La révolution en marche
Pour séduire une clientèle loyale et souvent conservatrice, ce F-150 Lightning fait tout pour ressembler à une camionnette ordinaire. Et ce n’est pas la plus grande de ses qualités. Il pourrait même contribuer à sauver la planète. Rien de moins.
Trop longtemps enfermé dans un conformisme poussiéreux, le segment des camionnettes trimballe depuis quelques années une benne débordante de nouvelles idées, tout aussi séduisantes les unes que les autres, mais sans jamais renoncer à sa dépendance envers les énergies fossiles. Des promesses d’électrification, il y en a eu plusieurs, mais au Canada, l’histoire retiendra que Ford (et non Rivian ou Tesla) aura été le premier à les tenir. Par chance, d’autres suivront.
Cette transition énergétique dans le secteur des camionnettes est, de loin, celle qui aura le plus d’impact en Amérique du Nord. Pour peu que l’industrie accélère le pas (en augmentant la cadence de production) et que les consommateurs l’adoptent. Et c’est tant mieux. Selon une récente étude (mars 2022) réalisée conjointement par Ford et l’Université du Michigan, une camionnette électrique permet de réduire substantiellement l’empreinte environnementale par rapport à un modèle équivalent doté d’un moteur à combustion interne.
À l’heure actuelle, ce F-150 électrifié ne peut satisfaire tous les besoins. Si sa capacité de remorquage est remarquable, le F-150 Lightning pourrait engendrer une certaine frustration quant au nombre de ravitaillements nécessaires. Avec la remorque (7700 lb ou 3492 kg) utilisée lors des essais de camionnettes, l’autonomie du F-150 Lightning chute de plus de moitié. Un résultat qui ne surprend pas Jean-François Pelchat, lecteur et propriétaire d’un F-150 Lightning XLT doté d’une batterie à autonomie standard. « Lorsque je transporte ma remorque fermée de 20 pieds, l’autonomie baisse de 50 %. » À ce désagrément s’ajoutent les bornes de recharge. Celles-ci sont rarement accessibles à une camionnette ayant une remorque dans le dos, avons-nous constaté. Dans ces conditions, le F-150 Lightning assèche sa batterie en un rien de temps.
Peu de reproches
Ces écueils préoccuperont certains consommateurs. Pas tous. En effet, la vaste majorité des camionnettes qui sillonnent nos routes ne transportent ni madriers, ni blocs de béton, ni boîtes à outils. À quel usage les consommateurs les destinent-ils alors ? Au transport des meubles que vous vous êtes procurés à une boutique d’antiquités ? Pour y déposer vos skis et planches à neige ? Chose certaine, il faut chercher ailleurs – pas seulement sur les chantiers de construction et dans les régions rurales – ce qui séduit tant dans une camionnette. À lui seul, Ford en écoule près de 1 million par année. On peut dès lors comprendre l’impact du F-150 Lightning dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Hormis la question du remorquage, le F-150 Lightning surpasse à tous points de vue son équivalent thermique.
Bénéficiant d’une architecture solidifiée, d’une suspension arrière entièrement indépendante, d’une répartition presque parfaite de ses masses et d’un centre de gravité abaissé, cette camionnette électrique est étonnante.
Pas de coups de raquette sur les asphaltes bosselés, mais un aplomb et une douceur inhabituels pour un véhicule de ce segment.
Le sentiment de lourdeur généralement associé à de nombreux véhicules électriques sur le plan dynamique apparaît ici beaucoup moins prégnant que de coutume. Sans être d’une précision chirurgicale, la direction permet de négocier les virages avec assurance et sans se soucier des mouvements de caisse impromptus. Le poids a cependant une incidence sur le freinage, dont la puissance est correcte, mais sans plus. Cette camionnette offre également la possibilité de conduire à une pédale, mais la force de régénération nous est apparue un peu excessive et exige une période d’acclimatation.
Bien qu’il tracte aussi lourd – mais pas pour très longtemps sur une charge complète, s’entend –, le F-150 Lightning ne manquera pas de bousculer certaines idées reçues. Le couple en continu de ses deux moteurs électriques et l’absence de boîte de vitesses concourent à rendre l’expérience déroutante (dans le sens positif du terme). Pas d’à-coups, une force de couple linéaire, feutrée et instantanée...
Quant à l’autonomie, Ford propose (voir l’onglet « Fiche technique ») deux types de batteries sur l’ensemble de sa gamme, à l’exception de la déclinaison Platinum. Cette dernière plaque à son ventre la plus grosse, laquelle est offerte contre un supplément sur les autres versions. Elle entraîne un débours substantiel, mais étant donné sa plus grande rapidité de recharge et ses performances générales, elle représente sans doute le choix le plus éclairé.
