Quand il a pris les commandes de Harry Potter et l'Ordre du Phénix, David Yates s'engageait pour un film. Puis, Le prince de sang-mêlé lui a été confié. Enfin, Les reliques de la Mort. Comme si une aventure d'un soir s'avérait celle d'une vie. Rencontre.

«Je vais prendre des vacances.» La réponse tombe, elle n'est pas plombée par les regrets, mais empreinte de soulagement. David Yates est monté à bord du bateau «Harry Potter» en 2006, quand il a accepté de prendre la barre de L'Ordre du phénix. Mais les circonstances ont fait qu'il va mener le navire au port, puisqu'il s'est ensuite occupé de l'escale Le prince de sang-mêlé et celle, double, des Reliques de la mort.

Quand la deuxième partie de ce film arrivera sur les écrans au Québec, le 15 juillet, le réalisateur aura consacré six ans à l'adaptation cinématographique de l'univers créé par J.K. Rowling. «Il va falloir que je redémarre ma carrière», confie celui dont le nom est maintenant associé à la franchise «Potter». Mais avant d'en arriver là, David Yates a encore du pain sur la planche: la promotion de la première partie du film et la postproduction de la seconde.

À l'hôtel Claridges de Londres, où il a rencontré les médias la semaine dernière, il ne cachait pas sa satisfaction d'avoir travaillé, pour Les reliques de la mort, avec de jeunes acteurs qui possèdent aujourd'hui plus que les bases du métier: «Harry (Daniel Radcliffe), Hermione (Emma Watson) et Ron (Rupert Grint) sont seuls, dans la nature sauvage, pendant presque tout le film. Loin de Poudlard, des professeurs, de leurs parents.»

Afin de porter cet isolement, ces tourments qui déchirent le trio pour mieux l'unir, profondeur, polyvalence et nuances étaient nécessaires. «Tout est dans le roman, souligne le réalisateur, mais aussi, Dan, Emma et Rupert ont l'expérience pour aller aussi loin. De plus, c'était la dernière fois qu'ils allaient jouer ensemble, je le leur ai rappelé, ça a nourri leur jeu.»

Pour ne pas se laisser écraser par les attentes, il s'est donné une consigne: prendre ce qui lui semblait être la meilleure décision, chaque fois. Pour trouver une chanson pouvant accompagner la danse douce-amère de Hermione et Harry, il a écouté des centaines de pièces avant d'arrêter son choix sur O Children de Nick Cave. Qui est en effet parfaite, en ton et en mots. Afin d'illustrer Le conte des trois frères, qui aiguille le trio sur Les reliques de la mort, il a étudié des dizaines de styles d'animation avant d'opter pour un hybride (somptueux) d'ombres chinoises et de silhouettes victoriennes.

Enfin, quand Warner est arrivé avec l'idée de sortir le film en 3D, il a laissé sa chance au coureur, autrement dit à la conversion. «Mais si certaines scènes étaient très réussies, d'autres avaient besoin de plus de travail. Pour offrir quelque chose de parfait, il nous aurait fallu deux mois de plus. Nous l'avons dit au studio... et une décision adulte a été prise.» C'est-à-dire que le 3D attendrait la deuxième partie.

David Yates y travaille en ce moment. Il est optimiste: «La technologie de conversion évolue très rapidement et je vais utiliser le 3D comme... la musique: pas toujours à fond, parfois en douceur, parfois en force. Moduler la profondeur pour qu'elle soit en accord avec l'émotion du moment.» Et on le croit: de l'avis de tous, il sait écouter, mais sait aussi ce qu'il veut. Cet homme à la voix de velours est un homme de fer.