Le nombre de patients qui peuvent recevoir le Paxlovid en cas de test COVID-19 positif a été élargi jeudi par le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Mais son accès demeure très limité : entre le moment où la maladie est détectée et celui où le traitement est approuvé pour un patient, il est souvent trop tard.

Le hic ? De 40 à 50 molécules – des médicaments et des suppléments en vente libre – sont susceptibles d’interagir avec le Paxlovid et d’en empêcher l’ordonnance pour traiter la COVID-19, explique Makeda Semret, directrice du Programme d’antibiogouvernance au Centre universitaire de santé McGill (CUSM). Or, l’évaluation par un pharmacien du dossier de chaque patient potentiel prend du temps, alors que le Paxlovid réduit de plus de 89 % le risque d’hospitalisation s’il est pris dans les cinq premiers jours après le début des symptômes, selon un essai mené par Pfizer auprès de non-vaccinés.

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Certains patients n’ont pas pu avoir du Paxlovid parce que plus de cinq jours s’étaient écoulés depuis le début des symptômes au moment où le pharmacien a donné son feu vert, selon la Dre Semret.

PHOTO TIRÉE DU SITE DU CUSM

La Dre Makeda Semret, directrice du Programme d’antibiogouvernance au CUSM

« Il faut une évaluation par un pharmacien qui connaît bien le Paxlovid. Dans certains cas, il faut interrompre le traitement avec un autre médicament, dans d’autres, on peut simplement baisser la dose du médicament avec lequel il y a une interaction. Mais pour certains patients, une interruption ou une baisse de dose n’est pas possible. »

Le Paxlovid a été autorisé aux États-Unis à la fin de décembre et au Canada à la mi-janvier. À cause de stocks limités, le Québec l’avait, au départ, réservé aux patients immunosupprimés et aux patients non adéquatement vaccinés ayant des facteurs de risque. Jeudi, les patients adéquatement vaccinés ayant certains facteurs de risque ont été ajoutés à la population ayant accès au Paxlovid.

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Les anticorps monoclonaux sont souvent préférés au Paxlovid parce que leur efficacité est presque aussi bonne, selon la Dre Semret, et qu’ils n’ont pas le même problème d’interaction médicamenteuse. Le Paxlovid se prend sous forme de pilule, à la maison. Il est livré au patient par l’une des 65 pharmacies désignées par le ministère provincial de la Santé comme point de distribution. Les anticorps monoclonaux se donnent aussi dans les jours qui suivent l’apparition des symptômes de la COVID-19, par transfusion intraveineuse.

Les patients admissibles aux anticorps monoclonaux et au Paxlovid sont les mêmes. À noter, de nombreux anticorps monoclonaux auparavant efficaces contre la COVID-19 ne le sont pas contre le variant Omicron.

Faciliter la prise de décision

La prise en charge de l’évaluation des interactions médicamenteuses par le médecin de famille serait « une situation idéale », selon l’infectiologue Andrew Morris, de l’Université de Toronto, qui est l’un des responsables du comité ontarien de distribution du Paxlovid et des anticorps monoclonaux. « Ils pourraient le faire à l’avance, pour agir rapidement s’il y a un test positif de COVID-19. En même temps, il faudra éviter qu’on utilise le Paxlovid pour des patients qui n’en ont pas besoin. Avant la COVID-19, j’étais spécialiste de la résistance aux antibiotiques. Alors je suis inquiet qu’il apparaisse une résistance à cet antiviral. »

Benoît Morin, président de l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP), pense que les médecins de famille pourraient appeler le pharmacien de leurs patients à risque pour voir ce qu’il en est des interactions médicamenteuses avec le Paxlovid.

De cette manière, en cas de test positif, ils sauraient tout de suite s’il faut aller vers le Paxlovid ou les anticorps monoclonaux.

C’est déjà le cas aux États-Unis, note le DRaymund Razonable, de la célèbre clinique Mayo au Minnesota, même si la situation varie d’un État à l’autre. Le DRazonable vient de publier une étude confirmant la validité d’un outil permettant de savoir qui peut avoir accès aux anticorps monoclonaux. Cet outil de la FDA, appelé MASS, consiste en un pointage pour différents facteurs de risque. En cas de pénurie de médicaments, on rehausse le seuil minimum pour recevoir les antiviraux ou les anticorps monoclonaux, explique le DRazonable.

Le Programme d’antibiogouvernance du CUSM a mis en ligne un « arbre de décision » qui permet de voir quels traitements pour la COVID-19 sont appropriés, et qui suscite beaucoup d’intérêt auprès des autres hôpitaux, selon la Dre Semret. Une trentaine de médecins de l’extérieur du CUSM appellent chaque jour le numéro du Programme d’antibiogouvernance pour savoir si leurs patients sont admissibles au Paxlovid ou aux anticorps monoclonaux. « Dans deux cas sur trois, ce sont des patients qui n’ont pas encore de test positif », dit la Dre Semret.

Le Québec a reçu en janvier 6300 traitements de Paxlovid et devrait en recevoir 6200 en février et 19 000 en mars.

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  • 91 %
    Augmentation du risque de contracter une forme grave de la COVID-19 liée à l’immunosuppression
    SOURCE : CDC
    69 % 
    Augmentation du risque de contracter une forme grave de la COVID-19 liée à des problèmes pulmonaires chroniques
    SOURCE : CDC