Des affrontements ont opposé dimanche au Caire des éleveurs de porcs à des policiers venus prendre leurs animaux pour les faire abattre dans le cadre de l'élimination de tout le cheptel porcin égyptien décidée alors que la grippe porcine se propage dans de nombreux autres pays.

Trois à quatre cents résidents de Manchiyet Nasr, un quartier de la colline du Moqattam (sud) habité majoritairement par des chiffonniers chrétiens coptes, ont accueilli par des jets de pierres et de bouteilles des policiers dépêchés sur les lieux en mi-journée, selon un journaliste de l'AFP sur place. Quelques centaines de policiers des forces anti-émeutes ont alors répliqué en lançant des gaz lacrymogènes et tirant des balles en caoutchouc contre les manifestants, pour la plupart des jeunes gens.

«Nous ne les laisserons jamais entrer dans notre quartier, ils veulent nous voler notre gagne-pain», a déclaré à l'AFP un de ces éleveurs, Adel Izhak. Mais, la police a fini par pénétrer dans le quartier en début d'après-midi.

Alors qu'un poste de contrôle de police, à l'orée du quartier, avait été détruit par les manifestants, un officier a tiré en l'air un coup de semonce à balles réelles.

L'Égypte a commencé samedi l'abattage des cochons élevés sur son territoire, une mesure radicale et controversée prise mercredi contre la grippe porcine alors que des cas de cette grippe se multipliaient à travers le monde.

Deux manifestants au moins ont été blessés, selon le journaliste de l'AFP, alors qu'une ambulance sillonnait les abords de ce quartier où résident environ 35 000 chiffonniers ou «zabbaline», une communauté qui trie sur place les ordures et élève quelque 60 000 porcs.

Des incidents ont aussi éclaté de nouveau entre éleveurs de porcs et policiers à Khanka, dans le gouvernorat de Qalioubiya, à 25 km au nord du Caire, a-t-on appris d'une source des services de sécurité.

Des policiers avaient du rebrousser chemin devant cette localité après avoir reçu des jets de pierre mercredi, au premier jour de l'annonce de la décision controversée du gouvernement égyptien.

Des critiques ont fusé contre une telle mesure dans un pays où aucun cas animal ou humain n'a pour l'instant été déclaré, d'autant plus que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a indiqué n'avoir connaissance d'«aucune personne contaminée par des porcs».

Les autorités égyptiennes avaient d'abord présenté la mesure d'abattage comme une précaution face à la grippe porcine, avant d'affirmer qu'il s'agissait d'éradiquer des élevages insalubres.

La majorité des 80 millions d'Egyptiens sont des musulmans, dont la religion interdit de manger du porc considéré comme «impur».

Les chrétiens coptes, qui eux élèvent et consomment du porc, constituent de 6 à 10% de la population selon les estimations.

Selon Adel Izhak, un éleveur de porc, les autorités «veulent se débarrasser des cochons parce que cet animal est interdit par l'Islam et qu'ils disent que l'Égypte est un pays islamique».

Mais après avoir affirmé que l'abattage des porcs allait se faire immédiatement, les autorités ont admis qu'il faudrait environ six mois aux abattoirs pour venir à bout de tout le cheptel porcin.

Le ministre de l'Agriculture, Amine Abaza, a annoncé que l'Égypte devrait importer trois nouvelles machines spéciales pour parvenir à une capacité d'abattage de 3 000 porcs par jour.

Selon le quotidien gouvernemental Al-Ahram, le barème de dédommagements prévoit 100 livres (14 euros) de compensation pour chaque porc abattu, 250 pour une femelle (35 euros)