chambre américaine des représentants l’an prochain.

La Cour suprême, dominée par des juges conservateurs, a décidé à six contre trois qu’une carte électorale élaborée par l’assemblée à majorité républicaine de Caroline du Sud ne constituait pas de « gerrymandering » illégal.

Le « gerrymandering » est un découpage électoral partisan, consistant à déplacer les frontières des circonscriptions au gré des intérêts de la formation au pouvoir. Il est prohibé lorsqu’il se fait sur des bases raciales.

Plusieurs batailles judiciaires sont en cours aux États-Unis au sujet de cette pratique qui peut diluer le vote de minorités.

Dans l’affaire de Caroline du Sud, un panel fédéral de trois juges avait décidé en janvier 2023 qu’un redécoupage effectué après le recensement de 2020 était illégal, car établi sur des critères raciaux, ordonnant qu’il soit redessiné avant les élections de novembre 2024.

La majorité républicaine est accusée d’avoir « blanchi » une circonscription en plaçant 30 000 Afro-Américains dans une circonscription ayant déjà une majorité noire.

Les Afro-Américains ont tendance à voter démocrate dans leur grande majorité.

L’assemblée de Caroline du Sud avait déposé un recours contre la décision de première instance et l’affaire a fini devant la Cour suprême.

« Dangereux schéma »

Cette dernière, dans un avis rédigé par le juge ultraconservateur Samuel Alito, a déclaré que la conclusion du premier tribunal selon laquelle le critère racial était prédominant dans le redécoupage de la carte était « clairement erronée ».

« Le redécoupage est une entreprise inévitablement politique », a dit M. Alito, et « un corps législatif peut poursuivre des objectifs partisans lorsqu’il s’engage dans un redécoupage ».

« Là où la race et la politique sont fortement corrélées, une carte qui a fait l’objet de gerrymandering dans un but partisan peut beaucoup ressembler à une carte découpée selon des critères raciaux », a-t-il poursuivi.

Les cinq autres juges conservateurs de la Cour ont rejoint M. Alito. Les trois progressistes ont fait part de leur différence d’opinions.

La juge Elena Kagan a ainsi qualifié la décision de la Cour de « mauvaise ».

« Et donc cette pratique “odieuse” de tri des citoyens, fondée sur des généralisations raciales et exploitant les divisions raciales, continuera », a-t-elle fustigé.

Les républicains ont aujourd’hui une très étroite majorité à la Chambre des représentants. Une augmentation du nombre de circonscriptions à majorité noire pourrait faire pencher la balance lors des législatives de novembre.

La décision de la Cour suprême « menace la capacité des habitants de Caroline du Sud à faire entendre leur voix dans les urnes », a encore estimé le président Biden dans son communiqué.

Le redécoupage maintenu par « la Cour fait partie d’un dangereux schéma de tentatives de gerrymandering racial de la part des élus républicains pour diluer la volonté des électeurs noirs », a-t-il affirmé.