Tout était orchestré pour recréer l'effet magique d'E.T. the Extra-Terrestrial. Mais celui-ci n'a pas eu lieu. Présenté hors concours, The BFG (Le bon gros géant) est un film principalement destiné au jeune public. Et n'aura sans doute pas l'impact intergénérationnel qu'a eu son illustre prédécesseur.

Peut-on créer la magie deux fois à 34 ans de distance ? Steven Spielberg a semblé le croire. En 1982, le wonder boy du cinéma hollywoodien avait lancé sur la Croisette un « petit » film hors compétition : E.T. the Extra-Terrestrial. Le triomphe cannois a ensuite eu un écho populaire qui s'est transformé en phénomène. Hier, la productrice Kathleen Kennedy a déclaré que la première d'E.T. à Cannes restait le moment le plus marquant de sa carrière. « Et je suis certaine que c'est le cas pour Steven aussi », a-t-elle ajouté.

Les coïncidences et les signes se sont faits si nombreux à propos de The BFG qu'on ne peut certainement pas blâmer l'équipe d'avoir tenté de toucher de nouveau à cette magie. Le roman culte de Roald Dahl, duquel ce film est l'adaptation, a été publié l'année où E.T.est sorti. La regrettée Melissa Matheson, morte il y a six mois, en a signé l'adaptation. Cette dernière avait aussi écrit le scénario d'E.T. à l'époque. Et puis, Cannes a toujours bien accueilli Steven Spielberg. Celui qui a présidé le jury l'année où la Palme d'or fut attribuée à l'unanimité à La vie d'Adèle (Abdel Kechiche) n'a toutefois pas présenté de film ici depuis Indiana Jones and the Kingdom of the Crystal Skull en 2008.

Comme E.T. ... en moins bien!

Hier, Steven Spielberg a déclaré que son retour à Cannes avec, sous le bras, un film destiné à toute la famille le ramenait à ses années de jeunesse.

« Je retrouve des sentiments que j'éprouvais quand j'étais jeune cinéaste. D'autant que les retrouvailles avec Melissa, avec qui je n'avais pas travaillé depuis E.T., furent merveilleuses. C'est vraiment un moment doux-amer pour nous. »

Portant la bannière Disney, The BFG emprunte la même formule qu'E.T., en un peu moins bien. Campé en Angleterre, le récit est construit autour du parcours étonnant de Sophie, une fillette orpheline solitaire qui se réfugie dans la lecture. On aimerait vous dire que la jeune Ruby Barnhill, qui a hérité du rôle, est une révélation et qu'elle perce l'écran, mais malheureusement, ce n'est pas le cas.

Une nuit d'insomnie, la petite Sophie surprend un géant de sept mètres qui se promène dans les rues de Londres pour souffler aux enfants les beaux rêves qu'il leur fabrique dans son repaire. Spielberg s'attardera à montrer - un peu longuement - comment s'établit la complicité entre ces deux exclus. Mark Rylance, lauréat de l'Oscar du meilleur acteur de soutien grâce à sa performance dans l'excellent Bridge of Spies, le film précédent du cinéaste, incarne avec brio - et beaucoup d'effets visuels - le géant en question. Spielberg déploie enfin son artillerie lors d'un dîner mémorable en compagnie d'Élisabeth II (Penelope Wilton), très drôle, mais c'est trop peu, trop tard. La magie de l'histoire n'opère pas comme prévu.

Une célébration de nos différences

En portant à l'écran le roman de Roald Dahl, Steven Spielberg affirme pourtant s'être senti libre comme jamais.

« J'adore raconter des histoires totalement imaginaires, car tout est permis », a-t-il souligné, ajoutant que The BFG faisait partie des contes qu'il lisait à ses propres enfants. « Il n'y a alors plus de barrières. Ça m'a rappelé mes débuts ! »

Au cours de la conférence de presse, un journaliste a demandé au cinéaste de commenter les soupçons d'antisémitisme qui pèsent sur la réputation de Roald Dahl depuis quelques années. Steven Spielberg a déclaré qu'il n'était pas au courant des « histoires personnelles » du romancier.

« Je me suis concentré sur l'histoire qu'il a écrite, a-t-il ajouté. Et cette histoire est une célébration de nos différences. »

The BFG (Le bon gros géant) prendra l'affiche le 1er juillet au Québec.