Poursuivant une démarche personnelle avec son amie et complice Tilda Swinton, déjà amorcée dans The Souvenir et The Souvenir : Part II, Joanna Hogg concrétise enfin un projet qu’elle entretenait depuis plusieurs années, soit celui d’explorer la part plus méconnue de la vie d’une femme qu’elle a pourtant côtoyée pendant si longtemps : sa mère.

The Eternal Daughter : Tilda Swinton en double

La cinéaste britannique le fait à sa façon, en plongeant son film dans un climat à la fois mystérieux et intime, où même, parfois, des esprits peuvent discrètement se manifester. The Eternal Daughter, sélectionné en compétition officielle, relate ainsi la démarche intime d’une cinéaste qui invite sa mère (Tilda Swinton tient les deux rôles) à séjourner avec elle dans le vieil hôtel où cette dernière a déjà vécu dans sa jeunesse des épisodes riches en souvenirs. Cette démarche d’une artiste issue d’une génération dont les parents, qui ont grandi pendant la Seconde Guerre mondiale, s’expriment peu sur leur enfance est illustrée sans effets dramatiques. L’atmosphère y est toujours brumeuse – voire un peu austère –, mais le récit prend racine dans une interrogation sincère, puisée à même la complexité des relations familiales.

Il Signore delle Formiche : un rappel à la vigilance

PHOTO FOURNIE PAR LA MOSTRA DE VENISE

Luigi Lo Cascio dans Il Signore delle Formiche, un film de Gianni Amelio

Le vétéran Gianni Amelio a été reconnu sur la scène internationale au cours des années 1990 grâce à des films comme Les enfants volés (Grand Prix du jury à Cannes en 1992) et Lamerica. Avec Il Signore delle Formiche (The Lord of the Ants est le titre international), troisième des quatre longs métrages italiens en lice pour le Lion d’or, le cinéaste propose un film inspiré de faits véridiques, dans lequel il retrace le parcours du poète Aldo Braibanti (Luigi Lo Cascio), aussi professeur, qui, au cours des années 1960, fut accusé – et condamné – pour plagiat, prétexte, surtout, pour le persécuter quand sa liaison homosexuelle avec un jeune adulte (Elio Germano) est révélée. Ce dernier a d’ailleurs été institutionnalisé par la famille – traitements d’électrochocs, médication, etc. – pour tenter de le « guérir » de sa « perversion ». L’affaire a eu un impact social en Italie, mais pour les deux protagonistes, le mal était fait. Et irréparable. D’une tristesse sans nom, le récit s’étire sur une dizaine d’années, avec, en son centre, un procès absurde qui rappelle que même si un bout de chemin a été fait depuis cette époque pas si lointaine, la vigilance doit être maintenue.