Face à la menace de la COVID-19, certaines personnes disent faire confiance à leur système immunitaire. D’autres n’ont pas cette chance… Pour elles, la vaccination des enfants est un moyen de plus de limiter la propagation du virus devant lequel elles se savent vulnérables.

Comme des centaines de milliers de Québécois, la santé de Maryse Roy, de Sainte-Catherine-de-Hatley, dépend du bouclier immunitaire collectif. Atteinte de polyarthrite rhumatoïde depuis plusieurs années, elle n’avait jamais encore pris conscience à quel point son état de santé la rendait vulnérable aux virus. Sa maladie auto-immune, qui frappe plus de 300 000 Canadiens, s’attaque aux articulations et se traite avec une médication qui affaiblit le système immunitaire.

Dans son cas, peu importe le nombre de doses de vaccin reçues, une grippe risque plus souvent de dégénérer en pneumonie.

« Bien avant la COVID-19, j’avais l’habitude de désinfecter régulièrement mes mains et d’avertir les personnes que je visitais dans le cadre de mon travail d’annuler le rendez-vous si elles avaient des symptômes de grippe », dit cette Estrienne de 59 ans. La COVID-19 pose un risque encore plus grand, et les vaccins sont notoirement moins efficaces pour protéger les immunosupprimés.

En parlant avec mon médecin, j’ai compris que si j’attrapais ça, j’avais beaucoup plus de risques d’aller à l’hôpital qu’une autre personne de mon âge en santé.

Maryse Roy

« Les personnes immunosupprimées, ça ne concerne pas qu’un tout petit nombre de personnes », affirme le DDonald Vinh, du CUSM. « Ce sont des gens qui ont des cancers, des leucémies, qui sont sur hémodialyse, qui ont eu des greffes d’organes. »

La faiblesse du système immunitaire peut avoir plusieurs causes. Elle peut être causée par la maladie elle-même (par exemple, les personnes séropositives au VIH), ou par la médication utilisée pour traiter une maladie (chimiothérapie, médicaments antirejet, hémodialyse…). « On considère qu’environ de 1 % à 2 % de la population est immunosupprimée », dit le DNicholas Brousseau, de l’INSPQ.

Les études ont montré qu’un nombre élevé d’immunosupprimés n’ont pas développé suffisamment d’anticorps contre la COVID-19 après la première dose de vaccin. La deuxième a permis d’obtenir un meilleur score, mais dès la fin de l’été, les immunosupprimés étaient conviés à recevoir une troisième dose. « Une grande proportion de cette population a augmenté de beaucoup son niveau d’anticorps avec la troisième dose », dit le DBrousseau. Y en aura-t-il une quatrième ? Pas pour le moment. « Peu d’endroits ont distribué de quatrièmes doses », dit-il. Aux États-Unis, depuis la fin d’octobre, les personnes considérées comme « modérément ou sévèrement immunosupprimées » peuvent recevoir une quatrième dose si plus de six mois se sont écoulés depuis la dernière dose.

PHOTO STÉPHANE LESSARD, LE NOUVELLISTE

Josée Massicotte

Tous pour un

Pour que Josée Massicotte puisse vivre une vie presque normale aujourd’hui, il aura fallu un effort concerté de toute une société. Atteinte de diabète de type 1 depuis son enfance, elle a vu son état de santé se détériorer à un tel point qu’une transplantation de pancréas est devenue incontournable il y a une dizaine d’années.

Pour réussir ce grand miracle de la transplantation d’organes, rappelle cette quinquagénaire de Trois-Rivières, il y a des années et des années de recherche scientifique et de sensibilisation qui ont été investies par la société. « Dans mon cas, un mécène a prêté son jet privé à mon chirurgien pour qu’il puisse aller chercher les organes dans l’Ouest canadien ! Il y a tellement de gens qui se sont donnés là-dedans, à commencer par la famille du défunt qui a accepté le don d’organes. »

Bref, soupire-t-elle, des efforts colossaux qui peuvent être balayés tout bêtement par un virus pour lequel il existe un vaccin.

Je suis vraiment affectée quand j’apprends que des greffés sont morts de la COVID-19. […] Tout cela se termine par un décès à cause d’un virus que certains contribuent à propager.

Josée Massicotte

Les vaccinés peuvent attraper le virus, rappelle le DVinh. « Quand ils ont des symptômes, leur charge virale peut être aussi élevée que celle d’un non-vacciné. Mais son déclin est beaucoup plus rapide, ils sont donc contagieux moins longtemps. »

« En immunisant les enfants de 5 à 11 ans, on espère ainsi pouvoir baisser la transmission communautaire », dit le DVinh.

Maryse Roy trouve particulièrement difficile de ne pas être encore en mesure de quantifier le risque qu’elle court en participant à certaines activités. L’été dernier, elle s’est sentie assez à l’aise pour fréquenter les terrasses extérieures. Mais à l’intérieur, elle ne fréquente que des personnes vaccinées, et encore, en gardant ses distances. « Ce n’est pas moi qui cours embrasser tout le monde ! », dit-elle en riant.

Elle ne nourrit pas d’animosité envers les non-vaccinés. « Je peux comprendre que lorsqu’on est jeune et en santé, on n’a pas autant d’empathie et de compréhension envers des gens plus vieux et malades. Je sais aussi que les gens qui ne sont pas vaccinés ne sont pas nécessairement de mauvaises personnes, que certains craignent simplement le vaccin. »

Dernièrement, son voisin l’a invitée à prendre l’apéro à la maison. Elle a tristement décliné, en raison de la présence de trois jeunes enfants. « Mais si les enfants avaient été vaccinés, j’y serais allée. »

Des anticorps monoclonaux pour remplacer le vaccin ?

Dans tout l’arsenal pharmaceutique destiné à combattre la COVID-19, les scientifiques apprennent à travailler avec les anticorps monoclonaux. Ces anticorps de synthèse sont actuellement administrés en intraveineuse à certains patients positifs et à risque de développer une forme grave de la COVID-19. Les études ont montré que les personnes qui ont reçu ces médicaments ont été protégées pendant plusieurs mois après le traitement. Serait-il possible d’administrer ces médicaments en prévention de la maladie à des personnes qui n’auraient pas développé suffisamment d’anticorps après la vaccination ? « Oui, on pourrait probablement le faire », répond prudemment le DVinh. « Mais ce sont aussi des médicaments qui coûtent très cher, comparativement aux vaccins. » À titre d’exemple, une dose de vaccin de Pfizer coûte moins de 30 $, alors qu’un traitement aux anticorps monoclonaux peut coûter plus de 2000 $.