Alors que leur compagnie était au bord du gouffre en 2000, les cadres de General Motors eurent une idée pour changer l'image de ses véhicules gros buveurs et montrer la voie de l'avenir automobile : une auto électrique équipée d'une génératrice à essence lui permettant d'aller loin. 

Au Salon de l'auto de Détroit en 2007, GM dévoila le prototype Chevrolet Volt, sans être tout à fait certaine de maîtriser la technologie requise pour cette percée dans les véhicules à batterie.

Il fallut presque quatre ans de plus, mais la première Volt sortit de l'usine à la fin 2010. GM espérait que ses clients voudraient d'une auto ayant 56 km d'autonomie électrique avant que la génératrice à essence s'allume, offrant 554 km de plus avant de faire le plein. 

Hé bien non, ils n'en voulaient pas. La semaine dernière, la dernière Volt est sortie d'une usine de Détroit qui va fermer. Il s'en est vendu 20 000 par année, en moyenne, pas assez pour rentabiliser ce coûteux investissement.

La Volt fut la première voiture électrique à résoudre l'angoisse de la batterie vide, à un coût «raisonnable»; à 41 000 $ avant un crédit d'impôt américain de 7500 $, c'était quand même beaucoup. La EV1 de GM, durant les années 90, avait une autonomie limitée et le Roadster de Tesla, en 2008, coûtait plus de 100 000 $ (tous les montants dans cet article sont en dollars américains). 

Un tremplin vers la tout électrique

Pourtant, la Volt n'a pas été inutile : elle a mené à des percées dans la technologie des batteries au lithium-ion. Mais ces progrès ont eu raison de la Volt, puisque GM et d'autres constructeurs peuvent maintenant construire des voitures tout électriques ayant 320 km d'autonomie et pouvant se passer de la génératrice à essence.

PHOTO GM

La Chevrolet Volt 2019.

«Financièrement, la Volt est un échec, mais elle a fait ce qu'on attendait d'elle», dit Bob Lutz, vice-président à la retraite chez GM, considéré comme le père de la Volt. «On la voyait comme un tremplin vers la tout électrique, qui étaient impensables à l'époque en raison du coût astronomique des batteries au lithium-ion.»

GM produit désormais la Chevrolet Bolt, qui a 383 km d'autonomie, et d'autres véhicules électriques sont attendus.

La Volt a attiré une clientèle loyale et bon nombre de ces pionniers en veulent à GM d'euthanasier leur voiture préférée. Richard Winters, médecin de 65 ans qui habite Poteau, en Oklahoma, décrit la Volt comme utile en région, où les bornes de recharge sont rares. Il a acheté sa première Volt en 2016 pour son aller-retour quotidien entre sa maison et l'hôpital où il pratique. 

Il en a acheté une autre l'an dernier, une version améliorée ayant 85 km d'autonomie électrique. Il peut la brancher à l'hôpital, donc l'essentiel de sa navette quotidienne se fait à l'électricité. Il parcourt souvent 2250 km entre les pleins et charger la batterie coûte seulement un dollar, dit-il.

Pas la voiture prévue à l'origine

Winters blâme GM pour sa promotion peu enthousiaste de la Volt : «J'ai été surpris du peu de marketing. Je n'aurais pas de voiture électrique sans la génératrice à essence.»

À l'origine, la Volt devait être une cinq-places futuriste avec une batterie et un moteur 3-cylindres comme génératrice, explique Sam Abuelsamid, analyste chez Navigant Research.

PHOTO GM

Bob Lutz posant avec la Chevrolet Volt 2011.

Mais en raison de contraintes financières (GM sortait de la faillite), GM s'est contenté d'une version modifiée de la Chevrolet Cruze, à quatre places et faites de composantes standard GM y compris un moteur 4-cylindres. «Ils ont fait des progrès inouïs avec cette auto, mais elle n'a pas exploité tout le potentiel de l'idée originale.»

Ç'aurait été bien de continuer à faire la Volt, mais les consommateurs s'intéressent surtout aux VUS, note Abuelsamid. Par ailleurs, GM perdait de l'argent à chaque vente et cet argent était nécessaire pour financer les tout électriques et l'auto autonome. 

«La Volt n'est pas la bonne voiture dans le marché d'aujourd'hui, dit Abuelsamid. Ça n'a pas de sens de la garder, peu importe que vous l'aimiez. C'est probablement mieux de la laisser mourir.»

PHOTO WIKIPÉDIA

Le prototype Volt présenté au Salon de l'auto de Détroit en 2007.