D’un côté, églises, synagogues, mosquées et bars. De l’autre, salles de spectacle et de cinéma. En zone orange, les établissements de la première catégorie ne peuvent pas accueillir plus de 25 personnes, mais ceux de la seconde peuvent aller jusqu’à 250.

Les chefs religieux de la province n’ont pas attendu longtemps pour dénoncer cette « injustice ». « On a beaucoup parlé des éclosions liées à des mariages et à des baptêmes, mais c’est lié aux fêtes, pas aux cérémonies religieuses », affirme Christian Lépine, archevêque de Montréal.

La semaine dernière, deux synagogues de Dollard-des-Ormeaux, Beth Tikvah et Or Shalom, ont annoncé l’annulation de leurs cérémonies pour les fêtes juives de Rosh Hachana et Yom Kippour, la fin de semaine dernière et la semaine prochaine.

« On est d’accord avec les restrictions imposées par le gouvernement, mais pourquoi les bars sont-ils encore ouverts ? », se demande Reuben Poupko, du Conseil des rabbins de Montréal. « Pourquoi les cinémas et les salles de spectacle peuvent-ils accueillir plus de gens que des synagogues où des gens prient ? En Ontario, il n’y a pas ce traitement plus dur pour les lieux de culte que pour les salles de spectacle. » M. Poupko fait partie de la Table interreligieuse du Québec, qui a protesté lundi contre les nouvelles restrictions visant les lieux de culte.

Mgr Lépine n’a pas entendu parler d’un seul mariage ou baptême catholique ou de rite oriental à Montréal qui ait donné lieu à une éclosion – si elle avait eu lieu lors de la fête subséquente, le prêtre aurait été prévenu, selon lui.

Les gens font ça à huis clos ou alors ils remettent la cérémonie s’ils tiennent à une fête.

Christian Lépine, archevêque de Montréal

Les mariages et les baptêmes de l’islam n’incluent pas de visite à la mosquée, note l’imam Hassam Guillet, qui fait aussi partie de la Table interreligieuse. « On essaie de régler un problème qui n’existe pas. En plus, les musulmans, normalement, ne boivent pas d’alcool. »

Manque de respect

En juillet, l’archevêque de Québec, Gérald Cyprien Lacroix, avait tonné durant une homélie à Sainte-Anne-de-Beaupré que le gouvernement avait « manqué de respect » envers les religions en ne les consultant pas durant le déconfinement, alors qu’elles avaient collaboré de manière « exemplaire » avec les autorités sanitaires. La Table interreligieuse avait par la suite appuyé sa sortie.

« On a recommencé à faire des mariages en juillet parce qu’on avait vu que les palais de justice avaient commencé à faire des mariages civils, dit Mgr Lépine. Personne ne nous avait prévenus. » Selon lui, il faut absolument éviter que les lieux de culte doivent à nouveau fermer – en Europe, ils sont généralement restés ouverts tout le printemps pour les dévotions personnelles, même s’il n’y avait pas de messes. « On pourrait avoir quelqu’un à l’entrée, qui s’assure qu’il n’y a pas plus de dix personnes à la fois dans l’église », dit Mgr Lépine.

Les petits lieux de culte ne devraient pas être touchés par les restrictions. « On a beaucoup de petites mosquées dans des locaux commerciaux, où les règles de distanciation font déjà qu’il ne peut pas y avoir plus de 25 personnes, dit l’imam Guillet. Mais on a aussi des mosquées où on peut avoir 200 personnes. »

De toute façon, dans les grands lieux de culte, s’il y a seulement 25 personnes, elles se rapprocheront tout en respectant la distance de deux mètres, selon Salam Elmenyawi, du Conseil des musulmans de Montréal.

Certaines communautés plus ferventes qui ont aussi des lieux de culte exigus seront plus touchées. « Chez les hassidiques, il y a plus de densité, par exemple, ça pose des défis particuliers », dit le rabbin Poupko.