Le constructeur automobile américain Ford devrait publier aujourd'hui une perte historique de plus de 9 milliards US pour l'année 2006, toujours plombé par son activité automobile en Amérique du Nord, qui tarde à se redresser malgré une restructuration entamée il y a un an.

Ford, qui affiche déjà 7 milliards US de pertes pour les neuf premiers mois de 2006, devrait être largement dans le rouge au quatrième trimestre, avec un déficit de 97 cents US par action attendu en moyenne par les analystes.

Douglas Karson, de Bank of America, évalue la perte nette du quatrième trimestre à 2,26 milliards US, soit un total de 9,26 milliards US pour l'année tout entière, sans compter d'éventuels éléments exceptionnels. En 2005, Ford était bénéficiaire de 1,44 milliard US. Le constructeur battrait ainsi son propre record, lorsqu'il avait accusé une perte nette de 7,39 milliards US en 1992.

La seule activité automobile nord-américaine devrait accuser une perte trimestrielle de 2,7 milliards US avant impôts, selon Bank of America, ajoutant que les bénéfices viendront de l'Amérique latine (166 millions US) et de l'Europe (56 millions US).

<b>Déclin des parts de marché</b>

Le chiffre d'affaires est aussi attendu en baisse, dans un contexte où le groupe taille dans ses capacités de production pour s'adapter au déclin de ses parts de marché. Il devrait reculer à 143,23 milliards US en 2006 après 176,89 milliards US en 2005, selon les prévisions moyennes du marché.

Face à un flot de critiques de la communauté financière, Ford a dévoilé en septembre un nouveau train de mesures pour accélérer la cadence de sa restructuration, initiée en janvier 2006, tablant notamment sur 40 000 suppressions d'emplois d'ici 2008 comparativement à 30 000 d'ici 2012.

Le groupe a également repoussé de 2008 à 2009 son objectif de retour à la rentabilité, et annoncé la nomination d'un nouveau PDG, Alan Mulally.

M. Mulally, connu pour avoir redressé avec succès l'aviation commerciale chez Boeing, bénéficie de la confiance des marchés.

L'activité de Ford depuis septembre «est conforme au plan de M. Mulally selon lequel les améliorations à l'opérationnel seront progressives et continues et non spectaculaires et soudaines», soulignent d'ailleurs les analystes de Bear Stearns.

Ceux de Calyon jugent en revanche la partie nouveaux produits du plan du PDG peu convaincante, avec des modèles «qui ne seront pas assez vendeurs pour contrer la baisse des parts de marché de Ford».

Du côté des nouvelles des derniers mois jugées rassurantes par les analystes figure le plan social quasiment bouclé, avec 38 000 départs réalisés à à la fin de novembre.

Par ailleurs, le recours à un emprunt de 23 milliards US écarte à court terme d'éventuels problèmes de liquidités, estime la banque Morgan Stanley, qui a relevé sa recommandation sur le titre de Ford.

Ford disposait à fin septembre de 23 milliards US de liquidités, et faisait face en début d'hiver à un besoin de trésorerie de 17 milliards US, rappellent les analystes de Bear Stearns.

Outre les résultats, le marché sera à l'affût de tout nouvel élément sur le sort de la marque Jaguar, maillon faible du constructeur. La marque de luxe a perdu plus de 715 millions US en 2006 et risque de perdre 550 millions US en 2007, selon le quotidien Detroit News hier.

Tout signal sur l'état des discussions avec le japonais Toyota, en vue d'une alliance, sera également surveillé. Toyota a répété cette semaine être ouvert à des discussions avec tout constructeur américain, tandis qu'une rencontre entre Ford et son homologue japonais a eu lieu à la mi-décembre.