(Québec) François Legault digère mal qu’Ottawa n’ait pas encore répondu favorablement à sa demande de prolonger la présence des militaires déployés dans les CHSLD jusqu’au 15 septembre. « Le Québec paie sa part pour l’armée », a lâché jeudi le premier ministre, visiblement irrité.

« Je comprends qu’il y a d’autres priorités, mais il me semble que la priorité actuellement, je n’en vois pas de plus urgente que de s’occuper de notre monde dans nos CHSLD », a poursuivi M. Legault en conférence de presse, s’expliquant mal pourquoi le fédéral hésite à laisser ses soldats sur le terrain pour combattre la crise de la COVID-19.

« Après juin, nous avons besoin d’eux. Qu’allons-nous faire s’ils partent ? J’imagine qu’ils ont autre chose de plus important à faire. Mais c’est quoi ? », a-t-il ajouté dans une réponse en anglais.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

François Legault

Mercredi, le ministre de la Défense, Harjit Sajjan, a semé un doute quant au futur de l’opération Laser. « Je peux vous assurer qu’on ne pourra pas tenir comme ça pendant quatre autres mois […] Nous n’avons pas le personnel suffisant ; nos gens travaillent sept jours par semaine, ce n’est tout simplement pas soutenable », a-t-il candidement lancé dans une entrevue sur les ondes de CBC.

ll a fait valoir que certaines provinces ne « comprennent pas tout à fait comment l’armée fonctionne », et qu’au fil des discussions, il comptait leur « expliquer les limites ». De plus, le ministre Sajjan a rappelé que des membres des Forces armées ont été infectées, et qu’il faudrait « prendre soin d’eux ».

« Je comprends qu’il y a peut-être un rythme de travail qu’il faudrait revoir. Je voyais que des soldats travaillent sept jours par semaine, mais ils pourraient peut-être travailler cinq jours par semaine. Il y a des accommodements. J’espère être capable d’en discuter avec le gouvernement fédéral et l’armée », a répondu M. Legault.

Le premier ministre Trudeau aura une conversation téléphonique avec ses homologues des provinces et des territoires jeudi soir, comme il le fait chaque semaine depuis le début de la crise de la COVID-19. Il a déjà prévenu qu’il voulait soulever l’enjeu des conditions dans les centres de soins et résidences pour aînés.

Les propos du ministre Sajjan ont fait bondir à Québec, mais au gouvernement Trudeau, personne ne les a corrigés, mercredi. Pas plus que ne l’a fait Justin Trudeau, jeudi, lorsqu’on lui a demandé si la mission serait prolongée avec les niveaux actuels.

« Le gouvernement du Canada et les Forces armées vont être là pour aider les Canadiens en difficulté […] et on va continuer le travail », a-t-il offert en conférence de presse à l’issue d’une rencontre des Nations unies.

Il a cependant réitéré que la présence de l’armée dans des CHSLD relevait de l’anomalie. « Ce n’est pas une solution à long terme […] C’est une mesure préliminaire, et il faut voir comment on peut passer à une autre étape pour que le Québec puisse prendre en contrôle la situation directement », a argué Justin Trudeau.

Il a soutenu avoir « hâte entreprendre des conversations avec [François Legault] sur les prochaines étapes ».

Plus d’un millier de militaires des Forces armées canadiennes sont à pied d’oeuvre dans les CHSLD du Québec depuis la mi-avril.