Un environnement en apparence familier
Si vous n’avez jamais pris place dans un tel véhicule, vous serez agréablement surpris. Il n’a rien de rustique, mais ne flirte pas avec la science-fiction non plus. Le F-150 Lightning permet de tout configurer (ou presque) et introduit un rapport différent à l’automobile. L’automobiliste peut gérer au plus près le fonctionnement de sa monture comme s’il conduisait un prototype plutôt qu’un modèle de série. Comme bien d’autres, le F-150 Lightning s’émancipe de plusieurs commandes, renvoyées dans l’arborescence accessible au moyen de l’écran d’infodivertissement. Hélas, la maîtrise laborieuse de ces commandes présente certains défis et est source de distraction.
Avec ce Ford, il est possible d’alimenter sa maison, de créer une vraie fête d’avant-partie (tailgate party) en déposant un téléviseur dans la benne et même de « survolter » un autre véhicule électrique. Que de « bennes » idées.
Consultez le site de Ford CanadaFord F-150 Lightning
Fourchette de prix
De 68 000 $ à 110 000 $
Consommation moyenne et autonomie
27,6 kWh/100 km
370 km (autonomie standard)
483 km (Platinum/autonomie étendue)
515 km (autonomie étendue)
On aime
Fonctionnalité accrue (par rapport à son équivalent thermique)
Confort et silence de roulement
Dynamique malgré le poids
On aime moins
Distance de remorquage comptée
Interface lente et distrayante
Carences du réseau de recharge publique
Notre verdict
Une transition réussie
Fiche technique
Moteur
- Autonomie standard : moteurs électriques (x2), puissance : 452 ch (337 kW), couple : 775 lb-pied (1050 Nm)
- Autonomie étendue : moteurs électriques (x2), puissance : 580 ch (433 kW), couple : 775 lb-pied (1050 Nm)
Performances
- Poids à vide minimum : de 2799 kg à 2989 kg
- Dimensions de la batterie (utile) : 98 kWh (autonomie standard), 131 kWh (autonomie étendue)
- Capacité de remorquage maximale : 3493 kg (autonomie standard), 4536 kg (autonomie étendue)
Boîte de vitesses
- De série : automatique
- Optionnelle : aucune
- Mode d’entraînement : quatre roues motrices
Pneus
- 275/60R20 (XLT et Lariat)
- 275/50R22 (Platinum)
Temps de recharge
- Niveau 2 : entre 8 heures et 19 heures (de 15 % à 100 %)
- Niveau 3 : de 41 minutes à 122 minutes (de 15 % à 80 %)
Consommation et autonomie
- 24,8 kWh/100 km (meilleure consommation obtenue)
- 370 km (autonomie standard)
- 483 km (Platinum/autonomie étendue)
- 515 km (autonomie étendue)
Dimensions
- Empattement : 3696 mm
- Longueur : 5910,5 mm
- Hauteur : 1989 mm
- Largeur : 2032 mm (rétroviseurs extérieurs exclus)
Pareil, pas pareil
En apparence, le F-150 Lightning a tout du F-150 thermique. Même cabine, même benne, mais la structure est inédite. Outre les suspensions indépendantes aux quatre roues, l’architecture est complètement différente pour accueillir les deux moteurs électriques (un sur chaque essieu) et la batterie. Deux configurations existent au catalogue et la plus puissante (autonomie étendue) entraîne un débours supplémentaire de 13 380 $.
Courte distance
Il y a tant de paramètres en jeu (température, conduite, itinéraire, etc.) qu’il importe d’apporter plusieurs nuances. Cela dit, le F-150 Lightning peut effectivement tracter de lourdes charges, mais uniquement sur de courtes distances. Avec une remorque de 7700 lb, une batterie remplie au maximum de sa capacité et une conduite apaisée (100 km/h), sans climatisation et avec une température extérieure de 18 oC, « notre » Lightning pouvait parcourir 157 km.
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La Presse publiera prochainement l’essai des véhicules suivants : Audi Q4 e-tron, Honda Civic Type R, Kia Niro, Mercedes-Benz EQB, Mitsubishi Outlander PHEV, Nissan Ariya, Range Rover et Vinfast VF8. Si vous possédez l’un de ces véhicules ou si vous envisagez d’en faire l’acquisition, nous aimerions bien vous lire.
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