Pour L'arnacoeur, sa première franche comédie, Romain Duris a dû jouer de sa séduction comme jamais auparavant. Du coup, un tout nouveau public le découvre.

Au fil des 15 ans de métier qu'il affiche déjà au compteur, Romain Duris a évidemment eu l'occasion de jouer dans des films ayant obtenu un grand succès public. Le diptyque de son mentor Cédric Klapisch, L'auberge espagnole et sa suite Les poupées russes, fait notamment partie du lot. Jamais l'acteur n'avait pourtant eu encore l'occasion de tenir l'affiche d'un mégasuccès comme L'arnacoeur, une comédie sentimentale dans laquelle il donne la réplique à Vanessa Paradis.

«La différence se voit à la façon dont les gens m'abordent dans la rue! a confié le comédien français à La Presse lors d'un récent passage à Montréal. Tout cela reste bien sympathique, mais j'ai remarqué qu'une nouvelle catégorie de spectateurs venait vers moi maintenant. Ça va de la petite fille de 8 ans jusqu'à la grand-mère. Et ça, c'est tout à fait nouveau. Je le vis assez bien mais je me dois de faire un peu plus attention. C'est plus difficile les jours où ça va moins bien et qu'on n'a pas envie de faire semblant...»

Reconnu surtout pour ses performances dramatiques, d'Exils (Tony Gatlif) jusqu'au tout récent Persécution (Patrice Chéreau), sans oublier De battre mon coeur s'est arrêté (Jacques Audiard), Romain Duris a beaucoup réfléchi avant d'accepter la proposition de Pascal Chaumeil et d'incarner L'arnacoeur.

«D'abord, la qualité d'une comédie est très difficile à juger au moment de la lecture du scénario, explique-t-il. Et puis, je suis très frileux envers les produits calibrés pour plaire au plus grand nombre. Je crains toujours la facilité. Cela dit, j'ai rencontré Pascal, j'ai beaucoup discuté avec lui, et des changements ont été apportés au scénario afin de rendre le personnage un peu plus vulnérable. Le personnage doit évidemment jouer de sa séduction, mais il n'est pas trop sûr de lui quand même. Sinon, il n'aurait pas été intéressant à jouer.»

Une même démarche

Vu de l'extérieur, le contraste entre un drame écorché comme Persécution (disponible en DVD depuis mardi) et une franche comédie comme L'arnacoeur est frappante. Romain Duris estime pourtant que la démarche est relativement semblable d'un film à l'autre. Même si l'acteur n'est pas appelé à explorer les mêmes zones.

«Les gens sont habituellement plus impressionnés par les performances dramatiques mais il reste que, dans un genre ou dans un autre, un acteur doit s'abandonner de la même façon, fait-il remarquer. Tony Gatlif, avec qui j'ai tourné plusieurs films, m'a appris à être à nu. C'est-à-dire que je n'ai pas de pudeur sur le moment. J'essaie plutôt de donner au metteur en scène la couleur qu'il cherche, même s'il ne trouve pas forcément. C'est ce que Chéreau apprécie chez moi, je crois.»

Cet abandon s'est révélé être d'une autre nature dans L'arnacoeur, mais tout aussi exigeant.

«Surtout dans les chorégraphies!» ajoute l'acteur.

La complicité s'est aussi bien établie avec Vanessa Paradis. Et la rencontre avec Pascal Chaumeil, qui signe ici son premier long métrage, fut concluante au point où les deux hommes ont décidé de remettre le couvert très vite. Duris sera en effet la vedette de Vivre, c'est mieux que mourir, une comédie d'aventure loufoque que l'auteur cinéaste voit comme un hommage au Magnifique de Philippe de Broca. Le tournage devrait avoir lieu au cours des prochains mois.

Appelé à commenter le chemin parcouru depuis le jour où Cédric Klapisch l'a invité à faire un essai en vue de son premier film Le péril jeune, Romain Duris estime que rien n'a fondamentalement changé.

«La motivation est la même, dit-il. J'aime explorer les sentiments humains. J'ai toujours aussi peur aujourd'hui des méthodes, des règles. Autant qu'à mes débuts. Mon moteur est abstrait mais il est là, je le sens.»

Après une série de drames très intenses (De battre mon coeur s'est arrêté, Paris, Persécution), Duris avoue avoir pris plaisir à jouer la légèreté.

«Il me semble qu'il y avait très longtemps que je n'avais pas eu l'occasion de sourire au cinéma. Cela m'a fait un bien fou. J'ai voulu en profiter!»

Quant aux raisons qui expliquent le succès public inattendu de L'arnacoeur, l'acteur y voit un signe de l'air du temps.

«Je crois que les Français avaient besoin de se détendre, analyse-t-il. Jamais je n'aurais toutefois pu soupçonner à quel point ce besoin était criant!»

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L'arnacoeur prend l'affiche aujourd'hui.