La famille de Mélissa Benoît, comme de très nombreuses autres familles depuis un mois, a reçu la COVID-19 en cadeau à la fin de l’année. Deux quadragénaires et une septuagénaire doublement vaccinés, un enfant qui a reçu une seule dose, et un bambin encore trop jeune pour être vacciné ont tous chopé le satané virus.

Maintenant que tout ce beau monde est rétabli (ou en voie de l’être), Mme Benoît se pose la question : qu’arrive-t-il avec la troisième dose, ou la deuxième dans le cas de son aîné ? Faut-il aller la chercher comme prévu en janvier ? « J’ai fouillé, mais je n’ai pas trouvé de réponses à ces questions précisément, qui sont peut-être le portrait (imprévu) de plusieurs familles actuellement », nous écrit-elle.

Réponse courte : après s’être remis d’une infection, il n’y a aucune urgence à recevoir une nouvelle dose de vaccin. Dans tous les cas, il vaut mieux attendre au moins huit semaines après une infection avant d’aller se faire vacciner.

Jetons justement un coup d’œil sur les situations devant lesquelles se retrouvent bon nombre de personnes infectées en ce début d’année.

1. Personne doublement vaccinée, qui a été infectée dans le dernier mois

« Si une personne a eu deux doses de vaccin et une infection, on considère qu’elle a le même niveau de protection qu’avec trois doses de vaccin », dit le DGaston De Serres, de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ). « Évidemment, on ne leur interdit pas d’aller chercher une autre dose de vaccin, mais on leur demande d’attendre trois mois, ou au minimum huit semaines, après l’infection. »

PHOTO YAN DOUBLET, ARCHIVES LE SOLEIL

Le DGaston De Serres de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ)

Recevoir une dose de vaccin tout de suite après une infection n’est pas dangereux, mais c’est peu judicieux. « Quand notre système immunitaire vient tout juste d’être stimulé, ça ne sert à rien de donner une autre stimulation rapidement », dit le DDe Serres.

« Le système est déjà en pleine période de “consolidation de ses acquis”, il a développé une panoplie d’anticorps et de cellules qui contribuent à l’immunité cellulaire. » Bref, avec un niveau d’anticorps dans le tapis, pas besoin de se rendre sur Clic Santé avant plusieurs semaines.

2. Personne doublement vaccinée, qui a été infectée il y a plus d’un mois

Le 29 novembre, le premier cas d’infection au variant Omicron était confirmé au Québec. Le 15 décembre, la prévalence d’Omicron s’établissait à plus de 50 %, déclassant Delta qui régnait depuis la mi-août. Et le 2 janvier, cette prévalence s’établissait à 97,5 %. Mais est-ce important de savoir lequel des variants cause une infection ?

« On sait qu’en Afrique du Sud, les personnes qui ont attrapé Omicron ont des niveaux d’anticorps qui peuvent neutraliser Delta, dit le DDon Vinh, microbiologiste au Centre universitaire de santé McGill. Mais ce n’est pas nécessairement vrai dans le cas inverse. Ça veut dire qu’une infection avec un variant ne protège pas nécessairement contre tous les variants. »

Dans le doute, le DVinh suggère de recevoir une dose de rappel si l’infection remonte à plus de huit semaines. À noter que le Comité sur l’immunisation du Québec juge quant à lui qu’une dose de rappel chez les personnes doublement vaccinées ayant été infectées est « peu utile, quelle qu’ait été la séquence de l’infection et des deux vaccinations ».

3. Personne doublement vaccinée, qui n’a pas pu se faire tester malgré des symptômes

En raison de la rareté des tests rapides et des longues files aux centres de dépistage, bon nombre de personnes vont préférer rester à la maison avec leurs symptômes suspects, sans savoir si, finalement, c’était « ça » ou pas.

« Ces personnes ont deux choix, dit le DDe Serres. Ou bien elles se disent : “Je pense que c’était la COVID, mais dans le doute, je vais aller chercher ma dose de rappel.” Ou bien elles ont peu de doutes parce qu’elles ont développé des symptômes après qu’un proche a eu un résultat positif, que la probabilité d’avoir eu la COVID est donc très élevée, et qu’elles peuvent alors décider de repousser leur dose de rappel. » Par ailleurs, une fois Omicron vaincu, il y a très peu de risque d’être réinfecté par ce même variant, dit le DVinh.

4. Personne qui a reçu une seule dose et qui est en attente de la deuxième

C’est notamment le cas de nombreux enfants de 5 à 11 ans, qui ont reçu une dose avant les Fêtes (en plein au moment où Omicron se répandait) et qui doivent recevoir la deuxième en janvier. « Selon les données pédiatriques, une seule dose est suffisante lorsqu’elle est donnée au moins 21 jours après un test positif », observe le DJonathan Hudon, médecin de famille.

« Mais pour un enfant qui a eu la COVID en même temps que la première dose, ce n’est pas clair. Ça vaudrait donc la peine d’avoir une dose de rappel. » C’est d’ailleurs ce que suggère l’INSPQ, qui recommande alors d’attendre un bon huit semaines à partir de l’infection, et non de la première dose, pour administrer la deuxième.

5. Personne qui n’est pas vaccinée du tout

« Il y a de plus en plus de gens asymptomatiques », dit le DHudon, signe que beaucoup de vaccinés, même s’ils attrapent le virus, ne développent pas de symptômes puisqu’ils sont protégés. Le risque de contagion pour les non-vaccinés (dont les enfants de moins de 5 ans) est donc plus grand. « Mais si les gens n’ont pas encore compris que tout le monde va attraper la COVID, et à plusieurs reprises, je ne pense pas qu’ils vont finir par l’accepter. »

Si une personne infectée et non vaccinée souhaite recevoir le vaccin pour renforcer ses défenses avant la prochaine vague, elle doit attendre au moins huit semaines après l’infection, pour les raisons évoquées plus haut.

Attendre un vaccin conçu contre Omicron ?

La recette du vaccin n’a pas subi beaucoup de modifications depuis un an. Comme le variant Omicron est différent des autres, vaut-il mieux attendre une dose de rappel spécialement conçue contre ce variant, comme envisagent d’en produire les laboratoires ? « Mauvaise idée », répond le DDon Vinh. « Le vaccin actuel procure un niveau d’anticorps suffisant pour neutraliser Omicron, dit-il. Ça va prendre des mois avant qu’un nouveau vaccin soit offert. Et en attendant, vous risquez fort d’être infecté et de tomber malade. » La dose de rappel vise justement à ramener la quantité d’anticorps à un niveau suffisamment élevé pour mieux affronter le virus.