Cinéastes, documentaristes, scénaristes, comédiens, producteurs ou tout simplement cinéphiles, il y avait un monde fou, vendredi soir au Bistro SAQ de la Cinémathèque québécoise pour faire la fête au court métrage.

Organisée dans le cadre des Rendez-vous du cinéma québécois (RVCQ), cette 8e édition de la soirée Prends ça court! a permis de saluer le travail de nombreux cinéastes ayant réalisé des courts métrages en 2010. Plusieurs d’entre eux sont repartis avec un, deux, trois, voire quatre prix.

Les réalisateurs Éric Morin et Halima Ouardiri sont repartis avec quatre prix chacun pour leurs films Opasatica et Mokhtar.

Inspiré du nom d’un lac de l’Abitibi-Témiscamingue, Opasatica raconte l’histoire d’une jeune Espagnole vivant une courte et intense relation amoureuse dans le nord du Québec. Quant à Mokhtar, il s’attarde à la belle et douloureuse histoire d’un enfant qui, pour avoir rapporté un hibou à la maison, subit les foudres de son père. Car dans cette famille de chevriers marocains, il s’agit là d’un mauvais présage.

Le prix le plus prestigieux de la soirée, nommé Coupe du court Vision Globale a été remis à Malcolm Sutherland pour Umbra, film d’animation à caractère introspectif dans lequel un personnage arrivant inopinément sur une planète provoque la fascination des petits habitants attirés par son ombre.

Pour reprendre les mots du comédien et animateur de la soirée Louis-David Morasse, la «prestigieuse et horriblement laide» Coupe du court a été remise à Sutherland qui l’a brandie au bout de ses bras comme la Coupe Stanley sous les applaudissements et les cris enthousiastes des centaines de personnes présentes.

Heureusement, le trophée venait avec un prix de 15 000$ en services de postproduction chez Vision Globale. D’ailleurs, les 23 prix remis, d’une valeur totale de 150 000$, étaient en argent et services de nombreuses entreprises de l’industrie cinématographique.

Autre grand gagnant de cette soirée, le cinéaste Emanuel Hoss-Desmarais a reçu le Grand Prix Canal + (une somme de 10 000$ et une diffusion sur Canal +) pour Marius Borodine, récit d’un enfant qui conçoit une machine capable de transformer n’importe quel objet en eau potable.

Hoss-Desmarais est bien connu pour ses publicités légèrement déjantées et souvent très drôles. Actuellement, il est derrière la caméra pour les publicités «On se met à votre place» de Familiprix. Ross-Desmarais a aussi deux projets de longs métrages en développement, un avec micro_scope (les producteurs d’Incendies) et un avec ITEM 7, la boîte de Pierre Even qui produit Café de Flore, nouveau film de Jean-Marc Vallée.

Les autres principaux gagnants de la soirée sont Nicolas Brault (Le Cirque) avec trois prix, Kaveh Nabatian (Vapor), Albéric Aurtenèche (M’ouvrir), Vincent Biron (Les fleurs de l’âge) et Matthew Rankin (Negativipeg), tous avec deux prix.

Catherine de Léan a remporté le prix UDA de la meilleure comédienne pour son rôle de Sophie Lavoie dans le film éponyme d’Anne Émond. Elle sera aussi en vedette dans le premier long métrage de Mme Émond, Nuit # 1, qui sortira plus tard cette année.

Le prix du meilleur comédien est allé à Abdallah Ichiki, jeune vedette du film Mokhtar. Le garçon de 11 ans demeure dans un village reculé du Maroc a expliqué la réalisatrice Halima Ouardiri venue chercher le prix en son nom. La famille du garçon n’a ni internet ni le téléphone et la réalisatrice entend aller lui remettre son prix au printemps.

Un des plus beaux moments de la soirée est survenu lorsque le cinéaste oscarisé Frédéric Back est monté sur scène pour remettre un prix. Les gens ont salué sa présence avec une ovation debout. Souriant, la voix fatiguée, mais sûre, le réalisateur de L’Homme qui plantait des arbres s’est dit heureux de renouer avec une telle soirée de cinéma «dans une ambiance que je ne pouvais imaginer».

Cette année, le jury de la compétition de Prends ça court! était formé de Ségolène Roederer, directrice des RVCQ, les réalisateurs Sébastien Pilote, Stéphane Lafleur, Maxime Giroux, Sophie Deraspe, Mathieu Roy et Rafaël Ouelet, du réalisateur et comédien Xavier Dolan, des comédiennes Sophie Desmarais et Mélissa Désormeaux-Poulin et de Mélissa Bouchard, programmatrice de l’événement Regard sur le court métrage du Saguenay.

À Montréal et partout au Québec, le court métrage est beaucoup diffusé grâce au travail du programmateur Danny Lennon, fondateur de Prends ça court! que plusieurs participants ont salué au passage. La soirée, tenue dans un grand décorum, a été pimentée des prestations musicales d’Alex Nevsky et Patrick Watson.

La Presse y a croisé, parmi bien d’autres, les cinéastes Louis Bélanger, Christian Laurence et Jean-Claude Labrecque, la documentariste Sylvie Groulx, la comédienne et réalisatrice Marilou Wolfe, etc. Une belle fête, sans barrière entre les formes de cinéma. «Après tout, nous sommes tous passés par le court», a résumé un des participants de la soirée.