Les approches adoptées par les différents gouvernements pour faire face à la pandémie sont multiples et ont visé différents objectifs. Mais qu’est-ce qui détermine le succès d’une stratégie ? Le faible taux de mortalité ? Le fort taux de vaccination ? La stabilité du produit intérieur brut après des mois de turbulences ? Coup d’œil sur des États qui s’en sont (un peu) mieux sortis que d’autres.

Norvège : solidaires et sociodémocrates

En Norvège comme au Québec, la contagion au SARS-CoV-2 s’est rapidement répandue en mars 2020, au retour de la semaine de relâche scolaire – dans leur cas, par des skieurs qui revenaient des stations du nord de l’Italie. Un confinement semblable au Québec a ensuite été instauré. Mais là s’arrêtent les comparaisons, car contrairement au Québec, ainsi qu’à ses voisins nordiques du Danemark et de la Suède, le taux de mortalité en Norvège a été beaucoup, beaucoup plus bas (à l’exception de la toute petite Islande). L’un des éléments de ce succès a été l’efficacité de la stratégie de communication adoptée par la première ministre, Erna Solberg, sur son compte Facebook, a montré une étude parue récemment. Ses messages ont mis l’accent sur la solidarité, le courage. « Les citoyens des États sociodémocrates affichent le plus fort degré de confiance dans leurs gouvernements », rappelle la chercheuse Raluca Bejan, de l’Université Dalhousie, coautrice d’une étude comparative sur la gestion de la pandémie pendant la troisième vague au printemps 2021. « Les pays riches, plus égalitaires, où le degré de confiance dans le gouvernement est élevé, et où on dépense davantage sur les soins de santé, tendent à faire mieux que les autres. » Au début de février, la Norvège a annoncé que la COVID-19 n’était plus une « menace importante » pour son système de santé et a levé la majorité des consignes sanitaires.

  • Norvège : 298 morts par million
  • Québec : 1641 morts par million
  • Canada : 977 morts par million

Minnesota et Utah : au sommet du palmarès américain

PHOTO ELIZABETH FLORES, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Des voyageurs se font dépister à l’aéroport international de Minneapolis-Saint Paul, au Minnesota, le 12 novembre 2020.

Parmi les 50 États américains – et les 50 façons et plus de gérer la pandémie –, le Minnesota et l’Utah sont parmi ceux qui s’en sont relativement le mieux sortis, lorsqu’on tient compte à la fois des indicateurs de santé et d’économie, selon un bilan dressé par le magazine Politico en décembre. Le Vermont obtient l’un des plus hauts taux de vaccination et les plus faibles taux de mortalité au pays, mais il s’agit aussi d’un État rural et peu populeux. Des États comme l’Arkansas, l’Iowa, l’Idaho, le Dakota du Sud ou le Mississippi qui ont imposé peu de consignes sanitaires ont subi davantage de mortalité, mais leur économie a mieux résisté. Hawaii est l’endroit qui a le mieux aidé financièrement ses citoyens, mais son économie, largement basée sur le tourisme, s’est effondrée. En entrevue avec Politico, le gouverneur démocrate du Minnesota, Tim Walz, a expliqué que son équipe avait fait le choix délibéré de tenir compte des conséquences de chaque décision sur l’ensemble de la société, même si des mesures impopulaires comme le port du masque et des couvre-feux ont dû être imposées. « J’en étais rendu à dire aux gens : s’il vous plaît, portez le masque et, ainsi, vous vivrez assez longtemps pour voter contre moi… »

Rwanda : de l’importance de la logistique

PHOTO JEAN BIZIMANA, ARCHIVES REUTERS

Des voyageurs attendent dans un site de dépistage de la COVID-19 au poste frontalier de Gatuna à Gicumbi, au Rwanda, le 31 janvier.

En Afrique subsaharienne, le Rwanda se distingue particulièrement dans la course à la vaccination : les deux tiers de sa population a reçu au moins une dose de vaccin, et près de 60 % en a reçu deux, un score supérieur à celui de nombreux États américains du centre et du Sud… L’une des raisons de l’efficacité de la campagne vaccinale rwandaise, qui dépend largement des dons de la centrale COVAX, est notamment d’avoir établi avec précision le nombre de doses requises dans chaque quartier avant la distribution, en tenant compte des caractéristiques de la population qui y vit et de la disponibilité du personnel pour y administrer les vaccins. Ailleurs dans la région, ce sont justement ces problèmes de logistique qui ont ralenti le déploiement de la campagne.

Pourcentage de la population qui a reçu au moins une dose :

  • Rwanda : 66 %
  • Québec : 86 %

Corée du Sud : tous contre le virus

PHOTO ED JONES, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Une affiche met en garde contre la COVID-19 à Séoul, en Corée du Sud, le 26 novembre 2020.

Au tout début de la pandémie, l’agressivité de la stratégie sud-coréenne a suscité l’admiration des observateurs. Celle-ci s’est déclinée en trois T : tester, tracer et traiter. Les images des automobilistes allant se faire tester lors de la mise en place des premières cliniques de dépistage au volant ou l’adoption rapide d’une application pour retrouver les contacts infectés, ainsi que l’isolement des cas confirmés sous supervision de l’État, ont inspiré de nombreux gouvernements. Cette stratégie s’est avérée redoutablement efficace… jusqu’à l’arrivée du variant Omicron. Comme ailleurs, le système de santé sud-coréen a été submergé par la vague d’infections depuis le début de 2022, et le gouvernement a changé de cap : il fallait maintenant « sélectionner et cibler ». Les ressources médicales sont réservées aux plus vulnérables, et les autres personnes infectées sont renvoyées à la maison afin de se soigner elles-mêmes – certains citoyens se sont ainsi sentis « abandonnés » par l’État. Comme les autorités prévoient que le pic de la vague Omicron n’a pas encore été atteint, un couvre-feu et des restrictions sur les rassemblements privés resteront vraisemblablement en place pour le mois de mars.

L’effondrement de la stratégie « zéro COVID-19 »

PHOTO CHINATOPIX/ASSOCIATED PRESS

Des gens faisaient la file samedi pour se faire dépister à Changchun, en Chine.

Fermeture des frontières à double tour, confinements prolongés pour des millions de citoyens, dépistage à (très) grande échelle dès qu’un cas était repéré… La stratégie « zéro COVID-19 » adoptée par certains pays, surtout en Asie, a, pendant plusieurs mois, été considérée comme une formule gagnante pour assommer le virus tout en limitant les répercussions sociales. Mais si ces pays ont ainsi réussi à contrôler la propagation du virus pendant plusieurs mois, l’émergence du variant Delta, puis d’Omicron, a fait éclater les barrières les plus étanches. La Nouvelle-Zélande a finalement abandonné cette stratégie à l’automne 2021, en même temps que d’autres pays comme le Viêtnam, Singapour et plusieurs régions d’Australie. La Chine, quant à elle, continue d’appliquer la stratégie « zéro COVID-19 ». À Xi’an, les 13 millions de citoyens ont été confinés pendant un mois après la découverte d’une éclosion en décembre ! À Hong Kong, les autorités tentaient de contrôler en février une montée soudaine des contaminations. Moins de la moitié des personnes âgées de plus de 80 ans avaient reçu une dose de vaccin (oui, oui, une seule dose), selon les données du gouvernement.