Né à Omaha le 3 avril 1924 et mort à Los Angeles le 1er juillet 2004, le grand acteur américain Marlon Brando aurait eu 100 ans cette semaine. Retour en cinq films sur sa carrière émaillée de deux Oscars et de stupéfiants coups de gueule.

A Streetcar Named Desire, Elia Kazan (1951)

Dès son deuxième long métrage, A Streetcar Named Desire (Un tramway nommé Désir en version française), Brando décroche une mise en nomination comme meilleur acteur aux Oscars. Adaptation de la pièce de théâtre de Tennessee Williams, le film, réalisé par Elia Kazan, est nommé 12 fois au gala de 1952 et remporte quatre trophées, dont trois des quatre prix d’interprétation. Brando est le seul à ne pas mettre la main sur la statuette, mais son interprétation a marqué les esprits. « Aucune performance n’a eu plus d’influence sur les styles d’acteurs cinématographiques modernes que le travail de Brando dans le rôle de Stanley Kowalski, héros brutal, malodorant et chargé de sexualité », a écrit le grand critique Roger Ebert dans une analyse.

On the Waterfront, Elia Kazan (1954)

Marlon Brando remporte le premier de ses deux Oscars avec On the Waterfront (Sur les quais en version française), drame criminel où il incarne Terry Malloy, jeune délinquant de Hoboken, au New Jersey, qui fréquente une bande de criminels contrôlant les activités du port. Un soir, Malloy se retrouve complice du meurtre d’un homme qui voulait dénoncer ces malversations. Un secret lourd à porter alors qu’il est amoureux d’Edie (Eva Marie Saint), sœur de la victime. Nombreux, chez les amoureux et historiens du cinéma, évoquent toujours cette réplique de Malloy : « I coulda had class. I coulda been a contender. I coulda been somebody, instead of a bum, which is what I am, let’s face it. » Traduction : « J’aurais pu avoir de la classe, j’aurais pu être un champion. J’aurais pu être quelqu’un plutôt qu’un perdant, ce que je suis, soyons réalistes. »

The Godfather, Francis Ford Coppola (1972)

Pour son rôle du chef mafieux Don Vito Corleone dans The Godfather (Le parrain en version française), Marlon Brando remporte le deuxième Oscar de sa carrière et le... refuse. Absent de la cérémonie, il y délègue Sacheen Littlefeather, une actrice aux origines apache et yaqui. Cette dernière lit une déclaration dans laquelle l’acteur justifie son geste en raison de la piètre représentation des Amérindiens à Hollywood. Sa performance dans le film ? « Il faut saluer le jeu de Marlon Brando qui a su créer ici un personnage absolument extraordinaire dont la puissance, toute intériorisée, perce néanmoins à chacun de ses gestes, à chacune de ses paroles », écrit notre collègue (toujours actif !) Jean-Pierre Tadros dans Le Devoir du 8 avril 1972.

The Missouri Breaks, Arthur Penn (1976)

Rares ont été les incursions de Brando dans le western. Mais son passage a capté l’attention de Bruno Dequen, rédacteur en chef de la revue 24 images. « Dans Missouri Breaks, il joue, face à un Jack Nicholson admirateur, un tueur à gages, mais de façon tellement outrancière que sa performance avait été très critiquée, nous dit-il en entrevue. Il joue de façon complètement burlesque dans un environnement qui était celui du nouvel Hollywood, où l’on déconstruit les mythes de façon très sérieuse. Or, Brando propose une sorte de personnage insaisissable, halluciné, qui se déguise et change d’accent en permanence, même à l’intérieur d’une phrase. » Cela correspond parfaitement à la définition d’iconoclaste que M. Dequen accole à l’acteur.

The Island of Dr. Moreau, John Frankenheimer (1996)

Tout a mal été dans le tournage de The Island of Dr. Moreau (L’île du Dr Moreau en version française), où la science-fiction et l’horreur se chevauchent. Brando incarne le personnage d’un ancien Prix Nobel retiré dans une île où il crée des êtres mi-bêtes, mi-humains. Et fidèle à son habitude, il fout le bordel ! Ses relations avec la co-vedette Val Kilmer sont notamment glaciales. Un documentaire sur ce ratage, signé David Gregory, est sorti en 2014. « Le film s’amorce bien, mais très rapidement, les choses dérapent, avait confié à l’époque M. Gregory à La Presse. Les hommes-bêtes sont toujours filmés de jour, de sorte que les maquillages et les costumes sont très visibles. Et il y avait des scènes ridicules de Brando avec un seau à glace sur la tête ou le visage totalement blanchi. »