« On sait qu’on est la première ligne. On est conscients des risques. Mais on se lève quand même chaque matin et on va travailler. »

Francis Carbonneau est paramédical à Terrebonne. 

Depuis plus d’une semaine, il est confiné dans le sous-sol de sa maison. Sa conjointe lui descend ses repas. Ce sont ses seuls contacts humains.

L’homme de 26 ans ne s’approche même pas de son chien. En le flattant, dit-il, il risquerait de contaminer son amoureuse.

L’intervenant d’urgence a reçu l’appel de la Santé publique le 25 mars. Le verdict, il le connaissait déjà. Positif à la COVID-19. 

Il s’était fait tester quatre jours plus tôt après une journée de fièvre et s’était lui-même placé en quarantaine préventive.

Ce qu’il aimerait savoir, c’est comment il a été contaminé. 

« Dans ma vie personnelle, je faisais super attention. Je sortais juste pour aller à l’épicerie. Je mettais des gants. C’est certain que j’ai attrapé ça en travaillant », dit-il en entrevue téléphonique.

« Avec mon partenaire, on prend vraiment de bonnes précautions. On fait vraiment attention. On essaie de bien nettoyer l’ambulance entre chaque appel. »

Mais les risques demeurent.

Avant de tomber malade, il a transporté deux patients présentant des symptômes du coronavirus, dont un la veille de l’apparition des premiers symptômes.

Même s’il n’est pas sûr que c’est ce patient-là – « ça pourrait être un autre patient asymptomatique, ou en me promenant à l’hôpital », dit-il –, le cas montre toute la complexité pour les intervenants de première ligne de se protéger.

Un patient difficile

C’est arrivé le 20 mars. Francis Carbonneau et son partenaire interviennent auprès d’un homme victime d’un malaise durant une intervention policière. 

« C’était difficile. Il ne parlait pas français. L’anglais était sa troisième langue. Il avait de la misère à respecter les consignes. »

Quand les paramédicaux arrivent sur place, ils tentent de déterminer si l’homme présente des symptômes ou s’il a eu des contacts avec une personne qui a voyagé. Aux policiers, il a dit que non. À eux, il finit par admettre que oui.

On a mis tout l’équipement. La jaquette, les lunettes, le masque N95.

Francis Carbonneau

Mais dans l’ambulance, l’homme est agité. Il enlève le masque que les intervenants lui ont installé. Il tousse dans l’habitacle. 

« Déjà, en temps normal, ce n’est pas évident ces appels-là, mais on n’a pas le choix d’intervenir », souligne M. Carbonneau.

Le lendemain, il se réveille avec de la fièvre. Il ne sort que pour se rendre dans un centre de dépistage. Puis il s’isole. Son partenaire aussi, de façon préventive.

Il décrit ses symptômes ainsi : « J’ai fait de la fièvre une seule journée. J’ai tout le temps mal à la gorge. J’ai de l’infection. Je suis essoufflé. J’ai eu une vraie bonne migraine. Mais mon état est assez stable. Je suis chanceux. Je suis jeune. »

Il assure qu’il a « bien pris » le diagnostic. « Je suis un intervenant », dit-il.

« C’est sûr que quand j’ai commencé à travailler, je ne m’attendais pas à faire face à une pandémie », dit-il. Ça ne l’empêchera pas de continuer, dès qu’il sera remis.

« Le message le plus important, c’est qu’il faut vraiment respecter les mesures mises en place par le gouvernement. Ce n’est pas juste une grippe. Ceux qui disent ça, ce n’est pas vrai. Ça fait neuf jours que je suis malade. J’étais très prudent et je l’ai attrapé quand même. C’est hyper virulent. »