Après les CHSLD, la COVID-19 menace les soins à domicile.

« Ça va être un drame épouvantable », prévient Marjolaine Aubé, présidente du Syndicat des travailleuses et travailleurs du centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de Laval.

Le personnel médical, qui va d’un domicile à l’autre pour s’occuper des personnes âgées, n’a pas de protection adéquate, selon de nombreux porte-parole syndicaux. En moyenne, ces « anges gardiens » visitent 10 clients de plus de 75 ans par jour. Ils risquent ainsi de propager la maladie d’un foyer à l’autre et de la ramener chez eux.

Les auxiliaires en soins de santé représentent la majeure partie des employés affectés aux soins à domicile. Leurs tâches sont à mi-chemin entre celles des préposées aux bénéficiaires et celles des infirmières. Elles donnent des soins d’hygiène, certains traitements, et sont en contact très étroit avec des personnes âgées ou des gens avec de graves déficiences physiques.

Elles n’ont pas d’uniforme. On leur fournit des gants et du Purell.

Marjolaine Aubé, présidente du Syndicat des travailleuses et travailleurs du CISSS de Laval

Masques non homologués

« Le problème, c’est le masque. On leur a donné des masques en tissu qui ne sont pas homologués et deux, trois masques de procédure. Quand ces masques sont mouillés, on leur dit de les plier en deux, de les mettre dans un sac Ziploc, de les laisser sécher et de les remettre quand ils sont secs. »

Ce qui est un progrès par rapport à une consigne antérieure qui consistait à les suspendre au rétroviseur de la voiture pour les faire sécher, souligne Nathalie Bourque, porte-parole de l’Association des auxiliaires familiales et sociales du Québec.

Pourtant, selon les experts, ces masques de procédure ont une durée de vie de quatre heures.

« Maintenant qu’on a gagné la bataille du dépistage dans les CHSLD, c’est le temps de s’occuper des soins à domicile », insiste Marjolaine Aubé.

L’inquiétude de cette dirigeante syndicale peut s’expliquer par le choc vécu dans les CHSLD du CISSS de Laval, où la COVID-19 fait des ravages, notamment au CHSLD de Sainte-Dorothée, maintenant sous tutelle, qui affiche le triste bilan de 115 cas et de 16 morts.

Au Québec, 12 % des 241 morts causées par le coronavirus se concentrent dans les CHSLD de Laval.

Tests de dépistage demandés

L’autre source d’inquiétude provient de la découverte par les scientifiques du grand nombre de cas asymptomatiques. Selon le directeur national de santé publique, Horacio Arruda, ce pourcentage tourne autour de 25 %.

C’est la raison pour laquelle le Syndicat des travailleuses et travailleurs du CISSS de Laval exige que les auxiliaires qui offrent des soins à domicile soient systématiquement testées, comme le sont maintenant les employés et les résidants des CHSLD.

Selon Nathalie Bourque, il faudrait éviter le déplacement de personnel.

« Des équipes doivent être destinées aux cas COVID pour prévenir la contamination des personnes âgées et des personnes qui ont une déficience physique », soutient cette auxiliaire. Elle ajoute qu’il faudrait fournir aux employés des blouses pour assurer leur protection et celle de leurs clients.

« Pourquoi pas des blouses lavables ? », dit-elle.

Pour ce qui est des résidences et des institutions d’hébergement pour personnes âgées, le président de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN), Jeff Begley, estime que les efforts des syndicats et les interventions des médias ont porté leurs fruits.

« Il y a des résultats, les équipements médicaux se rendent à destination, mais pas partout. Il y a un effort pour rattraper le retard. Mais ma crainte, c’est que le prochain problème, si on n’agit pas très rapidement, ce soit les soins à domicile. Ça nous inquiète. Il faut mettre de l’énergie pour trouver des solutions. »

Ce qui est difficile avec les soins à domicile, c’est que les clients sont dispersés et que les problèmes ne viennent pas rapidement à la connaissance des autorités médicales, comme c’est le cas pour les CHSLD, où on connaît le nombre d’infections et le nombre de décès liés au coronavirus.

« Plus ça va, plus on en entend parler. Mais tout se passe derrière des portes closes. Il y a beaucoup de choses qu’on ne sait pas », affirme Nathalie Bourque.