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Louis Routhier a eu une mauvaise surprise en voulant faire inscrire au registre québécois son vaccin reçu l’hiver passé aux États-Unis. Malgré sa preuve de vaccination certifiant qu’il avait bien reçu deux doses du vaccin de Pfizer, le personnel du centre de vaccination montréalais où il s’est rendu ne lui en a reconnu qu’une seule, la première. Raison : la deuxième dose a été administrée 18 jours après la première, un intervalle plus court que celui prescrit par le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec.

« J’ai demandé de plus amples explications, mais je n’ai pas eu de réponse, nous écrit M. Routhier. J’ai aussi demandé à qui on pouvait parler pour régler la situation, et on m’a répondu simplement : le gouvernement. »

En effet, le « gouvernement » – que ce soit Québec ou Ottawa – applique une série de critères avant de valider les vaccins que ses citoyens et résidents ont reçus à l’étranger. La durée de l’intervalle en fait partie.

Résumons la chose. Les vaccins contre la COVID-19 se donnent en deux doses, dans un intervalle qui varie selon le fabricant. Dans leur demande d’autorisation présentée à Santé Canada, les sociétés pharmaceutiques ont donné une recommandation basée sur les essais cliniques. Pfizer-BioNTech a fixé son intervalle à 21 jours, tandis que Moderna et AstraZeneca l’ont établi à 28 jours.

Si les États-Unis ont disposé de suffisamment de vaccins pour respecter cette recommandation, d’autres territoires (dont le Québec), aux prises avec une pénurie, ont plutôt choisi d’étirer l’intervalle pour vacciner le plus de gens possible avant de distribuer la deuxième dose.

Ce qui ne veut pas dire que le Québec ne reconnaît pas l’efficacité d’un vaccin reçu dans un intervalle beaucoup plus court, voire plus court que celui recommandé par les fabricants.

« Au Québec et au Canada, l’intervalle minimal pour considérer une dose comme valide est de 19 jours pour le vaccin de Pfizer et de 21 jours entre les doses pour le vaccin de Moderna », indique le DNicholas Brousseau, du Comité sur l’immunisation du Québec (CIQ).

En effet, dans l’étude de la troisième phase soumise par Pfizer-BioNTech pour démontrer l’efficacité de son vaccin, certains participants avaient été vaccinés à 19 jours, a noté le CIQ dans un avis publié l’hiver dernier. Cependant, « nous ne disposons pas de données sur la performance de la deuxième dose de vaccin avec un intervalle plus court », ajoute le DBrousseau.

Différences selon les pays

Les États-Unis, par contre, sont moins stricts quant à l’intervalle minimal à respecter.

Dans leurs recommandations sur la vaccination, les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) insistent sur l’importance de respecter le délai de 21 jours entre deux doses du vaccin de Pfizer. Ils reconnaissent toutefois une « période de grâce » correspondant à 4 jours avant la fin de l’intervalle recommandé, soit 17 jours. « S’il s’avère qu’une dose a été, par inadvertance, donnée durant la période de grâce […], la dose est considérée comme valide. »

Cette différence de mise en application de l’intervalle entre deux doses illustre d’ailleurs bien les difficultés de concevoir un passeport vaccinal qui serait reconnu par de nombreux pays.

Comme Louis Routhier, Yvan Pion et sa conjointe ont reçu leur deuxième dose de vaccin aux États-Unis 18 jours après la première. Et comme l’a vécu M. Routhier, le Québec n’a pas validé leur deuxième dose. Pour le moment, ça n’embête pas trop M. Pion. « De toute façon, quand j’irai aux États-Unis, on reconnaîtra ma preuve vaccinale américaine », dit-il. Mais de retour au Canada, ce ne sera peut-être pas le cas.

Au centre de vaccination de Montréal, une infirmière a indiqué à M. Routhier que s’il désirait recevoir « officiellement » une deuxième dose, il faudrait qu’il en reçoive une nouvelle – une troisième ! – dans les délais appliqués au Québec.

M. Routhier sera-t-il mieux protégé avec une troisième dose ?

D’un point de vue immunologique, il ne devrait pas y avoir une grande différence entre une dose à 18 jours ou à 21 jours, estime le professeur d’immunologie et de virologie à l’Institut national de la recherche scientifique Alain Lamarre. « La question d’une troisième dose est actuellement étudiée par les divers fabricants dans le contexte de la circulation des variants. En principe, on devrait voir une plus forte et plus large réponse immunitaire qui devrait procurer une meilleure protection contre les variants, mais cela devra être confirmé par les études cliniques en cours. »

Par ailleurs, le CIQ prévoit réviser son avis bientôt. « Des travaux sont en cours sur cette question, et la conduite à privilégier sera transmise dès que possible », dit le DBrousseau.

  • Nombre de doses administrées au Québec : 6 385 517
  • Nombre de doses administrées hors Québec et reconnues par le Ministère : 12 531
  • Source : ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, données du 10 juin 2021

« Où est mon code QR ? »

De nombreux lecteurs nous écrivent encore pour nous dire qu’ils n’ont toujours pas reçu leur preuve vaccinale électronique et le code QR qui l’accompagne. À ce sujet, le ministère de la Santé et des Services sociaux indique que « pour des raisons de sécurité, des vérifications doivent être effectuées à partir des renseignements fournis et au dossier afin de s’assurer de l’identité de la personne vaccinée et des coordonnées pour la joindre. Ces vérifications peuvent expliquer, en partie, les délais pour obtenir la preuve, notamment si des informations sont erronées ou manquantes ou si des erreurs de saisie se sont glissées ». Fort bien. Mais que faut-il faire pour tenter de rectifier la situation ? Pas grand-chose pour le moment, à part prendre son mal en patience… Mardi, le ministre Christian Dubé a déclaré qu’un « portail » serait mis en ligne pour permettre aux personnes vaccinées d’aller consulter et de valider l’information à leur dossier et, ainsi, recevoir enfin la preuve vaccinale. Cette opération, a indiqué M. Dubé, sera possible « à compter de la semaine prochaine ». À suivre, donc.