(Québec) Un Québécois sur trois reconnaît avoir visité quelqu’un ou reçu au moins une personne à la maison en avril, une pratique pourtant interdite, révèle un nouveau sondage de l’INSPQ mené auprès de 6600 répondants. Le coup de sonde, réalisé du 2 au 14 avril, montre malgré tout que l’adhésion de la population aux consignes sanitaires se maintient.

Visiter et recevoir

Quelque 35 % des Québécois sondés par l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) ont admis avoir visité ou reçu à la maison des membres de leur famille ou des amis « au moins une fois » lors des sept jours ayant précédé le sondage. Chez les 18 à 24 ans, ce taux grimpe à 44 %. C’est 42 % chez les 25 à 44 ans. C’est la première fois que l’INSPQ interroge les répondants sur cette question. « On avait une préoccupation de capter les écarts ou les gens qui trichent un peu », explique Ève Dubé, anthropologue de l’INSPQ et auteure du sondage. Le gouvernement Legault a montré du doigt à maintes reprises les rassemblements privés – qui sont interdits – pour expliquer une recrudescence des cas dans la province. Il a imposé un couvre-feu notamment pour dissuader les gens de se rassembler à l’intérieur. « C’est un peu surprenant, oui, mais en même temps, je suis anthropologue et le besoin de contact humain, de relations sociales, c’est fort », illustre Mme Dubé. Des nuances doivent par ailleurs être apportées. « On ne questionne pas plus loin. Est-ce un parent qui accepte que l’ami de son enfant vienne jouer à la maison ? Ça peut aussi être une personne seule qui visite une bulle… Mais ça donne une indication. » À la même question, 65 % des répondants ont répondu ne « jamais » recevoir de visite à domicile.

Les Québécois toujours « mobilisés »

Malgré cet écart concernant les visites à domicile, le coup de sonde sur les « attitudes et comportements des adultes québécois » démontre que l’adhésion aux consignes sanitaires se maintient. L’INSPQ a créé un « score » pour mesurer l’adhésion au lavage des mains, à la distanciation physique en société et à l’interdiction des rassemblements justement pour « évaluer les changements à travers le temps ». La proportion des Québécois qui suivent « toujours » ces trois consignes oscille entre 46 et 51 % depuis janvier. « C’est un score assez sévère, puisqu’il s’agit des réponses ‟toujours‟ aux trois mesures », nuance Mme Dubé. « Ce qu’on entend, que les gens sont fatigués et ne suivent plus, ce n’est pas ce que nos données démontrent. […] Ça me dit que les gens répondent encore à l’appel, qu’ils sont encore mobilisés. » L’INSPQ a aussi mesuré la « motivation » des Québécois à continuer d’appliquer les consignes sanitaires. Un total de 59 % des répondants soutiennent qu’il serait « très facile » de les maintenir encore « quelques semaines ». Ce taux descend à 41 % pour encore « deux ou trois mois » et à 29 % si on devait les appliquer encore six mois.

Une perception qui évolue

En un mois, les Québécois sont passés de la perception que « le pire de la crise est derrière nous » à « nous vivons présentement le pire de la crise » alors que la troisième vague a frappé d’un coup la province à la fin de mars. Les récentes données montrent que du 5 au 17 mars, 58 % des répondants estimaient que le plus dur était passé. Ils ne sont plus que 25 % à le croire en date du 2 au 14 avril. « Après la relâche, la perception de la majorité des gens, c’était […] que la pandémie était finie, qu’on s’en allait vers des jours meilleurs. Puis, on a observé un changement assez important avec plus d’une personne sur deux qui dit que l’on vit présentement le pire de la crise », souligne Ève Dubé. Le dernier sondage révèle effectivement que 51 % des répondants croient que le Québec traverse le plus fort de la crise sanitaire, et le quart estiment que « le pire reste à venir ».

Médias, couvre-feu et complot

L’INSPQ a mesuré « les croyances et perceptions » des Québécois sur la COVID-19 ainsi que sur les consignes sanitaires. On y apprend, selon le dernier sondage, que 73 % des personnes sondées sont « favorables au maintien du couvre-feu pour les prochaines semaines ». Selon Mme Dubé, ce taux se maintient depuis le début de son imposition, en janvier. « Encore une fois, c’est un peu contraire au discours que l’on entend parfois », souligne-t-elle. Le sondage révèle aussi que 67 % des répondants sont en « désaccord » avec l’idée que les médias et le gouvernement « exagèrent par rapport à la COVID ». L’INSPQ mesure aussi l’adhésion des Québécois à certaines théories du complot. Depuis juillet, c’est assez stable, autour de 20 %, explique Mme Dubé. « Évidemment, il ne s’agit pas de 20 % d’adeptes de QAnon, mais de gens qu’on pourrait qualifier de plus critiques ou moins confiants envers les recommandations de santé publique », nuance-t-elle.

Méthodologie

Depuis juillet 2020, 3300 adultes québécois répondent au sondage web de l’INSPQ chaque semaine. Comme ces faits saillants sont présentés toutes les deux semaines, les résultats portent sur les réponses d’environ 6600 participants. Les résultats sont pondérés selon des facteurs sociodémographiques afin d’être représentatifs des Québécois. Les résultats doivent être interprétés avec prudence étant donné l’échantillonnage non probabiliste (sondages par panel web) qui ne présente pas de marge d’erreur, indique l’Institut sur son site.