Près de 20 % des acheteurs optent pour la déclinaison sportive ST de l’Explorer. Doit-on succomber ou résister à ses charmes ?

Une recette (gagnante) toute simple

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Pas vraiment virevoltant, mais exempt de la moindre prise de roulis en courbe, ce mastodonte se comporte sur la route comme une locomotive posée sur des rails.

La ficelle est aussi grosse que les étriers rouges cachés derrière les branches ébène de jantes. Prenez un utilitaire de plus de 2 tonnes, envoyez-le au gymnase (roues de 21 pouces, barre antiroulis gonflée aux stéroïdes et suspension rigide comme un banc de musculation) et placez sous le capot un moteur musclé. Agitez bien fort et, à la sortie de la chaîne d’assemblage, apposez le respectable sigle ST. Vous obtenez une nouvelle gamme d’utilitaires sport.

Oui, la ficelle est un peu grosse, mais on a moins envie d’y voir un élémentaire calcul commercial – pratiquement tous les constructeurs proposent des versions plus épicées de leurs utilitaires – qu’une véritable envie de la part d’une firme qui entend démontrer son savoir-faire dans la mise au point de véhicules performants.

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Contrairement aux autres Explorer (à l’exception de la version Platinum), la déclinaison ST ne compte que six places... Les sièges de la rangée médiane procurent amplement de dégagement.

Tout modèle qui ambitionne de rentrer dans ce club des utilitaires dévergondés doit répondre à un strict cahier des charges : recourir à une imposante cavalerie, être versé dans la technologie, mais aussi, et surtout, en imposer. Comme ses rivaux, y compris les plus coûteux et les plus nobles, l’Explorer ST en dit plus long qu’une carte de visite.

L’Explorer ST se livre avec application à ces figures imposées. Pour le mouvoir, il réquisitionne les services d’un moteur V6 suralimenté par deux turbocompresseurs. D’une cylindrée de 3 litres, cette mécanique de 400 chevaux est capable de souffler le chaud et le froid.

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L’Ensemble ST Urbain (une option de 1500 $) permet de bénéficier d’étriers plus puissants (peints en rouge) et de disques dont le diamètre rivalise avec celui d’une assiette à pizza.

À condition de garder le pied assez léger, il est facile de maintenir la consommation en dessous des 12 litres aux 100 kilomètres. En revanche, si l’on se met en tête de laisser libre cours à l’impressionnante cavalerie qui piaffe sous le capot ou, de manière plus prosaïque, si l’on ne peut s’extraire de la circulation urbaine, il faut alors s’attendre à voir l’aiguille de la jauge d’essence décliner rapidement.

Ce V6 s’arrime à une boîte automatique à 10 rapports. L’algorithme de cette dernière se modifie à la demande en fonction d’un rythme que celui ou celle qui se trouve à son volant souhaite imposer à sa monture. Dans sa programmation la plus sportive, cette boîte taille à la hache les vitesses, mais c’est voulu. Comme les pétarades des échappements.

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Le moteur est un V6 suralimenté par deux turbocompresseurs, d’une cylindrée de 3 litres, qui produit 400 chevaux.

Pour plaquer au sol l’Explorer ST malgré son centre de gravité très élevé, Ford a tout de même dû prendre les grands moyens en le dotant d’un différentiel arrière plus sophistiqué, d’amortisseurs plus fermes et de barres antiroulis plus grasses. Pas vraiment virevoltant, mais exempt de la moindre prise de roulis en courbe, ce mastodonte se comporte sur la route comme une locomotive posée sur des rails, ce qui équivaut en soi à un vrai tour de force. Dès lors, ce Ford peut enchaîner les changements d’appui sans le moindre signe de mauvaise humeur grâce notamment à la répartition idéale du poids entre les trains roulants (51,3 % à l’avant et 48,7 % à l’arrière) obtenue à l’aide de cette nouvelle architecture à roues arrière motrices (au Canada, le rouage intégral est le seul mode offert) avec implantation du moteur en position longitudinale. Pour mémoire, la précédente génération de l’Explorer était déposée sur une architecture à roues avant motrices et le moteur se trouvait monté transversalement.

