Un matin de décembre, et comme chaque matin en me réveillant, je prends mon cellulaire et je vérifie les données médicales de mon fils lourdement handicapé. Du haut de ses 16 ans, il a les mêmes besoins qu’un bébé de 2 ans. À la loterie des complexités médicales, il a gagné plusieurs fois depuis sa naissance.

En plus de sa maladie génétique qui est si rare qu’elle n’a pas de nom, il est diabétique de type 1, son pancréas ayant décidé de l’abandonner lorsqu’il avait 9 ans. Depuis, je vérifie plusieurs fois par jour ses glycémies grâce à mon cellulaire. Ce matin-là, l’application ne me donne aucun résultat. Je passe rapidement à l’application suivante, permettant de voir fiston grâce à une caméra installée dans sa chambre.

Et là, je fige. Mon fils ne bouge pas, il a les yeux grands ouverts qui ne clignent pas depuis plusieurs secondes. Mon cœur s’emballe, mon sang se glace, je retiens ma respiration sans m’en rendre compte. Ce moment inévitable que je redoute depuis quelques années est arrivé ; mon fils est mort dans son sommeil. Mon corps tremblant réussit à s’extirper du lit. Je trouve mon mari sur le divan. Je suis affolée, les mots sortent de ma bouche en catastrophe. C’est lui qui trouve le courage d’entrer dans sa chambre. Mon fils cligne des yeux et il s’amuse même à faire des pets sur son bras. C’est l’application qui faisait défaut. Je respire à nouveau et je m’effondre. Cette vie n’est pas une vie. C’est une torture, malgré tout l’amour que j’ai pour cet enfant.

Savez-vous ce qu’ont en commun les parents d’enfants lourdement handicapés ? Nous avons peur de perdre notre enfant.

Nous accumulons les troubles du stress post-traumatique à force de vivre des moments traumatisants. Nous avons en commun d’être épuisés par les nombreux rendez-vous médicaux, par les batailles afin d’obtenir des services, par les soins à apporter à notre enfant au quotidien, et ce, jour et nuit, 365 jours par année. Nous avons aussi en commun de vivre un stress financier important. Parce que trop souvent, l’un des deux parents doit cesser de travailler, ou encore travailler à temps partiel pour y arriver.

Que peut-on faire pour mieux nous soutenir ? C’est simple : offrir des services d’aide à domicile adéquats.

C’est pourquoi L’Étoile de Pacho, un organisme qui accompagne les parents d’enfants lourdement handicapés, demande au gouvernement du Québec d’assurer un meilleur arrimage entre les programmes existants, pour permettre aux parents de recevoir systématiquement tout le répit à domicile auquel ils ont droit et ainsi accompagner dignement leurs enfants sans compromettre leur santé mentale et physique. L’organisme a d’ailleurs déposé une pétition à l’Assemblée nationale à cet effet.

L’Étoile de Pacho propose une solution simple au gouvernement afin de s’assurer que ces derniers puissent accéder à des services de répit à domicile de façon égale à travers le Québec. Depuis la pandémie, le ministre de la Santé ne jure que par le virage des soins à domicile, et bien que nous soyons en accord, la réalité du terrain est tout autre. Des milliers de parents ayant un enfant lourdement handicapé sont en attente de services. Nous méritons d’être soutenus dans notre rôle de parent proche aidant.

Le ministère des Finances confirme que les sommes nécessaires au répit à domicile sont bien budgétées et que la problématique serait plutôt du côté de l’accessibilité au programme. En attendant, les différents ministères se relancent la balle alors que nous sommes des milliers de familles à souffrir.

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