Vous avez des questions sur nos éditoriaux ? Des interrogations sur les sujets chauds de l’actualité ? Chaque semaine, l’équipe éditoriale répond aux lecteurs de La Presse.

Écrivez-nous

On a lu et entendu depuis quelques jours que seulement 9 ou 10 % des produits de plastique sont recyclés. Pourquoi ?

Roland Archambault

Nos sociétés croulent sous le plastique.

Le sujet était de retour dans l’actualité récemment, car on a relancé les négociations internationales devant mener à un traité mondial de lutte contre la pollution plastique avant la fin de l’année prochaine.

Il y a loin de la coupe aux lèvres, car il n’y aurait effectivement qu’environ 10 % du plastique que nous utilisons qui parvient à être recyclé. C’est le cas au Canada, mais aussi ailleurs dans le monde, selon des études effectuées au cours des dernières années.

Les experts de la question expliquent que cet échec lamentable est le résultat d’une combinaison de facteurs.

Est-ce parce que trop de citoyens jettent à la poubelle cette matière recyclable ?

Oui, et même parfois par dépit.

Notons premièrement que ce ne sont pas tous les Québécois qui participent à la collecte sélective… mais presque.

Éco Entreprises Québec indique que 99 % de la population québécoise est désormais desservie par la collecte sélective. Et 96 % des Québécois – interrogés récemment dans le cadre d’un sondage – ont dit y participer.

En revanche, encore beaucoup trop de plastique se retrouve dans les sites d’enfouissement parce qu’il n’a pas été déposé à la collecte sélective dans le but d’être récupéré, indique Recyc-Québec.

Pas moins de 158 000 tonnes de plastique en provenance des foyers québécois ont subi ce sort en 2021. Ce qui s’ajoute aux 207 000 tonnes générées par les industries, commerces et institutions, ainsi qu’aux 13 000 tonnes du secteur de la construction et de la rénovation.

C’est colossal.

Cela dit, même si tous les habitants du Québec – et l’industrie – mettaient religieusement tous leurs déchets en plastique dans le bac de recyclage, ça ne serait pas non plus suffisant pour régler le problème.

Les chiffres de Recyc-Québec indiquent qu’en 2021, sur les 90 000 tonnes de plastique récupérées lors de la collecte sélective, ce sont uniquement 52 000 tonnes qui ont été « acheminées aux fins de recyclage » pour être transformées.

La « performance » du système « va être influencée par ce qui est mis en marché, par le tri des citoyens et des entreprises, mais aussi par les équipements dans les centres de tri », dit Sophie Langlois-Blouin, vice-présidente, performance des opérations, de Recyc-Québec.

« Une partie du flux des matières plastiques ne se prête pas bien au recyclage », renchérit Marc Olivier, professeur-chercheur au Centre de transfert technologique en écologie industrielle.

« Pensons simplement au mobilier. Vous êtes peut-être assis sur un fauteuil rembourré en mousse de polyuréthane. C’est une matière plastique et ça ne se recycle pas. Personne ne veut le faire parce que ça ne rapporterait pas suffisamment, et on n’a pas de contrainte législative qui nous oblige à le faire », précise-t-il.

L’état pathétique de notre lutte contre le plastique a récemment poussé le gouvernement du Québec à mettre de l’avant des initiatives dans le but de changer la donne.

Par exemple, une modernisation du système de collecte sélective a débuté l’an dernier avec l’entrée en vigueur en juillet 2022 du règlement sur la responsabilité élargie des producteurs (quant à la conception et au recyclage de leurs produits).

Il faudra attendre avant de pouvoir juger de l’efficacité d’une telle initiative. Mais pas besoin de patienter pour prendre nos propres résolutions et modifier notre consommation individuelle de plastique.

« C’est clair qu’on consomme beaucoup de matière, souligne Sophie Langlois-Blouin. Plus on peut réduire en amont notre consommation de certains produits à usage unique – en plastique ou en d’autres matières –, mieux c’est. Et quand ce n’est pas possible, si on en choisit un qui peut être mis dans notre bac, on en minimise l’impact. »