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La direction, inutilement pesante à très petite vitesse, s’allège par la suite, mais sans véritablement gagner en précision.

La direction, inutilement pesante à très petite vitesse, s’allège par la suite, mais sans véritablement gagner en précision. Quant au freinage, celui-ci se révèle plutôt sensible à l’échauffement dans sa configuration de base. Mieux vaut opter pour l’Ensemble ST Urbain (une option de 1500 $). Ce groupe permet de bénéficier d’étriers plus puissants (peints en rouge) et de disques dont le diamètre rivalise avec celui d’une assiette à pizza. En contrepartie, à cet ensemble se greffent les jantes et pneus de 21 pouces qui interfèrent avec le confort de roulement, qui n’en devient alors que plus ferme encore. Qu’à cela ne tienne, cette option mérite considération.

Gros format, petite famille

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La position de conduite se règle finement (colonne de direction et réglages de sièges), mais la présentation intérieure, elle, ne diffère guère de celle des autres Explorer, à l’exception de quelques monogrammes.

À l’avant, les deux baquets multicontours (en option) vous accueillent avec la douceur d’une chaude poignée de main. Ceux-ci procurent un support adéquat, sans plus, considérant l’adhérence et un confort appréciable sur de longs parcours. La position de conduite se règle finement (colonne de direction et réglages de sièges), mais la présentation intérieure, elle, ne diffère guère de celle des autres Explorer, à l’exception de quelques monogrammes, histoire de rappeler au propriétaire qu’il se trouve à bord d’un modèle « d’exception ». Les stylistes ont réalisé un bel effort pour mettre en lumière le bloc d’instrumentation, mais ils ont visiblement été pris de court pour intégrer l’immense tablette tactile (10,1 pouces) au centre du tableau de bord. Ils l’ont juste carrément suspendu, sans le moindre souci d’esthétisme. Cela dit, elle se révèle conviviale à utiliser, mais le système Sync 3 – sur notre modèle d’essai – engendre encore quelques dysfonctionnements notamment en matière de jumelage.

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Pour plaquer au sol l’Explorer ST malgré son centre de gravité très élevé, Ford a dû prendre les grands moyens en le dotant d’un différentiel arrière plus sophistiqué, d’amortisseurs plus fermes et de barres antiroulis plus grasses.

Contrairement aux autres Explorer (à l’exception de la version Platinum), la déclinaison ST ne compte que six places... Les sièges de la rangée médiane procurent amplement de dégagement. Dans la troisième rangée, beaucoup moins. Dès lors, il y a tout lieu de s’interroger sur le sens qu’il faut donner à un véhicule aussi volumineux, gourmand et capable d’accueillir confortablement quatre personnes. Car cette déclinaison ST est conçue pour des usages largement virtuels ; dans la vraie vie, rarissimes sont ceux qui consentent à exposer un engin pareil à la rude pratique du tout-terrain, encore moins à lui faire négocier à vive allure les esses du circuit Mont-Tremblant. On les comprend un peu.

L’émergence de ces véhicules comme l’Explorer ST, que l’on croit prêts à bondir pour laisser dans leur sillage l’odeur du caoutchouc brûlé, paraît tout de même paradoxale tant l’expression d’une sportivité exacerbée ne paraît guère s’inscrire dans l’air du temps. Sans doute faut-il voir à travers cette invocation symbolique de la vitesse une façon d’y renoncer sans en abandonner les attributs.

Faites part de votre expérience

La Presse publiera prochainement l’essai des véhicules suivants : Lexus NX, Nissan Qashqai, Porsche 911, Volkswagen Passat. Si vous possédez l’un de ces véhicules, nous aimerions bien vous lire.

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Ford Explorer ST

Fiche technique

Moteur

V6 DACT 3 litres turbocompressé
400 chevaux à 5500 tr/min
415 lb-pi à 3500 tr/min

Performances

Rapport poids/puissance : 5,33 kg/ch
Accélération : 5,7 secondes
Capacité maximale de remorquage : 2540 kg

Boîte de vitesse

De série : automatique 10 rapports
Optionnelle : aucune
Mode d’entraînement : intégral (quatre roues motrices)

Pneus

255/55R20
275/45R21 (option)

Capacité du réservoir et essence recommandée

68 litres
Ordinaire

Consommation

12,1 L/100 km

Dimensions

Empattement : 3025 mm
Longueur : 5063 mm
Hauteur : 1782 mm
Largeur : 2268 mm

L’air sans la chanson

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Le Ford Edge ST-Line

Au même titre que chez Audi, BMW et Mercedes, il sera dorénavant possible chez Ford d’obtenir une version édulcorée de la ST. En effet, la marque américaine inscrira à son catalogue la ST-Line, un groupe d’options visuellement très ressemblant à celui de la ST, mais les éléments de performances associés en moins. Pour l’heure, l'Edge (notre photo) est le premier véhicule à bénéficier du traitement S-Line.

Style libre

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Le Ford Explorer ST version CGS

L’Explorer ST donne des idées aux préparateurs, dont la société CGS qui, à l’occasion de la grand-messe de la personnalisation (tuning) SEMA Show, l’automne dernier, révélait les formes et les teintes d’une version encore plus « m’as-tu-vu ». Outre le traitement bicolore de la carrosserie, cette version adopte des jantes de 24 pouces. Le V6 de 3 litres suralimenté par deux turbocompresseurs a, pour sa part, été légèrement modifié et produit ici 412 chevaux.

Les rivales

Face à une concurrence souvent trop chère ou difficile à défendre sur le plan écologique, l’Explorer ST a une carte à jouer.

Audi SQ7

PHOTO FOURNIE PAR AUDI AG

Audi SQ7 TDI

Prix : à partir de 104 000 $

« Plus de cylindres que de sièges », clame la publicité du constructeur germanique au sujet du SQ7. Animé d’un moteur V8 4 litres de 500 chevaux, ce Audi est non seulement plus rapide, plus sophistiqué que la Ford, mais aussi beaucoup plus coûteux à acquérir. Ne serait-ce que pour cette seule raison, la comparaison entre ces deux modèles apparaît boiteuse, mais permet à tout le moins de mesurer le fossé qui les sépare.

Dodge Durango SR-T

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Dodge Durango SR-T

Prix : à partir de 68 611 $

Le Durango SR-T représente sans doute le véritable concurrent naturel de l’Explorer ST. Conçu par l’antenne sportive du groupe, ce Durango représente assurément une valeur sûre dans sa catégorie en matière de fiabilité. Qu’à cela ne tienne, le poids des années (la mise en service de la génération actuelle remonte déjà à près de 10 ans) commence à se faire sentir, et ce, en dépit des multiples retouches dont il a fait l’objet depuis. Pour jouer les « dragsters en talons hauts », ce Dodge ne craint personne avec son énorme V8 6,4 litres de 475 chevaux pour peu que l’on étanche son insatiable soif en hydrocarbures (aisément plus de 15 L/100 km).

Mercedes GLE 53 AMG

PHOTO FOURNIE PAR MERCEDES-BENZ AG

Mercedes GLE 53 AMG

Prix : à partir de 87 800 $

La GLE 53 AMG existe en configuration sept places. Sans véritable surprise, il s’agit d’une option que Mercedes facture au prix fort (2400 $), sans garantir à ses occupants qu’ils en apprécieront le confort. Une critique qui s’adresse à la grande majorité des utilitaires comportant trois rangées de sièges. Comme pour l’Audi SQ7, la sophistication technique, la dynamique de conduite et la qualité des habillages intérieurs peineront à trouver justification auprès des consommateurs en quête d’un utilitaire « familial » offrant un supplément d’âme.